Partage de la valeur : un accord se profile après des mois de négociations tumultueuses

Par latribune.fr  |   |  723  mots
Le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux. (Crédits : Reuters)
En pleine réforme des retraites, les syndicats et le patronat ont levé le voile sur une série de propositions visant à élargir et simplifier l'accès au partage des bénéfices dans les entreprises. Reste à savoir si toutes les organisations vont signer.

En plein débat sur les retraites, la publication cette semaine des résultats stratosphériques de TotalEnergies en 2022 ont ravivé le débat sur les superprofits en France. Le gouvernement continue de s'opposer à une taxe sur les superprofits et préfère que les entreprises et syndicats parviennent à un accord sur le partage de la valeur. Les négociateurs du patronat français et de cinq syndicats ont présenté vendredi soir une série de propositions afin de simplifier et élargir le partage aux salariés des bénéfices, en particulier dans les plus petites entreprises, plusieurs syndicats s'y disant favorables.

« On arrive à un accord qui devrait être signé par la majorité des organisations syndicales », a déclaré Hubert Mongon, chef de file de la délégation patronale, à l'issue d'une longue réunion.

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Des mois de négociations tumultueuses

Après plusieurs mois de négociations compliquées, le Medef, la CPME et U2P côté patronal et les syndicats CGT, CFDT, FO, CFE-CGC et CFTC ont présenté un texte pour « rendre plus accessibles » les dispositifs existants et « poursuivre la simplification des dispositifs d'intéressement, de participation et d'actionnariat salarié et renforcer leur attractivité. »

Il vise notamment à largement généraliser des dispositifs tel que l'intéressement, la participation et les primes de partage de la valeur à toutes les entreprises de plus de 11 employés.

L'accord intervient après une dizaine de réunions et des mois de négociations qualifiées encore fin janvier « d'impossibles » par le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, dans un contexte social encore tendu par le projet de réforme des retraites, sur lequel syndicats et patronat défendent des positions diamétralement opposées.

Les syndicats doivent encore signer l'accord

Les instances nationales des syndicats doivent désormais décider de signer ou non l'accord. A ce stade, FO s'est dite favorable et la CFDT « pas défavorable », les autres syndicats restant réservés (CFE-CGC, CFTC, CGT).

Actuellement, il existe la participation (mécanisme de redistribution des bénéfices obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés) et l'intéressement (prime facultative liée aux résultats ou aux performances non financières), qui s'accompagnent d'avantages fiscaux.

Une course d'obstacles chez les plus petites entreprises

Les obstacles sont nombreux, surtout chez les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME). Malgré des assouplissements déjà décidés dans la loi Pacte de 2019 et celle de l'été 2022 sur le pouvoir d'achat, sont cités complexité et méconnaissance des dispositifs, manque d'accompagnement, formule de calcul complexe pour la participation, risques administratifs, etc.

Selon la direction statistique du ministère du Travail (Dares), 88,5% des salariés d'entreprises de plus de 1.000 personnes bénéficiaient d'un dispositif de partage de la valeur en 2020, contre moins de 20% dans celles de moins de 50 salariés.

Le nouveau texte prévoit que les entreprises entre 11 et 49 employés et qui sont rentables -- dont le bénéfice net représente au moins 1% du chiffre d'affaires pendant trois années consécutives -- « mettent en place au moins un dispositif » de partage de la valeur à partir du 1er janvier 2025.

Les entreprises de moins de 11 salariés « ont la possibilité » de partager les profits avec leurs salariés.

Dans celles de plus de 50 salariés, la participation va devoir « mieux prendre en compte » les résultats « réalisés en France et présentant un caractère exceptionnel tel que défini par l'employeur » - de quoi répondre aux polémiques sur les « superprofits » à travers une formule toutefois largement symbolique.

Les signataires s'opposent au dividende salarié du gouvernement

Le gouvernement défend de son côté la piste d'un dividende salarié pour compenser l'érosion du pouvoir d'achat par l'inflation -- un concept que les signataires de l'accord vendredi « s'engagent à ne pas soutenir ».

Une loi contraignante « au cours du quinquennat » a été annoncée à l'automne. Début janvier, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, a promis « des propositions concrètes » ainsi qu' une « convention » en février sur cette thématique. L'exécutif avait missionné l'ex-vice-président du Medef Thibault Lanxade en tant qu'ambassadeur de l'intéressement et la participation.

(Avec AFP)