Sanctions contre la Russie : Viktor Orban accuse encore Bruxelles d'affaiblir la Hongrie

Par latribune.fr  |   |  769  mots
Depuis le début du conflit en Ukraine, la Hongrie, fortement dépendante des importations d'hydrocarbures russes, prend soin d'entretenir de bonnes relations avec le Kremlin pour continuer à recevoir gaz et pétrole. (Crédits : BERNADETT SZABO)
Lors d'un discours commémorant le soulèvement de la Hongrie contre l'URSS en 1956, le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, a accusé dimanche Bruxelles d'affaiblir la Hongrie avec ses sanctions contre la Russie. Parallèlement, le dirigeant est confronté à des manifestations pour réclamer des hausses de salaires, alors que l'inflation a atteint 20% en septembre.

A l'occasion de la fête nationale commémorant le soulèvement de la Hongrie contre l'URSS en 1956, Viktor Orban s'en est encore pris à l'Union Européenne dimanche. « Ne nous préoccupons pas de ceux qui tirent sur la Hongrie cachés dans l'ombre, quelque part depuis les miradors de Bruxelles », a lancé le dirigeant. « Ils finiront là où leurs prédécesseurs ont fini », a-t-il ajouté, prédisant à l'Union européenne un sort similaire à celui du bloc soviétique qui s'est effondré entre 1989 et 1991.

« Guerre à nos portes, crise financière et ralentissement économique dans l'UE, invasion migratoire au sud (...), nous devons faire face » à de multiples problèmesa déclaré le Premier ministre hongrois, assurant que « son gouvernement fort et uni » surmontera ces épreuves.

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 Ce discours fait écho au lancement, mi-octobre, par le gouvernement hongrois d'une « consultation nationale » sur les sanctions européennes contre Moscou, que Viktor Orban ne cesse de fustiger, même s'il les a votées aux côtés de ses partenaires. « Les sanctions de Bruxelles nous ruinent », peut-on lire sur des posters flanqués d'une photo d'un missile et affichés sur les murs de la capitale et dans le reste du pays.

Depuis le début du conflit en Ukraine, la Hongrie, qui est fortement dépendante des importations d'hydrocarbures russes, a pris soin de préserver de bonnes relations avec le Kremlin pour continuer à recevoir gaz et pétrole. Elle a parallèlement refusé d'apporter une aide militaire à Kiev, tout en fustigeant la stratégie de Bruxelles.

Mouvement de contestation

Viktor Orban prononçait son discours de dimanche devant ses partisans réunis dans la ville de Zalaegerszeg (ouest), à 230 km de la capitale, Budapest, où des milliers de personnes ont manifesté pour protester contre sa politique. Le dirigeant nationaliste affronte chez lui un fort mouvement de contestation des professeurs et étudiants, réclamant des hausses de salaires face à la flambée de l'inflation. Les revendications portent essentiellement sur les conditions de travail dans l'éducation, secteur négligé ces dernières années selon les syndicats. Les manifestants ont promis de nouvelles actions dans les semaines à venir.

« Pas d'enseignants, pas d'avenir », « Orban dégage », pouvait-on entendre au nombre des slogans, alors que les enseignants, dont les traitements sont faibles, s'estiment abandonnés par l'exécutif. « On n'arrive plus à économiser, on n'arrive tout simplement plus à joindre les deux bouts alors que les prix s'envolent », témoigne Gyongyi Bereczky, un employé des Postes.

Forte inflation

Le pays fait face à une inflation féroce qui a atteint 20% en septembre. Le plan énergie décidé par le gouvernement hongrois face à la crise énergétique européenne pèse lourdement sur les finances publiques. « Nous préserverons la stabilité économique, il y aura un emploi pour chacun, nous défendons le principe d'un bouclier tarifaire sur les factures d'énergie, les familles ne seront pas livrées à elles-mêmes », a promis le dirigeant.

L'exécutif communautaire a déclenché en avril à l'encontre de la Hongrie une procédure jamais utilisée jusque-là, qui peut conduire à suspendre des financements européens, qui représentent 7,5 milliards d'euros. Bruxelles pointe notamment des « irrégularités » et « carences » dans les procédures de passation de marchés publics, la proportion « anormalement » élevée de candidatures uniques pour ces contrats, le manque de contrôle des conflits d'intérêt et de poursuites judiciaires en cas de soupçons de fraude.

Face à cela, la Hongrie de Viktor Orban a pris une série de 17 mesures pour répondre aux inquiétudes de Bruxelles. Elle prévoit notamment la création d'une « autorité indépendante » pour mieux contrôler l'utilisation des fonds de l'UE, la possibilité pour les citoyens de porter plainte devant les tribunaux s'ils estiment que le parquet a arbitrairement mis fin à une enquête pour corruption, un renforcement de la transparence du processus législatif. Les étapes clés de la mise en œuvre de « bon nombre » de ces mesures doivent être engagées d'ici le 19 novembre. En adoptant ces réformes, le gouvernement hongrois espère échapper au couperet, et convaincre aussi Bruxelles de débloquer son plan de relance post-Covid (5,8 milliards d'euros de subventions).

Des fonds dont le pays, en proie à une inflation galopante et un forint en chute libre, a plus que jamais besoin. La Hongrie est en effet le seul pays de l'UE dont le plan n'a toujours pas reçu le feu vert de la Commission européenne, pour les mêmes raisons liées au respect de l'Etat de droit.

(Avec AFP)