La reprise n'est pas près de s'accélérer

Par Fabien Piliu  |   |  913  mots
Bercy vise une croissance de 1,5% en 2016.
En 2016, le gouvernement table sur une croissance de 1,5% du PIB. Un rythme insuffisamment élevé pour réduire le nombre de demandeurs d'emplois. Cette situation perdurera tant que l'économie française restera essentiellement tournée vers la zone euro.

Ce sera tout sauf une reprise franche. Après avoir progressé de 1,1% en 2015, la croissance française devrait augmenter de 1,5% cette année. Certes, reprise il y a. Mais elle est bien timide, trop timide pour permettre de réduire le nombre de demandeurs d'emplois. Au troisième trimestre, le taux de chômage de la population active s'élevait à 10,2% de la population active, ce qui représente un sommet depuis 2007.

A qui la faute ?

A qui la faute ? A l'absence de réformes structurelles qui permettraient aux entreprises de se sentir plus libres d'embaucher ? A l'austérité, qui est le fil rouge de la politique économique française depuis 2012 ? A un manque de confiance de la part des citoyens, ménages et entreprises qui sont déçus par le quinquennat actuel ? Tous ces éléments fournissent une partie de l'explication à cette absence de reprise franche de l'économie tricolore.

Si celle-ci est engluée, c'est aussi parce que son dynamisme repose en grande partie sur celui des pays de la zone euro. Selon l'Eurozone economic outlook réalisé par l'Insee, l'Ifo et l'Istat, le PIB de la zone euro a progressé de 1,5%. En 2016, cette très pâle reprise devrait se poursuivre. C'est une augmentation de 0,4% du PIB par trimestre qui est attendue au premier semestre, à condition que certains aléas ne se produisent pas. Citons par exemple une remontée brutale des prix du pétrole ou une crise géopolitique qui affecterait le commerce international.

Prudence, prudence

" Une escalade des conflits au Moyen-Orient pourrait ébranler la confiance des consommateurs, des producteurs et des investisseurs dans le monde. Dans un tel scénario, le cours du pétrole pourrait remonter brusquement, car beaucoup de pays de cette région comptent parmi les principaux producteurs de pétrole du monde. Sont également présents des risques associés à la transformation structurelle de l'économie chinoise, d'une économie tournée vers l'export et les investissements à une économie tirée par la consommation. Un raté dans ce processus de transformation, ou même une évolution trop heurtée, pourraient de nouveau conduire à une sortie des capitaux des pays émergents, ce qui pourrait causer des turbulences sur les marchés financiers, voire entraîner une crise de change ", explique la note de conjoncture des trois instituts européens décidément bien peu engageante.

Pas de relais de croissance à l'international

Sachant que la France réalise près de 60% de son commerce extérieur avec les pays de la zone euro, on ne peut s'étonner des faibles perspectives de croissance de l'économie tricolore. Comment peut-on imaginer que l'activité décolle enfin alors que le commerce extérieur - qui représente 30% du PIB - est en panne ?

Au 2014, il a couté 0,5 point de la croissance. En 2015, la facture s'est élevée à 0,1 point de PIB, malgré les gains de compétitivité-prix procurés par la chute des matières premières, la dépréciation de l'euro face au dollar et les mesures gouvernementales, permettant de réduire le coût du travail.

Pourtant, la diplomatie économique si chère à Laurent Fabius, le ministère des Affaires étrangères, est désormais en ordre de marche. Non ? On notera d'ailleurs l'extraordinaire silence du Quai d'Orsay sur ce sujet. Même les réseaux consulaires sont, si l'on en croit les discours plein de bonnes intentions, mobilisés pour relancer les exportations du made in France. Et pourtant, le compteur d'entreprises exportatrices reste bloqué aux alentours de 120.000 par an.

Des responsabilités partagées

Le Quai d'Orsay est-il le seul à blâmer ? Pas vraiment. Quand une poignée d'entreprises innovantes part à la conquête de marchés, d'investisseurs aux Etats-Unis ou ailleurs, combien d'entreprises restent plantées dans le marasme hexagonal ?

Tout est à revoir car les responsabilités sont multiples. L'apprentissage de l'anglais, et ce dès le plus jeune âge, n'est toujours pas jugé utile par le ministère de l'Education nationale. La formation des chefs d'entreprises est inexistante, chefs d'entreprises dont une partie de l'activité est consacrée à dénouer les tracasseries administratives en dépit du choc de simplification promis par chaque président de la République depuis Georges Pompidou.

" À l'heure actuelle, investir en France est un travail. C'est abord un travail administratif, car il faut passer toutes les filières et tous les bureaux, remonter toute la hiérarchie pour obtenir toutes les permissions, toutes les bénédictions. Je reconnais que c'est une calamité et si je puis faire quelque chose pour simplifier tout cela, croyez bien que je le ferai ", déclarait Georges Pompidou au Dîner des Jeunes Patrons le 27 avril... 1964.

Le volontariat international en entreprise est toujours méconnu

Quant au soutien à l'export, il est toujours méconnu, voire inefficace, qu'il soit gouvernemental - malgré les innombrables réformes dont il a fait l'objet - ou qu'il soit apporté par les réseaux consulaires et les partenaires sociaux. Ultime preuve de ce gâchis, le Volontariat international en entreprise (VIE) est un épiphénomène, en dépit de sa simplicité et des excellents retours de ceux qui ont utilisé ce dispositif. Selon Business France, on comptait fin 2014, 8.413 VIE en poste pour le compte de 1.848 entreprises, l'objectif du Pacte de compétitivité étant de faire passer à 9.000 le nombre de volontaires en poste. Des chiffres et des objectifs assez faibles si on les compare au nombre d'entreprises exportatrices et au nombre d'entreprises françaises : trois millions.