Ventes d'armes en Arabie saoudite : Griveaux assume (il en va de l'industrie française)

Par latribune.fr  |   |  612  mots
L'Arabie saoudite serait le deuxième client de l'industrie de la défense française au cours de la décennie 2007-2016, et le deuxième importateur d'armes au monde sur la période 2013-2017.
Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, a défendu lundi la vente d'armes françaises à l'Arabie saoudite, qui sont un "intérêt clair pour l'industrie française", et ce, malgré les critiques d'ONG sur leur possible usage dans la guerre au Yémen. Dans une étude, ces dernières pointent des "indices de présence" d'armement tricolore sur le sol yéménite.

Au lendemain de l'arrivée de l'homme fort de l'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane à Paris pour une visite diplomatique et culturelle de trois jours, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux l'assume : la vente d'armes françaises à l'Arabie saoudite représentent "un intérêt clair pour l'industrie française".

Plusieurs ONG et parlementaires s'interrogent pourtant sur leur possible usage dans la guerre au Yémen - qualifiée de "pire crise humanitaire du monde" par l'ONU -, chiffres troublants à l'appui. Selon une étude de l'Observatoire des armements (Obsarm) et de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), les prises de commande de l'Arabie saoudite ont explosé les deux années précédant le conflit au Yémen : 1,9 milliard d'euros en 2013 et 3,6 milliards en 2014 alors qu'elles se situaient habituellement autour de 600 à 800 millions d'euros.

Une industrie française de l'armement toujours florissante

L'intérêt pour la France est surtout stratégique. L'Arabie saoudite serait le deuxième client de l'industrie de la défense française au cours de la décennie 2007-2016, et le deuxième importateur d'armes au monde sur la période 2013-2017. Benjamin Griveaux n'a d'ailleurs pas manqué de préciser, lors de l'émission "L'Epreuve de vérité" sur Public Sénat-Radio Classique-AFP, que la péninsule arabique représente un" partenaire commercial important pour la France".

"Il y a une industrie en France importante avec des milliers d'emplois à la clé sur cette industrie particulière qu'est l'industrie de l'armement".

Et d'ajouter :

"Ça ne veut pas dire qu'on ferme les yeux mais (...) pour restaurer l'influence de la France dans certaines zones du monde, eh bien c'est un élément important de notre diplomatie. Notre industrie a aussi besoin de trouver des débouchés sur ces marchés".

Selon nos informations, le bilan des exportations globales d'armements tricolores en 2016 s'élèverait autour de 14 milliards d'euros. Mais le ministère de la Défense y inclut une partie du contrat des sous-marins en passe d'être vendus à l'Australie. Soit plus de 20 milliards d'euros.

Lire aussi : Exportation d'armements : la guerre des chiffres

Des canons et chars du français Nexter au Yémen ?

Lundi, dix ONG, dont Amnesty International, la Fidh, Action contre la faim, Human Rights Watch ou Reporters sans frontières, ont appelé Emmanuel Macron à demander au prince héritier saoudien de mettre un terme aux attaques contre les civils au Yémen.

En compilant les informations récoltées dans des rapports officiels de l'Institut international de recherche sur la paix (SIPRI) et des témoignages confidentiels, ces organisations relèvent dans la même étude citée plus haut (à la p.12) "l'utilisation possible" de canons Caesar et chars Leclerc fabriqués par le français Nexter, de drones de surveillance et d'hélicoptères Cougar (Airbus) et de frégates françaises au large du Yémen.

"Si ces indices ne constituent pas des preuves, ils jettent de graves soupçons sur la présence et l'utilisation massive de matériel militaire français au Yémen", peut-on lire.

Elles pressent par ailleurs la France de cesser ses ventes d'armes à l'Arabie saoudite et aux Emirats arabes unis, qui mènent la coalition sunnite engagée au Yémen. La présidence française a quant à elle déjà exclu toute suspension des ventes et livraisons, arguant d'un "contrôle très strict" des exportations.

Un député de La République en Marche, Sébastien Nadot, a déposé une proposition de résolution en vue de la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les ventes d'armes françaises aux belligérants au Yémen.

(Avec AFP et Reuters)