Russie : un aller simple à plus de 5.000 dollars au départ de Moscou suite à l'ordre de mobilisation des réservistes

Par latribune.fr  |   |  983  mots
L'aéroport de Moscou en Russie. (Crédits : MAXIM SHEMETOV)
En Russie, suite à l'ordre de mobilisation partielle annoncé par Vladimir Poutine pour venir grossir les rangs des troupes positionnées en Ukraine, certains citoyens cherchent à quitter le pays, de « peur de ne pouvoir le quitter plus tard ». Aussi, après les réfugiés ukrainiens, l'Union européenne va tenter de se coordonner sur la question délicate de ces réfugiés russes dont l'afflux s'est accéléré. Depuis le début du conflit, la Russie aurait déjà perdu un demi-million de ressortissants.

Sur les 146 millions d'habitants que compte la Fédération de Russie, combien sont-ils à préparer leur exil ? A en croire les postes frontières limitrophes, l'ordre de mobilisation de 300.000 réservistes annoncé par Vladimir Poutine mercredi ne fait qu'accélérer l'hémorragie de Russes souhaitant quitter leur pays depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février. Sur Internet, les demandes de vols au départ de la Russie, en aller simple, ont explosé. Quand elles ne sont pas devenues indisponibles à la réservation en raison de l'affluence.

Depuis que l'Union européenne et les pays s'opposant à la guerre en Ukraine ont fermé leur espace aérien aux vols de Russie, les temps de trajets se sont aussi considérablement allongés. Pour rejoindre Paris, un ressortissant russe doit par exemple faire une escale en Algérie, pour un voyage de 23 heures. Le pays escale depuis le début de la crise est surtout la Turquie, d'où les Russes peuvent tenter de rejoindre d'autres destinations.

Une source au sein du secteur du tourisme russe a déclaré à Reuters que de nombreuses personnes cherchaient « désespérément » à trouver des billets d'avion pour quitter le pays.

« Il s'agit d'achats panique de la part de personnes qui ont peur de ne pas pouvoir quitter le pays plus tard - les gens achètent des billets sans se soucier de leur destination », a déclaré la source.

Résultat, les prix des billets d'avion au départ de Moscou ont dépassé les 5.000 dollars (5.070,48 d'euros) pour un aller simple vers les destinations les plus proches, la majorité des billets sont vendus pour les jours à venir, a noté l'agence Reuters.

Géorgie, Finlande, Serbie, Arménie...

Pour les citoyens qui ne pourraient se payer ces vols, il reste la voie terrestre. La Finlande a fait savoir que les passages à sa frontière avec la Russie étaient en nette augmentation. « Le nombre a clairement augmenté », passant à 4.824 mercredi contre 3.133 personnes une semaine auparavant, a dit à Reuters Matti Pitkaniitty, responsable des affaires internationales pour les garde-frontières, ajoutant que la situation était sous contrôle.

Le nombre de personnes ayant franchi la frontière mercredi était toutefois inférieur à celui observé durant le week-end, a-t-il précisé.

Des groupes sur les réseaux sociaux donnent des conseils sur la façon de quitter la Russie, tandis qu'un site en russe a publié une liste d'endroits où trouver refuge.

De longues files d'attente se sont formées aux postes-frontières avec la Géorgie. Des Russes ont également gagné la Serbie.

Aux arrivées de l'aéroport de Erevan en Arménie, des Russes admettent avoir fui la mobilisation. Dmitri, 45 ans et un petit sac seulement à la main, dit avoir laissé femme et enfants au pays. « Je ne veux pas mourir dans cette guerre insensée. C'est une guerre fratricide », a-t-il confié, préservant son anonymat.

Dans la partie Nord de la Norvège, le nombre de passages frontaliers n'a pas évolué, a déclaré Soelve Solheim, chef de section pour le contrôle opérationnel de l'immigration, à Reuters.

A travers la Russie, l'annonce de la mobilisation a déclenché des manifestations improvisées et au moins 1.332 personnes ont été arrêtées mercredi.

Accueillir les réfugiés russes

Face à cet afflux, l'Europe doit se coordonner pour accueillir les réfugiés russes, après avoir géré la crise des réfugiés ukrainiens. Au total, un demi-million de personnes sont parties depuis l'invasion de l'Ukraine en février, a noté le porte-parole de la Commission européenne, Peter Stano.

« En tant qu'Union européenne, en principe, nous sommes solidaires des citoyens russes qui ont le courage et la bravoure de montrer leur opposition à ce que fait le régime, surtout quand il s'agit de cette guerre illégale en Ukraine », a-t-il ajouté.

L'Union européenne devra toutefois s'accorder sur une position commune s'agissant des demandes d'entrée des citoyens russes qui fuient leur pays en raison du conflit en Ukraine, a déclaré jeudi la Commission.

Lorsqu'il s'agit de demandes d'entrée aux frontières de l'UE, cela « doit être effectué conformément au droit de l'UE », a dit un autre porte-parole.

La Commission européenne a toutefois précisé que les États membres pourront examiner les demandes au cas par cas, en tenant compte des droits fondamentaux et de la législation relative à la procédure d'asile.

Echapper à la mobilisation

Pour ceux qui seront mobilisables et resteront en Russie, certaines exemptions sont attendues. Une partie du personnel du secteur bancaire russe jugée d'importance critique pourrait ainsi échapper à l'ordre militaire, a déclaré jeudi le directeur général de la banque russe, VTB VTBR.MM.

« Pour les banques et les entreprises du secteur financier, un certain nombre d'employés (...) seront identifiés et ne seront pas appelés », a déclaré le directeur de VTB, Andreï Kostine.

La Russie poursuit les annexions et les menaces

Dans le même temps, les territoires d'Ukraine sous contrôle russe et Moscou ont affirmé jeudi que les votes d'annexion par la Russie prévus à partir de vendredi auraient bien lieu malgré le tollé international qu'ils suscitent.

La Russie, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, devrait défendre au Conseil de sécurité de l'ONU son projet d'annexion et son invasion de l'Ukraine.

L'ex-président russe et numéro deux du Conseil de sécurité du pays, Dmitri Medvedev, a lui affirmé sur Telegram que les régions séparatistes de Lougansk et Donetsk (est), qui forment le bassin du Donbass, ainsi que Kherson et Zaporijjia (sud), « intègreront la Russie ».

Il a ajouté que son pays est prêt à une frappe nucléaire sur l'Occident si nécessaire: les missiles « hypersoniques russes sont capables d'atteindre leurs buts en Europe et aux Etats-Unis bien plus vite » que les armes occidentales.

(Avec Reuters et AFP)