Zaporijia : « un danger de catastrophe de grande envergure » menace la centrale nucléaire, avertit Poutine

Par latribune.fr  |   |  905  mots
La centrale de Zaporijia, située au sud de l'Ukraine à 550 km de la capitale Kiev. (Crédits : ALEXANDER ERMOCHENKO)
Alors que la Russie refuse de démilitariser la zone stratégique de Zaporijia qu'elle occupe depuis le mois de mars, Kiev craint une nouvelle escalade vendredi, pendant la visite du secrétaire général de l'Onu en Ukraine. Une accusation que la Russie a également adressée à son voisin. Après un échange téléphonique entre Vladimir Poutine et Emmanuel Macron, l'Elysée a indiqué que le chef de l'Etat russe avait accepté qu'une mission de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) « passe par l'Ukraine ».

[Article mis à jour vendredi 19 août à 18h00]

La tension reste maximale aux abords de la centrale nucléaire de Zaporijia située au sud de l'Ukraine et occupée par l'armée russe depuis le mois de mars. Tandis que Moscou a rejeté les demandes de démilitarisation de cette zone stratégique, les deux pays se sont mutuellement accusés jeudi de se préparer à mener, ce vendredi, une « provocation ». De part et d'autre, on s'accuse d'encourager l'escalade, en plein pendant la visite du secrétaire général de l'Onu, Antonio Guterres, prévue le même jour en Ukraine, dans le port d'Odessa notamment. Depuis quelques semaines, des bombardements tombent non loin de la centrale nucléaire faisant craindre un nouveau Tchernobyl, le plus important accident nucléaire civil.

Face au danger, Vladimir Poutine et Emmanuel Macron se sont entretenus par téléphone ce vendredi. Le dirigeant russe « a souligné que le bombardement systématique (...) du territoire de la centrale nucléaire de Zaporijjia crée un danger de catastrophe de grande envergure qui pourrait conduire à la contamination radioactive de vastes territoires », a dit le Kremlin dans un communiqué. MM. Macron et Poutine ont par ailleurs appelé à organiser « dans les plus brefs délais » une visite de la centrale par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), selon la même source. C'est ce qu'a confirmé l'Elysée, peu de temps après, indiquant que Vladimir Poutine avait accepté que la mission de l'AIEA « passe par l'Ukraine ». Il a déclaré, lors de cet entretien, qu'il acceptait de « revoir l'exigence » qu'elle passe par la Russie. « Il a accepté qu'elle (s'y) rende dans le respect de la souveraineté ukrainienne et donc en passant par l'Ukraine, sous contrôle gouvernemental », a ajouté la présidence française.

Plus tôt, c'est le secrétaire général de l'Onu qui tirait la sonnette d'alarme. « Nous devons dire les choses telles qu'elles sont : tout dégât potentiel à Zaporijjia serait un suicide », a déclaré Antonio Guterres, appelant une nouvelle fois à « démilitariser » la centrale. M. Guterres a appelé à ne pas l'utiliser « pour quelque opération militaire que ce soit ».

Ni Moscou, ni Kiev n'ont fourni d'élément concret à l'appui de leurs accusations mutuelles.

L'énergie de la Crimée annexée

Les autorités ukrainiennes ont aussi accusé l'armée russe d'avoir déployé des armes lourdes dans le périmètre de la centrale, dont elle a pris le contrôle mais qui est située près de la ligne de front.

Aussi, les services de renseignement ukrainiens ont également accusé Moscou de préparer une « provocation » à Zaporijia, disant avoir recueilli des informations selon lesquelles le personnel de l'agence de l'énergie atomique russe Rosatom a quitté les lieux, seuls les employés ukrainiens de la centrale devant être présents sur place vendredi. Dans un communiqué cité par les agences de presse russes, le ministère de la Défense a affirmé jeudi que ce n'était pas le cas, ni dans la centrale, ni dans les zones environnantes, où se déroulent pourtant de violents combats d'artillerie.

Jeudi soir un responsable de l'administration d'occupation prorusse de la région de Zaporijjia, Vladimir Rogov, a accusé les forces ukrainiennes d'avoir bombardé Energodar, la ville proche de la centrale nucléaire. Le ministère russe a ajouté que l'Ukraine entendait profiter de la venue dans le pays d'Antonio Guterres pour mener une « provocation » à Zaporijia, sans en fournir la preuve. Pour Moscou, la zone est clé. Le régime de Vladimir Poutine entend utiliser la centrale à son profit pour alimenter en électricité la péninsule de Crimée qu'elle a annexée en 2014.

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Soutien officiel de la Turquie

De son côté, le président turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé le soutien de la Turquie à l'Ukraine. « Alors qu'on poursuit nos efforts pour une solution, nous avons été et continuons d'être du côté de nos amis ukrainiens », a affirmé Erdogan avant d'ajouter qu'il ne veut pas d'un « nouveau Tchernobyl »Le président Zelensky a estimé jeudi que la visite à Lviv de son homologue turc Recep Tayyip Erdogan était un « message puissant de soutien » pour son pays.

Il a exclu toute négociation de paix avec Moscou sans le retrait préalable des troupes russes du territoire de l'Ukraine. « Des gens qui tuent, violent, frappent nos villes civiles avec des missiles de croisière chaque jour ne peuvent pas vouloir la paix. Ils devraient d'abord quitter notre territoire, ensuite on verra », a déclaré M. Zelensky lors d'une conférence de presse à Lviv, disant « ne pas faire confiance à la Russie ».

Pendant ce temps, les combats se poursuivent par ailleurs dans la région de Kharkiv (nord-est), où les Ukrainiens ont accusé les Russes d'avoir bombardé des quartiers d'habitation, y faisant six morts jeudi, après 13 la veille au soir, et des dizaines de blessés au total.

Enfin, deux villages russes ont été évacués jeudi à cause d'un incendie qui s'est déclaré dans un dépôt de munitions situé près de la frontière avec l'Ukraine, ont annoncé les autorités locales.

(Avec AFP et Reuters)

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