Rémunérations et carrières des fonctionnaires : Valls veut passer en force

Par Jean-Christophe Chanut et Jean-Yves Paillé  |   |  714  mots
Le salaire net des fonctionnaires d'État, qui sont les plus nombreux avec plus de 2 millions d'agents, a baissé de 0,7% entre 2012 et 2013 en tenant compte de l'inflation.
Le Premier ministre assure qu'il va procéder à une refonte des grilles de rémunération des fonctionnaires même si le projet d'accord sur cette question n'a pas obtenu la signature de syndicats représentant au moins 50% des voix.

"Je ne veux pas, nous ne voulons pas que ce progrès, le résultat d'un an de négociations, soit bloqué par le refus de s'engager de certains, le refus de prendre leurs responsabilités."

Ainsi, Manuel Valls a annoncé ce mercredi 30 septembre, qu'il passerait en force en ce qui concerne l'accord sur les "parcours professionnels, les carrières et les rémunération" (PPCR), qui vient d'être rejeté par une majorité de syndicats de la fonction publique.

"Nous avons décidé, avec Marylise Lebranchu (ministre de la Fonction publique), que l'accord approuvé par six organisations syndicales s'appliquerait à l'ensemble des fonctionnaires. [....]  Les six sur neuf représentent 49% des fonctionnaires. Je reconnais que cela ne fait pas 50%, a déclaré le Premier ministre sur France Inter.

Pourtant, depuis les accord dits de "Bercy", conclus en 2008 entre Eric Woerth, alors ministre du Budget et de la Fonction publique, et les syndicats de fonctionnaires, dans la fonction publique, un accord majoritaire, signé par un ou des syndicat(s), représentant plus de la moitié des salariés est nécessaire pour s'appliquer. Or, en l'occurrence, la CGT, premier syndicat de la fonction publique, et d'autres syndicats comme FO et Solidaires ont refuser de signer l'accord PPCR. Il est donc minoritaire.

La refonte des grilles aura bien lieu

Dans le détail, le gouvernement veut procéder à une refonte des grilles de rémunération des fonctionnaires à partir de 2017. De fait le projet d'accord PPCR, finalisé le 9 juillet après un an de négociations, propose de revoir d'ici 2020 toutes les grilles de rémunération (catégories A, B et C). Il prévoit aussi beaucoup d'autres points jugés positif par la... CGT:

La CGT, première organisation syndicale de la Fonction publique, a fortement œuvré avant et durant les négociations pour aboutir aux avancées contenues dans le protocole : il en va ainsi notamment des revalorisations de grille, des conversions d'une petite part des primes en points d'indice, du passage en catégorie A de la filière médico-sociale, d'un plan d'actions visant à garantir l'égalité professionnelle femmes/hommes, des 3 grades au lieu de 4 dans la catégorie C, de la garantie de dérouler deux grades sur une carrière complète, de créer un droit à la mutation volontaire dans l'hospitalière, de l'engagement de revaloriser les carrières des agents de maîtrise. Ces points positifs sont évidemment aussi le fruit des luttes des personnels.

Le gel du point d'indice devrait perdurer

De fait, selon les calculs du ministère de la Fonction publique, si l'accord s'appliquait, au terme du processus de revalorisation, qui s'échelonnera de 2017 à
2020:

"les fonctionnaires gagneront en plus en début de carrière :
- catégorie C : +500 euros bruts annuels ;
- catégorie B, recrutement bac : +945 euros bruts annuels ; recrutement bac + 2 :
+ 1610 euros bruts annuels ;
- catégorie A type : +1 889 euros bruts annuels selon la carrière concernée".

Mais alors, dans ces conditions, pourquoi la CGT, première organisation syndicale dans la Fonction publique n'a t-elle pas paraphé le texte? Réponse de la centrale:

"Les principales mesures du protocole ne sont envisagées qu'à partir de 2017, certaines étant même programmées pour n'entrer en application qu'en 2018, 2019 ou 2020, engageant ainsi le prochain gouvernement dont l'orientation politique est pour le moins incertaine. Le gouvernement aurait dû pleinement s'engager sur la mandature actuelle. Les agents ont déjà trop attendu et ce calendrier est donc parfaitement inacceptable."

 Or, pour le Premier ministre interrogé sur France Inter:

Cet accord est « nécessaire » et « indispensable », notamment « pour revaloriser progressivement d'ici à 2020 tous les salaires à l'embauche et tous les salaires en fin de carrière ». Il est également « indispensable pour améliorer la mobilité parce qu'il y a beaucoup trop de rigidité dans la fonction publique ».

En revanche, le Premier ministre ne semble pas prêt à revaloriser le point d'indice gelé depuis cinq ans. A noter que le salaire net des fonctionnaires d'État, qui sont les plus nombreux avec plus de 2 millions d'agents, a baissé de 0,7% entre 2012 et 2013 en tenant compte de l'inflation, selon une étude de l'Institut national de la statistique (Insee). En 2012, il avait déjà reculé de 0,8%.

FO et la CGT ont dénoncé le passage en force opéré par le Premier ministre.