Brésil : l'extrême droite en tête dans les sondages

Par latribune.fr  |   |  806  mots
Cet ancien capitaine de l'armée s'est envolé pendant l'été dans les sondages en surfant sur la colère des Brésiliens contre la corruption de la classe politique et l'insécurité. (Crédits : Reuters Photographer)
Le Brésil va vivre dimanche le premier tour d'une élection présidentielle polarisée comme jamais avec, pour la première fois, un candidat d'extrême droite en position de favori: l'ex-capitaine de l'armée Jair Bolsonaro, apologiste de la dictature.

Le député d'extrême droite Jair Bolsonaro, candidat à l'élection présidentielle brésilienne, a accru son avance sur son principal adversaire, le candidat du Parti des travailleurs (PT, gauche) Fernando Haddad, selon un sondage Datafolha publié jeudi à trois jours du premier tour de scrutin. Ancien officier âgé de 63 ans, Jair Bolsonaro a convaincu de nombreux Brésiliens de voter pour lui dimanche en raison de positions très dures contre l'insécurité et une carrière exempte d'accusations de corruption. Mais il fait aussi office de repoussoir pour une grande partie de l'électorat en raison de propos jugés homophobes ou misogynes.

Un pays divisé

Le pays a rarement été aussi divisé à l'approche d'une élection, durant laquelle les Brésiliens vont aussi désigner les députés de la chambre basse du Congrès et voter pour renouveler les deux tiers des 81 sièges du Sénat. Pour le premier tour, Jair Bolsonaro est crédité de 35% des intentions de vote, soit un gain de trois points par rapport à la précédente enquête d'opinion publiée mardi, et 13 points de plus que Fernando Haddad qui obtiendrait 22% des voix.

Selon Datafolha, les deux candidats se trouveraient au coude-à-coude au second tour. Cette enquête d'opinion a été diffusée peu avant la fin de la campagne électorale qui s'est achevée jeudi soir par un débat télévisé auquel n'a pas participé Jair Bolsonaro. Poignardé lors d'un meeting le 6 septembre dernier, il se remet de plusieurs interventions chirurgicales.

Bolsonaro, sorti samedi de l'hôpital, a annoncé qu'il reprendrait sa campagne le 12 octobre, soit cinq jours après le premier tour du scrutin. Le second tour est prévu le 28 octobre.Le candidat d'extrême droite, qui avoue sa nostalgie pour l'époque où le Brésil était sous l'emprise d'une dictature militaire (1964-1985), a expliqué que les médecins lui avaient ordonné de rester à l'écart de la joute télévisée de jeudi soir.

Mais pendant que les autres candidats débattaient sur TV Globo, il a donné une interview à TV Record, une chaîne rivale dirigée par l'un de ses soutiens, le prêtre évangéliste et magnat des médias Edir Macedo, ce qui a suscité les critiques de ses adversaires.

"Bolsonaro se soustrait à ses devoirs envers la population. Quiconque fuit le débat manque des qualités requises pour gouverner un pays", a déclaré l'ancien ministre des Finances Henrique Meirelles, candidat du parti centriste MDB (Mouvement démocratique brésilien) au pouvoir.

Dans une déclaration à une radio située dans le nord-est du pays, où la majorité des électeurs soutiennent Haddad, Jair Bolsonaro a annoncé jeudi qu'il enverrait l'armée dans la région afin qu'elle aide à la reconstruction des infrastructures prévue de longue date. Il a ajouté que les représentants de tous les partis politiques, dont le PT, seraient les bienvenus s'il parvenait au pouvoir.

Violentes critiques

L'équipe de campagne de Fernando Haddad a violemment critiqué Jair Bolsonaro jeudi via une publicité diffusée à la télévision, dans laquelle le candidat d'extrême droite est comparé à Adolf Hitler pour avoir longtemps vanté la dictature.

Cette publicité reprend des déclarations incendiaires de Bolsonaro, dont les prises de position controversées ont provoqué des manifestations de milliers de femmes à travers le pays. Bolsonaro a déjà minimisé la gravité du viol ou justifié l'écart des salaires entre hommes et femmes. Dans une vidéo diffusée sur Facebook, il s'est défendu d'être raciste, sexiste ou homophobe, même s'il est poursuivi en justice pour incitation à la haine.

Cet ancien capitaine de l'armée s'est envolé pendant l'été dans les sondages en surfant sur la colère des Brésiliens contre la corruption de la classe politique et l'insécurité. Il a notamment promis d'assouplir la législation sur le contrôle des armes à feu afin que les Brésiliens puissent s'armer contre les criminels.

Un programme économique flou

Bolsonaro est massivement soutenu par l'électorat évangéliste grâce à son hostilité à la légalisation de l'avortement, du mariage homosexuel ou de la consommation de stupéfiants. Les marchés financiers se réjouissent également de la perspective de voir Bolsonaro empêcher le retour au pouvoir du Parti des travailleurs, que les investisseurs jugent responsable de la grave récession connue par le pays en 2015 et 2016.

Le programme économique de Jair Bolsonaro reste cependant encore très flou. Le candidat a demandé la semaine dernière à son conseiller économique Paulo Guedes et à son colistier, le général à la retraite Hamilton Mourão, de s'abstenir de toute déclaration publique à la suite de l'émergence de contradictions sur la politique économique qu'il entend mener s'il accède à la présidence.

(avec agences)