Richard Ferrand : le premier couac d'Emmanuel Macron ? Non, selon le parquet

Par latribune.fr  |   |  971  mots
Selon le Canard enchaîné, le lien entre Richard Ferrand et la gérante de la SCI dénommée Saca ne figure pas sur le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration des Mutuelles de Bretagne durant laquelle l'offre a été retenue, en 2011.
La probité de Richard Ferrand n'est "pas en cause" après des révélations du Canard enchaîné sur les anciennes activités professionnelles du ministre de la Cohésion des territoires, a-t-on déclaré mardi à Matignon.

>> Papier mis en ligne le 24/05/2017 à 08h55 | Mise à jour à 17h14

Le Canard enchaîné rapporte dans son édition à paraître mercredi que les Mutuelles de Bretagne, dont Richard Ferrand était alors le directeur général, ont loué à partir de 2011 des locaux, à Brest, appartenant à une société détenue par sa compagne. L'hebdomadaire précise que cette pratique n'a rien d'illégal.

"L'honnêteté de Richard Ferrand n'est pas en cause. Personne ne conteste que cette opération a été profitable aux Mutuelles de Bretagne", a-t-on réagi à Matignon.

"Cette opération s'est faite dans la plus complète transparence. Tout le monde est d'accord pour saluer le bilan de Richard Ferrand aux Mutuelles de Bretagne", a-t-on ajouté.

Dans l'entourage du Premier ministre, on déclare qu'un courrier à en-tête du conseil d'administration des Mutuelles de Bretagne prouve que la nature des relations entre Richard Ferrand et sa compagne, bénéficiaire de l'appel d'offres mieux-disant, était connue.

Richard Ferrand a dirigé les Mutuelles de Bretagne des années 1990 à 2012 avant de devenir député du Finistère sous l'étiquette du Parti socialiste puis l'un des bras droits d'Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle.

Selon le Canard enchaîné, le lien entre Richard Ferrand et la gérante de la SCI dénommée Saca ne figure pas sur le procès-verbal de la réunion du conseil d'administration des Mutuelles de Bretagne durant laquelle l'offre a été retenue, en 2011. Toujours selon le journal, la société a mis à disposition des Mutuelles de Bretagne des bureaux d'une surface totale de 379 m2 pour un loyer annuel de 42.000 euros.

Départ de Richard Ferrand ?

Quant à un départ de Richard Ferrand du gouvernement, "la question ne se pose pas", insiste-t-on à Matignon. Le ministre, nommé la semaine dernière, a fourni des explications similaires au Canard enchaîné.

"C'était la proposition la moins chère ! Le prix était conforme au marché et rien n'a été caché : tout le monde savait que cette SCI était la propriété de ma compagne", a déclaré ce proche d'Emmanuel Macron, cité par l'hebdomadaire.

>> VERBATIM VIDEO - Richard Ferrand, interviewé par BFMTV (24 mai 2017)

"Un local détenu par ma compagne"

 "C'est un acte de très bonne gestion"

 "C'est une sorte de cadeau de bienvenue pour ma nomination"

"La probité du ministre n'est en rien remise en cause, et il ne saurait donc être question de sa démission", a déclaré Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement, à la suite du conseil des ministres de ce matin. Il rejette ainsi la demande faite par Marine Le Pen. Evoquant un "enrichissement personnel parfaitement immoral", la présidente frontiste avait réclamé la démission du ministre de la Cohésion du territoire, nommé mercredi dernier.  "Cette affaire est très proche de (celle touchant) François Fillon", a-t-elle indiqué dans l'émission "Questions d'info" (franceinfo-LCP-Le Monde-AFP).

Ces révélations interviennent alors que le ministre de la Justice a débuté des consultations en vue de proposer une loi de moralisation de la vie publique, afin de la présenter en conseil des ministres avant les législatives du 11 et 18 juin. "Ça tombe mal", avait reconnu mercredi matin Christophe Castaner sur Europe 1.

Aucune loi enfreinte... selon LREM

Benjamin Griveaux, porte-parole de LREM, dont Richard Ferrand a été le secrétaire général, estime que le ministre n'a enfreint "aucune" loi, faisant écho à la réaction, mardi, des services du Premier ministre.

"On est dans le cadre d'une entreprise privée, il n'y a pas d'argent public qui est en jeu", a-t-il dit sur franceinfo, interrogé sur la concordance entre cette affaire et la loi prévue par le ministre de la Justice, François Bayrou.

Richard Ferrand a dénoncé dans un communiqué publié dans la nuit de mardi à mercredi "des dénonciations calomnieuses".

"Cette décision a été prise dans la pleine connaissance des liens qui unissaient Richard Ferrand et la propriétaire des locaux, dans le respect de toutes les règles en vigueur par le Conseil d'administration, seul décisionnaire, et dont Richard Ferrand n'a jamais été membre", déclare le ministre, mettant en avant que le loyer proposé par l'entreprise de sa compagne était inférieur au prix du marché.

L'actuel président des Mutuelles de Bretagne, Rémi Salaün, a apporté son soutien au ministre, insistant, dans une lettre adressée au directeur de l'hebdomadaire satirique, sur le fait que Richard Ferrand a "pris une large part au redressement de [l'] Union mutualiste".

Le Premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, a demandé de son côté que le Premier ministre et le ministre de la Justice s'expriment sur la situation de Richard Ferrand.

"Nous soutenons également la loi sur la transparence, encore faudrait-il qu'elle soit appliquée à Richard Ferrand", a-t-il dit sur Radio Classique, "je demande à ce propos que le Premier ministre et le Garde des sceaux s'expriment à ce sujet."

François Baroin, chef de file des Républicains pour les législatives, renvoie lui aussi le "problème" à François Bayrou.

Il a ajouté, devant la presse, que c'est à Richard Ferrand "de voir s'il est en situation désormais (...) de pouvoir exercer les responsabilités éminentes que lui a confié le président de la République."

Le parquet ne compte pas ouvrir d'enquête

Après les révélations du Canard enchaîné sur le ministre de la Cohésion des territoires, le parquet national financier ne se saisira pas du dossier Richard Ferrand, ont appris nos confrères de Franceinfo. Il revient désormais au parquet de Brest de décider si, oui ou non, une enquête doit être ouverte sur les activités de Richard Ferrand, lorsqu'il était directeur général des Mutuelles de Bretagne en 2011.

(avec agences)