Au Liban, Macron aurait fait circuler une "feuille de route des réformes"

Par Reuters  |   |  815  mots
Emmanuel Macron en visite au Liban le 6 août 2020, deux jours après la double explosion qui a dévasté (le 4 août) le port de Beyrouth et une partie de la capitale, faisant au moins 180 morts et 6.000 blessés. Le président français doit se rendre à nouveau au Liban dans quelques jours, le mardi 1er septembre. (Crédits : Reuters)
Audit de la banque centrale, nomination d'un gouvernement provisoire, élections législatives anticipées... le président Macron aurait fait passer la liste de ses propositions aux milieux politiques libanais. L'Élysée dément. Le président français est cependant attendu le 1er septembre à Beyrouth.

Une feuille de route résumant les souhaits du président Macron pour l'avenir du Liban, que l'Élysée dément avoir distribuée, circulait dans les milieux politiques à Beyrouth mercredi, à une semaine de la visite du président français.

Ce document de deux pages, qui aurait été transmis par l'ambassadeur de France à Beyrouth selon une source politique libanaise -et que Reuters a pu consulter-, évoque notamment un audit de la banque centrale, la nomination d'un gouvernement provisoire en mesure de mettre en œuvre en urgence des réformes et des élections législatives anticipées dans un délai d'un an.

"Aucun document n'a été fourni aux partis libanais", a déclaré une source à l'Élysée.

Lire aussi : Corruption, dévaluation, absence de réformes: les maux qui agitent le Liban depuis près d'un an

Situation économique critique et colère populaire

Alors que l'État libanais est en défaut sur sa dette et que la livre chute depuis des mois, le gouvernement libanais actuel n'est pas parvenu à conclure un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) malgré des mois de discussions, en raison notamment de désaccords sur les réformes et sur l'ampleur des pertes à faire assumer au secteur bancaire.

En poste depuis janvier, le gouvernement a annoncé sa démission peu après l'explosion du port de Beyrouth, le 4 août, qui a fait au moins 180 morts et 6.000 blessés et qui a détruit une partie de la capitale, ravivant la colère populaire contre une élite politique accusée d'être à la fois corrompue et inefficace.

Les recommandations de Le Drian sur RTL ce matin

"Il faut qu'un gouvernement se reconstitue parce qu'il y a urgence, une urgence à la fois humanitaire et sanitaire (...), et une urgence politique, si on veut que ce pays tienne, parce que le risque aujourd'hui, c'est la disparition du Liban", a déclaré Jean-Yves Le Drian sur l'antenne de RTL.

Emmanuel Macron est attendu le 1er septembre à Beyrouth. Selon une source diplomatique, il cherche à convaincre les autorités libanaises de former un gouvernement d'experts à même de réformer et de restaurer la confiance de ses concitoyens comme celle des donateurs, près d'un mois après la double explosion qui a dévasté le port de la capitale et une partie de la ville.

La Banque du Liban prête à un audit par la Banque de France

Mardi 25 août, le site d'information Arab News rapportait que le gouverneur de la banque centrale libanaise, Riad Salamé, a déclaré soutenir la proposition d'Emmanuel Macron de dépêcher à Beyrouth des experts de la Banque de France pour auditer la Banque du Liban.

Le président français avait fait cette proposition lors de sa visite éclair au Liban au début du mois (le 6 août) après la double explosion au port de Beyrouth, disant vouloir ainsi favoriser les progrès dans les discussions entre les autorités libanaises et le Fonds monétaire international (FMI).

"Nous l'accueillons favorablement", a assuré Riad Salamé à Arab News, un site détenu par des capitaux saoudiens.

"La décision relève de la Banque de France, mais nous sommes prêts à accueillir ces experts quand ils le souhaitent."

Le gouverneur de la Banque du Liban a également déclaré que la banque centrale ne pouvait pas puiser dans ses réserves obligatoires pour financer les importations au-delà d'un certain seuil.

Renchérissement des importations et risque de pénuries

Reuters a appris la semaine dernière de source officielle que la Banque du Liban ne pourrait financer les subventions sur les prix des carburants, du blé et des médicaments que pendant trois mois, faute de réserves de change suffisantes.

En juillet, d'autres sources avaient estimé ces réserves à 18 milliards de dollars.

La catastrophe du 4 août au port de Beyrouth, qui a fait au moins 180 morts et détruit une partie de la capitale, a accentué la crise financière qui a éclaté l'an dernier et a fait chuter la valeur de la livre libanaise, renchérissant des importations dont l'économie est très dépendante.

Le taux de change officiel de 1.507,5 livres pour un dollar américaine reste toutefois en vigueur afin d'empêcher une envolée des prix des produits de première nécessité. Les banques commerciales ont parallèlement gelé les avoirs en dollars de leurs clients et empêchent depuis fin 2019 les transferts à l'étranger pour éviter une fuite des capitaux.

"La Banque du Liban fait de son mieux, mais elle ne peut pas utiliser les réserves obligatoires des banques pour financer le commerce", a dit Riad Salamé à Arab News. Une fois que nous atteignons le seuil de ces réserves, nous sommes obligés de ne plus financer. Mais nous sommes en passe de créer d'autres moyens de financement."