Retraite : Macron prêt à mettre de l'eau dans son vin sur l'âge de départ à 65 ans

Par latribune.fr  |   |  923  mots
(Crédits : POOL)
Emmanuel Macron s'est dit lundi prêt à "bouger" sur la réforme des retraites et "ouvrir la porte" à un report de l'âge de départ à 64 ans, plutôt qu'à 65 ans, "s'il y a trop de tensions" et que cela peut bâtir un consensus". Le candidat a indiqué qu'il n'excluait pas de soumettre son projet de réforme des retraites à un référendum.

[Article mis à jour mardi 12 avril à 12H20 sur la question d'un référundum]

Des gages à l'électorat jeune et populaire, notamment celui de Jean-Luc Mélenchon, dont il a besoin pour remporter l'élection du 24 avril face à Marine Le Pen. En déplacement lundi dans à Denain et à Carvin, deux villes qui ont voté d'abord pour la candidate RN (à 40%) et Jean-Luc Mélenchon, Emmanuel Macron s'est dit prêt à "bouger" sur la réforme des retraites qu'il entend lancer cet automne et "ouvrir la porte très clairement" à un report de l'âge de départ à 64 ans, plutôt qu'à 65 ans, "s'il y a trop de tensions" et que cela peut bâtir un consensus". Un départ à 65 ans est en effet dénoncé par les syndicats mais aussi par les Insoumis et Marine Le Pen, qui défend le maintien de la retraite à 62 ans.

"Ce n'est pas un dogme"

"On n'a retenu qu'un chiffre magique" de 65 ans qui pourtant "n'arrive pas avant 2030 (...). Peut-être que s'il y a trop de tensions, il faut s'arrêter en 2027, et ne pas préempter la suite" de la réforme, a déclaré le président sortant dans une interview à BFM TV réalisée dans un bistrot de Carvin. "Les 65 ans ne sont pas un dogme", a-t-il ajouté plus tard répondant à des questions de la foule, en évoquant une nouvelle fois une "clause de revoyure en 2027".

Pour rappel, 2030 était l'échéance annoncée jusqu'ici pour porter progressivement l'âge de départ à 65 ans. Elle pourrait s'arrêter en 2027 et donc se limiter à un âge de départ à 64 ans, a-t-il expliqué.

"Je suis prêt à bouger le rapport au temps et dire qu'on ne fait pas forcément une réforme jusqu'en 2030 si je ressens trop d'angoisse chez les gens", a-t-il dit après l'interview. "Parce qu'on ne peut pas dire le dimanche soir 'je veux rassembler' et quand on va écouter les gens dire 'je ne bouge pas'."

Pour rappel, son projet actuel est de retarder l'âge de départ de 4 mois par an dès 2023.

Référendum ?

Prié de dire s'il pourrait soumettre son projet de réforme des retraites à un référendum, le candidat a répondu qu'il ne l'excluait pas, et ce « sur quelque réforme que ce soit",, et qu'il souhaitait une "méthode nouvelle" de concertation.

Une hypothèse que l'actuel ministre de l'Economie a toutefois mis de côté. Bruno Le Maire a estimé qu'il "vaut mieux trouver des compromis. Après s'il n'y a pas d'autres solutions, le président de la République ne l'a pas exclu donc ce n'est pas exclu", a-t-il estimé sur Cnews mardi à propos d'une consultation populaire.

"Nous savons qu'il est compliqué de convaincre les Français", a encore concédé Bruno Le Maire.

"Je suis prêt à discuter du rythme et des bornes. (...) Ce n'est pas forcément un drame", a-t-il ajouté. Selon Emmanuel Macron, le report progressif de l'âge de départ à la retraite est une nécessité due à l'allongement de l'espérance de vie des Français, mais aussi à son refus de baisser le montant des pensions, dont il entend fixer le niveau minimum à 1.100 euros pour une carrière complète, ou d'augmenter le niveau des cotisations pour éviter de rogner sur le pouvoir d'achat des français. Emmanuel Macron a plaidé hier pour un système qui continuerait à accorder aux personnes ayant commencé à travailler tôt un "avantage" leur permettant de partir plus tôt. Mais il a surtout proposé, comme en 2019, un système "individualisé" avec une analyse de la pénibilité des tâches que chacun a accompli pendant sa carrière. Il a suggéré des bilans de santé gratuits de la Sécurité sociale à 40 et 65 as pour l'évaluer.

"Notre pays est fatigué"

Le 27 mars sur France 3, Emmanuel Macron avait indiqué vouloir "prendre en compte la pénibilité des carrières" pour reporter l'âge de la retraite à 65 ans, mais en prenant des critères "qu'on individualise", car "sinon on va recréer des régimes spéciaux". Il souhaite aussi tenir compte "des carrières longues" ainsi que "des métiers fatigants, physiquement ou nerveusement", citant les travailleurs des abattoirs et les enseignants, pour qui "il est parfois dur dans certaines classes d'aller jusqu'à 65 ans".

Pour tous ces cas, "on va adapter les fins de carrière par la négociation", avait-il assuré.

Interrogé à ce moment-là sur "le risque de remettre les Français dans la rue", au regard de l'hostilité des syndicats, il a jugé que celui-ci existe mais que pour convaincre "il faut expliquer pourquoi".

"Je conviens" que cette réforme n'est pas facile, mais "ce n'est facile sur rien", avait-il dit. Et, impossible selon lui d'en faire l'économie si on veut financer l'autonomie des seniors et relever la pension minimale à taux plein à 1.100 euros.

"Je veux faire les choses avec calme, avec bienveillance, c'est pour ça que je n'ai pas lancé de telles réformes il y a quelques mois", a-t-il assuré. "Notre pays est fatigué de la crise Covid et inquiet de la guerre, mais il faut continuer à avancer", avait-il défendu.

Pour rappel, le grand dessein présidentiel d'un "système universel" - censé remplacer la quarantaine de régimes existants - n'a pas survécu à la crise sanitaire. Après des semaines de grèves et de manifestations, le projet de loi voté au forceps du 49-3 début mars 2020 a aussitôt été "suspendu" et jamais remis sur le métier.