Sans le savoir, il porte secours au kamikaze du "Comptoir Voltaire"

Par latribune.fr  |   |  537  mots
D'après l'infirmier, le kamikaze, Brahim Abdeslam, se serait installé à la terrasse du "Comptoir Voltaire" avant de déclencher son explosif. Il fera plusieurs blessés.
David, infirmier, dînait au Comptoir Voltaire, dans le XIe arrondissement le vendredi 13 novembre au soir quand un homme s'est fait exploser. Sans le savoir, il prodigue les premiers soins de secours au kamikaze.

Ce devait être un vendredi soir comme tous les autres. Ce 13 novembre, David, 46 ans, dîne avec un ami au "Comptoir Voltaire" au 253 du boulevard du même nom. Mais à 21h40 environ, une explosion retentit au moment où la serveuse apporte les plats sur la table.

"C'est une flamme énorme qui s'est soulevée avec de la poussière et (...) pour moi, c'étaient les parasols de chauffage qui étaient sur cette terrasse qui avaient éclaté", se souvient David, qui était installé à l'intérieur. "J'ai crié : 'Coupez le gaz!'", raconte ce rescapé à l'agence Reuters.

Dans le chaos, David -infirmier dans un grand hôpital parisien- porte secours à un homme bloqué entre des tables et des chaises soufflées par la déflagration :

"Je le claque, je m'approche, pas de respiration, il est complètement inconscient", raconte-t-il à Reuters. Il remarque une plaie d'environ 30 cm sur le côté du corps. A cet instant, il est persuadé que ce client a été blessé dans cette explosion, peut-être due à une fuite de gaz.

"Là, j'ai tout de suite compris : c'est une explosion, c'est un kamikaze"

Mais en déchirant le tee-shirt, il aperçoit des fils. "Mon regard s'est porté sur ces lampes de chauffage, je vois qu'aucune des trois n'a rien (...) et là je vois les premiers boulons (...) "Là, j'ai tout de suite compris : c'est une explosion, c'est un kamikaze. Je savais que c'était lui."

A ce moment là, les pompiers arrivent. David fait un point sur la situation avec l'un d'entre eux. "Je lui dis : ce gars est inconscient, on a commencé le massage cardiaque, j'ai déchiré son tee-shirt, il y a des fils dessus. Et là, il me regarde et il se met à crier : "on évacue tout ! Tout le monde dehors !"".

Trois personnes grièvement blessées dans le bar

Car cet homme n'est autre que Brahim Abdeslam, membre du commando qui a ouvert le feu sur des bars et restaurants des Xe et XIe arrondissements dans les 20 minutes précédentes, pendant qu'une autre équipée terroriste commettait un massacre au Bataclan et qu'une dernière faisait exploser trois bombes aux abords du Stade de France.

Âgé de 31 ans, il est également le frère de Salah Abdeslam, soupçonné d'avoir été membre du même commando, et toujours activement recherché.

"J'aurais pu aussi y passer. J'y pense, j'y pense encore."

Le samedi, David retourne au Comptoir Voltaire récupérer ses affaires. "J'ai eu une explication avec la police quand j'y suis retourné".

Il se souvient aussi que l'officier lui a dit quelle chance il avait eu : "Sa bombe n'a pas explosé tout à fait comme il fallait sinon il aurait fait beaucoup plus de dégâts".

L'infirmier sait aussi que son geste aurait pu le tuer : "En le mettant par terre, en le massant, c'est quand même des gestes assez brusques que j'ai faits. J'aurais pu aussi y passer. J'y pense, j'y pense encore."

Au total, 130 personnes sont tuées ou succomberont à leurs blessures et plus de 350 autres sont blessées en moins d'une heure à Paris et Saint-Denis. Au Comptoir Voltaire, le kamikaze Brahim Abdeslam est mort. Trois personnes ont été grièvement blessées ce soir-là.

(Avec Reuters)