Poutine met en alerte la "force de dissuasion" nucléaire russe : une escalade "inacceptable" et "irresponsable" pour Washington et l'OTAN

Par latribune.fr  |   |  1207  mots
Vladimir Poutine (Crédits : Reuters)
Vladimir Poutine a ordonné la mise en alerte des « forces de dissuasion » russes, qui comprennent un volet nucléaire. Une escalade "inacceptable" et "irresponsable" pour les Etats-Unis et l'OTAN.

L'annonce de Vladimir Poutine fait froid dans le dos. Ce dimanche, au quatrième jour de l'offensive militaire massive lancée par Moscou contre l'Ukraine, le chef du Kremlin a ordonné la mise en alerte des « forces de dissuasion » russes, qui comprennent un volet nucléaire. Les forces de dissuasion russes sont un ensemble d'unités dont le but est de décourager une attaque contre la Russie, "y compris en cas de guerre impliquant l'utilisation d'armes nucléaires", selon le ministère de la Défense russe. Une mesure justifiée aux yeux du président russe par les déclarations agressives de grands pays membres de l'Otan et par les sanctions financières sévères que les Occidentaux ont décidé d'imposer à la Russie.

"Comme vous pouvez le voir, non seulement les pays occidentaux prennent des mesures inamicales contre notre pays dans le domaine économique - je veux parler des sanctions illégales que tout le monde connaît très bien -, mais de hauts responsables de grands pays de l'Otan se permettent de formuler des déclarations agressives concernant notre pays", a déclaré le chef du Kremlin.

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Une escalade "inacceptable" pour Washington

Accusant Vladimir Poutine de "fabriquer des menaces qui n'existent pas", les Etats-Unis ont dénoncé une escalade "inacceptable" par Moscou.

Vladimir Poutine "fabrique des menaces qui n'existent pas", a dénoncé dimanche la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki, interrogée sur la question sur ABC. "Il s'agit d'un schéma répété que nous avons observé de la part du président Poutine durant ce conflit, qui est de fabriquer des menaces qui n'existent pas afin de justifier la poursuite d'une agression. "A aucun moment la Russie n'a été menacée par l'Otan ou l'Ukraine (...) Nous allons résister à cela. Nous avons la capacité de nous défendre", a-t-elle ajouté.

Cette annonce de Moscou "signifie que le président Poutine continue l'escalade dans cette guerre, d'une manière qui est totalement inacceptable", a, de son côté, déclaré sur CBS l'ambassadrice américaine à l'ONU, Linda Thomas-Greenfield. "Nous devons continuer à dénoncer ses actions de la façon la plus sévère qu'il soit", a-t-elle ajouté.

'Conduite irresponsable" pour l'OTAN

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a également dénoncé la conduite "irresponsable" de Moscou. "C'est une rhétorique dangereuse. C'est une conduite qui est irresponsable", a déclaré Jens Stoltenberg sur la chaîne CNN.

Selon le secrétaire général de l'organisation, la nouvelle déclaration de Vladimir Poutine vient s'ajouter au discours "très agressif" venant de la Russie "depuis plusieurs mois et particulièrement ces deux dernières semaines".

"Ils ne menacent pas simplement l'Ukraine, mais également les pays alliés de l'Otan, et demandent à ce que nous retirions toutes nos forces armées du flanc est de l'alliance", a-t-il ajouté. Dans une interview diffusée dimanche sur la BBC, Jens Stoltenberg a également appelé les Etats membres de l'Otan à "faire front commun" face à "rhétorique menaçante" de Moscou.

"Notre message est très clair: les pays de l'Otan se défendent et se protègent les uns les autres. L'Otan ne veut pas de guerre avec la Russie, nous ne cherchons pas la confrontation. Nous sommes une alliance défensive, mais qu'il n'y ait pas de malentendu ou de mauvais calcul sur notre capacité à défendre les alliés" face à d'éventuelles offensives russes, a-t-il insisté.

Et d'ajouter : "C'est la Russie qui a engagé la guerre, qui mène une invasion militaire à grande échelle d'une nation souveraine et pacifique, donc il n'y a aucun doute que la Russie est responsable. Le président Poutine est responsable de ce conflit", a insisté Jens Stoltenberg.

"Ce que nous faisons, c'est simplement d'aider l'Ukraine, de l'aider à faire respecter son droit à la légitime défense", a-t-il fait valoir.

Pourparlers russo-ukrainiens

Parallèlement, la présidence ukrainienne a annoncé la tenue, sans conditions préalables, de pourparlers russo-ukrainiens à la frontière entre Ukraine et Biélorussie, après avoir refusé en début de journée des négociations sur le territoire de la Biélorussie, alliée de Moscou. Israël a également proposé sa médiation pour tenter d'obtenir un arrêt des hostilités.

A Bruxelles, les ministres européens de l'Intérieur et de la Justice se sont réunis pour organiser et coordonner l'accueil des réfugiés, qui sont déjà près de 370.000 selon le HCR (Agence des Nations pour les réfugiés). Les chefs de la diplomatie de l'UE se retrouveront quant à eux à 18h00 pour arrêter de nouvelles sanctions contre Moscou.

Parmi les mesures envisagées figure la fermeture de l'espace aérien de l'Union européenne aux avions et compagnies aériennes russes, que de nombreux pays européens, dont l'Allemagne, la France et l'Italie, ont déjà anticipée.

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Les Etats-Unis, la Commission européenne, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni et le Canada ont annoncé samedi soir dans un communiqué commun de nouvelles sanctions financières potentiellement très handicapantes pour l'économie russe, visant à exclure plusieurs banques russes du réseau international de paiement Swift et à priver la banque centrale russe d'une partie de ses importantes réserves internationales de devises. Le Japon a dit s'associer à ces mesures.

Sur le terrain, l'armée russe a effectué dimanche matin une percée à Kharkiv, dans le nord-est du pays, mais le gouverneur régional a assuré que les forces ukrainiennes avaient totalement repris le contrôle de la deuxième ville d'Ukraine.

A Kiev, toujours aux mains du gouvernement ukrainien, un couvre-feu était en vigueur jusqu'à lundi matin. Les forces ukrainiennes y ont repoussé des attaques russes après une "nuit dure", selon le président Zelenski.

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WASHINGTON ENVOIE 54 MILLIONS DE DOLLARS D'AIDE HUMANITAIRE

Les Etats-Unis vont envoyer 54 millions de dollars d'aide humanitaire supplémentaire à l'Ukraine, a annoncé dimanche le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, au quatrième jour de l'invasion russe.  Washington est l'un des plus importants donateurs d'aide d'humanitaire à l'Ukraine, avec "près de 405 millions de dollars aux communautés vulnérables depuis que la Russie a envahi l'Ukraine il y a 8 ans", selon Antony Blinken, faisant référence à l'annexion de la Crimée par Moscou en 2014. "Cette dernière tranche en date d'aide humanitaire va circuler à travers des organisations humanitaires indépendantes qui délivreront une aide basée sur les besoins avec impartialité, humanité, neutralité et indépendance", a affirmé le secrétaire d'Etat, comprenant "nourriture, eau potable, refuge, soins d'urgence, lutte contre le froid, et protection". Le chef de la diplomatie américaine a également salué "l'hospitalité des pays voisins" dans l'accueil des Ukrainiens fuyant le conflit, et appelé la communauté internationale, "comme pour toute situation de réfugiés", à "répondre aux besoins de ceux cherchant protection, d'une manière conforme au principe de non-refoulement et à nos obligations partagées sous le droit international".

(Avec AFP et Reuters)