Attentats : et demain ?

Les autorités françaises et européennes devraient s'interroger à la fois sur les moyens affectés à la défense, l'organisation du renseignement, et le rôle de l'Europe en Syrie. Par le Général (2S) Robert Creuzé

Dans un premier temps, l'unité nationale doit être notre objectif prioritaire au-delà des clivages politiques, voire politiciens, si on en croit certaines déclarations lamentables et qui n'honorent pas leurs auteurs. La France est en danger et, face à ces menaces, n'oublions pas le troisième terme de notre devise: "fraternité". L'Europe elle- même, est menacée du fait de ses clivages égoïstes ou idéologiques. Alors ne faisons pas le jeu de nos adversaires et réagissons au- delà de nos émotions initiales.

Face à ces menaces, n'oublions pas le troisième terme de notre devise: "fraternité". Soyons solidaires envers les familles des victimes de ces actes terroristes, abominables et inhumains. N'oublions pas les blessés et leurs familles qui garderont des cicatrices indélébiles de ces attentats. N'oublions pas les familles qui, par chance, ont été préservées mais qui n'ont connu des moments qu'elles ne pourront jamais totalement occulter de leur mémoire. Alors, les efforts sont importants, immédiats et conséquents: ils doivent être assumés par l'État responsable de la sécurité de ses citoyens, mais aussi par nous tous, amis, voisins, anonymes, au travers d'actions de solidarités : don du sang, aide financière ou amicale, et prise de conscience de la menace et de ses moyens d'y faire face.

Et demain?

Il faudra rapidement faire un bilan, une sorte de "Retex" comme disent les militaires, mais ne sommes nous pas dans une forme de gestion de crise militaire, voire de guerre selon les termes employés par le Premier ministre. Et, inévitablement se poseront certaines questions fondamentales :
- Notre effort pour la défense/sécurité est-il suffisant et cohérent avec la menace?
- Notre organisation du renseignement est-elle adaptée aux menaces et aux technologies disponibles ?
- Quelle politique diplomatique européenne et nationale adopter?

Sur le premier point, il convient de faire un bilan honnête et courageux, dépassant les propres sensibilités politiques, les gouvernements successifs ayant chacun leur propre part de responsabilité. Le "social" a été la priorité des politiques successives, droite et gauche confondues, comme le démontrent ces chiffres: 14% du PIB consacrés aux prestations sociales en 1959 ; 33% du PIB en 2015. Alors que le budget de la défense et de la sécurité a été divisé par 2 en 30 ans et que les effectifs ont également été divisés par deux en 15 ans depuis le passage à une armée de métier! Alors, il faut assumer ses responsabilités face à une situation qui est loin des espoirs des « dividendes de la paix ».

Quelle organisation pour le renseignement?

Sur le second point, il est temps de mener une vraie réflexion sur l'organisation du renseignement. Les premiers résultats de l'enquête en cours montrent, une nouvelle fois, que les renseignements existent mais ne sont pas exploitables, ou exploités, en amont. Ou alors, comment avoir tous les éléments aussi rapidement ? Il faut dépasser l'ego de chacun, supprimer certains strates qui existent et cloisonnent le renseignement intérieur et le renseignement extérieur, avec des responsabilités partagées. Il faut s'appuyer sur les technologies existantes en termes de numérisation, digitalisation, cloud...ce qui nécessite une vraie révolution culturelle. Tout n'est pas une simple question d'effectifs et de budgets mais relève davantage de capacité d'innovation et de créativité. Il faut savoir partager, analyser et exploiter l'information et cela, en interministériel et en liaison plus étroite avec nos partenaires européens.

Que peut faire l'Europe en Syrie?

Sur le dernier point, il convient de dépasser les simples déclarations d'intention et de lancer des actions concrètes au niveau européen. Une prise de conscience collective est nécessaire pour vaincre les réticences politiques ou juridiques dans un environnement où solidarité et complémentarité sont indispensables. Chaque pays est concerné au même titre que la France par les questions de sécurité. Par ailleurs, on ne pourra éviter une nouvelle réflexion sur le rôle de la Russie dans le règlement du conflit en Syrie et se poser la question du poids de l'Europe dans cette partie du monde : voulons-nous exister ou simplement être spectateur ?

« Prévention », avec un service de renseignement adapté et moderne, « Dissuasion » avec un arsenal juridique revu et appliqué face aux actions liées au terrorisme, « Action » avec l'adoption de mesures concrètes et efficaces, nationales et européennes, telles sont les leçons que nous devons tirer de cette situation intolérable... sans attendre la prochaine fois.

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Commentaire 1
à écrit le 17/11/2015 à 19:05
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Et parler de désarmement ? Contrôle des fabrications et ventes d'armes ? La réunion avec les chefs d'états permettrait de lutter contre ce fléau. D'où viennent les armes au moyen orient et en Europe ?

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