Vers un salaire minimum européen ?

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  574  mots
Un rapport parlementaire suggère de tendre en quatre étapes vers l'instauration d'un salaire minimum dans toute l'Union européenne., afin de lutter contre le "dumping social".
Un rapport parlementaire remis ce 19 octobre à la ministre du Travail propose, via un plan en quatre étapes, d' instaurer un salaire minimum dans l'ensemble de l'Europe.

« Lutter contre le dumping social », « organiser la convergence des salaires minima vers le haut ». Voilà deux vertus qu'entrainerait la mise en place d'un salaire minimum dans tous les pays européens, selon le rapport rédigé par Philip Cordery, député PS des Français de l'étranger, remis ce mercredi 19 octobre à la ministre du Travail Myriam El Khomri et au secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Harlem Désir.

Salaire minimum: de 184 euros en Bulgarie à... 1.923 euros au Luxembourg

Le rapporteur regrette la trop grande hétérogénéité qui règne au sein de l'Union européenne (en comptant encore le Royaume-Uni) en termes de salaires minima, ce qui aggrave la concurrence salariale. De fait, 22 des 28 pays de l'Union ont mis en place par la voie légale un salaire minimum. Mais six Etat ne l'ont pas fait : l'Italie, Chypre, l'Autriche, le Danemark, la Finlande et la Suède. Mais dans les quatre derniers pays, il existe cependant des minima conventionnels élevés.

Et quand il existe un salaire minima légal, les disparités sont énormes allant de... 184 euros mensuels en Bulgarie à 1.923 euros au Luxembourg. La France, elle, se situe à la quatrième place avec son Smic à 1.458 euros mensuels.

Pas un salaire minimum mais des salaires minima

Réaliste et conscient de la diversité des économies nationales, Philip Cordery ne plaide pas pour un salaire minimum unique et uniforme immédiatement dans toute l'Europe. En revanche, il préconise d'instaurer dans chaque Etat un salaire minimum dont le niveau varierait dans une fourchette de "50% à 60% du salaire médian national".

Un dispositif qui permettrait dans un premier temps de remonter les salaires dans les pays d'Europe centrale, là où la question salariale est la plus prégnante... et où la question des salariés détaché est la plus aigüe.

Philip Cordery suggère donc une « convergence en douceur » en quatre étapes. Il conviendrait d'abord d'inscrire l'obligation d'un salaire minimum dans le « futur socle européens des droits sociaux » qui doit voir le jour au premier trimestre 2017 a précisé Harlem Désir.

Ensuite, des « instances nationales de productivité » seraient instituées pour déterminer le rapport entre salaire médian et salaire minimum. Puis une conférence salariale annuelle européenne se tiendrait pour étudier les divergences salariales et la Commission européenne pourrait émettre des « recommandations » afin que le salaire minimum de pays européens soit revalorisés.

Au départ, ces quatre critères de convergence pourraient concerner la seule zone euro ainsi que des pays volontaires.

Salaire minimum et travailleurs détachés

Alors certes, la politique salariale est actuellement une « variable d'ajustement » entre les différents pays de l'Union. Et une convergence progressive des salaires minima pourrait être un facteur menant à une concurrence plus loyale. Mais, cela ne fait pas tout, Philip Cordery en convient. Il conviendra ensuite de s'attaquer une uniformisation progressive des cotisations sociales et de la fiscalité pesant sur les salaires. Car harmoniser un salaire brut ne servirait pas à grand-chose si l'on ne soucie pas du salaire net.

Quant à Myriam El Khomri, pour lutter contre le dumping social intra-européen, elle convient que les problèmes ne peuvent pas être séparés les uns des autres. L'instauration d'un salaire minimum doit donc aller de pair avec une révision du règlement européen de sécurité sociale et une refonte totale de la directive de 1996 sur le travail détaché.