Les Brésiliens ne veulent plus de Dilma Rousseff

Par latribune.fr  |   |  912  mots
Dilma Rousseff très fragilisée au Brésil par le vaste scandale de corruptions de Petrobras
Dilma Rousseff est très fragilisée au Brésil par le vaste scandale de corruptions de Petrobras. Près des deux tiers des Brésiliens sont favorables à une procédure de sa destitution. De nouvelles manifestations monstres sont prévues ce dimanche dans tout le pays. Le contrat Gripen fait l'objet de soupçons de corruptions.

Près des deux tiers des Brésiliens sont favorables à une procédure de destitution de la présidente Dilma Rousseff cinq mois après sa difficile réélection en raison de l'affaire Petrobras, un vaste scandale de corruption, d'après un sondage publié samedi. Selon l'enquête réalisée par l'institut Datafolha, 63% des personnes interrogées sont de cet avis, mais 64% doutent que la procédure puisse mettre fin à son second mandat, entamé en janvier. L'opposition n'est pas favorable à une procédure de destitution, mais encourage les manifestations comme celle qui est prévue ce dimanche.

Plusieurs dizaines de responsables politiques brésiliens soupçonnés d'avoir bénéficié des largesses de Petrobras font l'objet d'une enquête de la Cour suprême, mais Dilma Rousseff, qui fut présidente du groupe, ne figure pas sur la liste. Ces affaires de corruption ont rendu le gouvernement impopulaire, a reconnu début avril le ministre de la Justice, José Eduardo Cardozo, mais aucune institution n'est imperméable à ce fléau et presque tous les partis politiques brésiliens font l'objet d'enquêtes, a-t-il rappelé. La présidente Dilma Rousseff a vu sa popularité s'effondrer à 13%.

Nouvelles manifestations contre Rousseff

De nouvelles manifestations sont prévues dimanche contre Dilma Rousseff dans la tourmente. Les organisateurs espèrent à nouveau faire défiler plus d'un million de personnes dans 400 villes du pays comme le mois dernier. Le 15 mars, une précédente mobilisation avait déjà réuni jusqu'à 1,7 million de manifestants, selon certaines sources, pour exiger la fin de l'impunité dans les affaires de corruption, certains demandant même la destitution de la présidente, voire le retour de l'armée au pouvoir.

Le Mouvement Brésil libre (MBL), l'un des organisateurs de la journée, lui reproche également d'avoir pris le contre-pied de ses promesses électorales en augmentant les prix de "l'électricité, de l'essence, d'avoir réduit les droits des travailleurs", a expliqué à l'AFP par téléphone l'un de ses dirigeants, le politologue Fabio Ostermann. Par ailleurs, le président du Parti social-démocrate (PSDB) Aecio Neves, perdant de la présidentielle d'octobre, a réitéré son soutien aux manifestants. Il n'avait pas défilé le 15 mars pour ne pas "politiser" la mobilisation mais réfléchit à manifester ce dimanche, a rapporté la presse locale.

Petrobras, une affaire d'Etat

Treize sénateurs, 22 députés, deux gouverneurs, le trésorier du Parti des travailleurs (PT, gauche) au pouvoir, d'anciens fonctionnaires de la présidence et d'ex-élus sont dans le collimateur de la justice pour leur supposée participation à un vaste système de corruption qui aurait brassé jusqu'à quatre milliards de dollars en une décennie, selon les enquêteurs. Le trésorier du PT, Joao Vaccari, qui clame son innocence, a été formellement accusé de corruption et blanchiment d'argent. Il sera prochainement jugé avec 26 comparses, dans un premier volet de l'affaire.

Outre des hommes politiques, le scandale Petrobras implique des hommes d'affaires, des anciens dirigeants de la compagnie et les principales entreprises de travaux publics du pays, qui acceptaient de verser des pots de vin pour obtenir des contrats, de l'argent ayant notamment servi à financer les partis politiques au pouvoir, selon l'enquête.

Petrobras, des dépréciations colossales

Le groupe pétrolier public brésilien Petrobras estime entre cinq et six milliards de réals (1,5 à 1,8 milliard d'euros) les pertes liées à un vaste système de corruption impliquant certaines de ses cadres, a estimé vendredi le quotidien "Folha" de São Paulo, qui cite des sources ayant eu accès aux contrats mis en cause. Cette estimation, "prudente" selon des sources, se fonde sur un taux de surfacturation de 3% pratiqué sur de nombreux contrats, a précisé le quotidien. L'enquête de la police et de la justice brésilienne porte sur les surfacturations présumées réalisées sur de nombreux contrats, qui auraient servi entre autres à financer des activités politiques.

En janvier, le groupe a publié des comptes trimestriels non-audités dans lesquels il estimait ses dépréciations potentielles à 61,4 milliards de réals, un montant qui regroupait différents facteurs, comme la chute des cours du pétrole, des retards ou des dépassements de coûts et la corruption. De son côté, Morgan Stanley, dans une étude publiée cette semaine, chiffre à 29,4 milliards de réals les dépréciations liées au scandale de corruption. Soit cinq fois plus que l'estimation de "Folha". Petrobras n'a toujours pas publié ses comptes définitifs des troisième et quatrième trimestres 2014.

Une enquête sur la vente des avions de combat Gripen

La justice brésilienne a annoncé vendredi enquêter sur des soupçons de corruption entourant l'achat par le Brésil de 36 avions de chasse Gripen au suédois Saab pour 5,4 milliards de dollars. L'enquête porte sur de "possibles irrégularités" autour du contrat, signé l'an dernier, a déclaré une porte-parole du parquet fédéral de Brasilia. La justice s'interroge notamment sur une différence de 900 millions de dollars entre le prix initialement proposé par Saab en 2009 et le prix de la transaction conclue en octobre dernier, a-t-elle précisé, confirmant une information parue dans la presse brésilienne.

L'armée de l'air brésilienne avait préféré le Gripen au F-18 Super Hornet de Boeing et au Rafale de Dassault Aviation . Saab a prévu de livrer les premiers avions début 2018.