Remaniement : un gouvernement Attal resserré et droitisé

Par latribune.fr  |   |  1501  mots
Gabriel Attal a renouvelé l'engagement à baisser les impôts pour les classes moyennes. (Crédits : POOL)
Emmanuel Macron et Gabriel Attal ont dévoilé jeudi un gouvernement resserré et largement droitisé marqué par le maintien de plusieurs poids lourds et l'irruption inattendue de l'ancienne ministre sarkozyste à la Culture.

Emmanuel Macron et Gabriel Attal ont dévoilé jeudi un gouvernement resserré et largement droitisé marqué par le maintien de plusieurs poids lourds et l'irruption inattendue de l'ex-ministre sarkozyste à la Culture.

« Moi, ce que je veux, c'est de l'action, de l'action, de l'action » et « des résultats, des résultats, des résultats », a martelé le nouveau Premier ministre sur TF1 juste après l'annonce d'une première liste de quatorze membres du gouvernement, à laquelle d'autres ministres délégués et secrétaires d'Etat doivent être ajoutés en fin de semaine prochaine au plus tôt.

Gabriel Attal a renouvelé l'engagement à baisser les impôts pour les classes moyennes.

« Le président s'est engagé (à baisser les impôts de deux milliards d'euros, Ndlr) et évidemment, on sera au rendez-vous de son engagement » car les « Français attendent qu'on agisse pour eux », a-t-il affirmé. Gabriel Attal, en quête d'économies substantielles pour réduire le déficit et la dette, a néanmoins refusé de préciser le calendrier, alors que le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, avait évoqué l'inscription de cette baisse « si possible dès le budget 2025 ».

Lire aussiRemaniement : l'inépuisable Bruno Le Maire renforcé à Bercy

La plupart des ministres clés reconduits

La plupart des ministres-clés sont reconduits, de Bruno Le Maire donc à l'Economie et aux Finances avec un périmètre élargi à l'Energie (qui bénéficiait dans le gouvernement précédent d'un ministère de pleine exercice conduit par Agnès Pannier-Runacher), à Gérald Darmanin à l'Intérieur, en passant par Sébastien Lecornu aux Armées et Eric Dupond-Moretti à la Justice. Tout comme, côté alliés, Marc Fesneau à l'Agriculture pour le Modem de François Bayrou, et Christophe Béchu à la Transition écologique et à la Cohésion des Territoires pour le parti Horizons d'Edouard Philippe.

Parmi les principales nouveautés figurent aussi Catherine Vautrin, venue de la droite, que le président avait déjà voulu nommer Première ministre en 2022 avant d'y renoncer. Elle hérite d'un vaste portefeuille du Travail, de la Santé et des Solidarités, ce dernier dossier échappant donc à la sortante Aurore Bergé, rétrogradée ministre déléguée à l'Egalité entre les femmes et les hommes.

Catherine Colonna est écartée des Affaires étrangères, qui reviennent à l'eurodéputé et chef du parti présidentiel Renaissance, Stéphane Séjourné. Résultat : tous les postes régaliens sont occupés par des hommes, même si la parité est numériquement respectée.

Amélie Oudéa-Castéra, déjà chargée des Sports et des Jeux olympiques, décroche également l'Education nationale et la Jeunesse. Elle sera chargée à la fois du rendez-vous phare de l'année, les Jeux de Paris prévus l'été prochain, et de l'école, « mère des batailles » selon le duo exécutif du « réarmement » civique prôné par le chef de l'État. Et donc de mettre en oeuvre les vastes chantiers lancés par Gabriel Attal à l'Education.

Secrétaire d'Etat à la Jeunesse depuis juillet, Prisca Thevenot prend du galon en devenant porte-parole du gouvernement à la place d'un ténor, Olivier Véran, qui sort de l'exécutif.

Rachida Dati exclue de LR

L'entourage d'Emmanuel Macron a vanté « le gouvernement le plus resserré de la Ve République », « un Quinze de France qui va agir en packu »,  mais il faudra en juger à l'aune de la liste complète.

Le premier Conseil des ministres du gouvernement Attal est prévu ce vendredi à 11 heures La surprise de taille est donc le retour de Rachida Dati, l'ex-ministre de la Justice de Nicolas Sarkozy. La maire du 7e arrondissement a annoncé elle-même aux élus parisiens sa nomination au ministère de la Culture lors d'une visio-conférence.

Eric Ciotti a immédiatement annoncé son exclusion du parti Les Républicains. « Nous sommes dans l'opposition, nous tirons donc les conséquences de son choix avec regret », a-t-il déclaré.

« Trahison et mise en examen pour corruption, tous les critères étaient remplis pour intégrer un gouvernement qui a mis en exergue la République exemplaire », a dénoncé le patron du PS Olivier Faure.

Rachida Dati est mise en examen depuis juillet 2021 pour « corruption » et « trafic d'influence passif » pour des prestations de conseils conclues avec une filiale de Renault-Nissan. L'élue nie toute irrégularité.

« Mise en examen ce n'est pas une condamnation (...) cela ne signifie pas une culpabilité », a répondu Gabriel Attal. Rachida Dati est "une femme d'engagement, d'énergie, qui toute sa vie s'est battue pour obtenir ce qu'elle voulait obtenir », a-t-il dit, ajoutant avoir « beaucoup de respect pour les combats qu'elle a menés ».

« Sarkozy IV »

Face aux nouvelles nominations, la gauche a ironisé sur le nouveau gouvernement « Sarkozy IV », selon la formule utilisée à l'unisson par la patronne des Ecologistes Marine Tondelier, et le secrétaire national des communistes Fabien Roussel.

Le président de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur Renaud Muselier, lui-même venu de la droite mais devenu macroniste, s'est aussi réjoui en estimant qu'il « y aura bientôt plus de cadres LR au gouvernement qu'au sein de la direction des Républicains ».

L'effet est d'autant plus visible que plusieurs figures venues de la gauche sont écartées, ou en tout cas absentes de cette première salve de ministres.

Outre Olivier Véran, le ministre du Travail Olivier Dussopt quitte le gouvernement après avoir mené l'impopulaire réforme des retraites et participé à la controversée loi sur l'immigration qui a divisé le camp présidentiel. Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique), Rima Abdul-Malak (Culture) et Clément Beaune, ministre délégué sortant aux Transports, ne figurent pas non plus sur cette première liste. Ce dernier avait été l'un des meneurs de la fronde contre la loi immigration votée par l'extrême droite, mais les menaces de démissions de ministres de l'aile gauche avait fortement agacé Emmanuel Macron.

Bénéficiant d'une popularité qui ne se dément pas, avec un taux de 53% de satisfaction, dans un sondage Ifop-Fiducial publié jeudi, Gabriel Attal, plus jeune Premier ministre de l'histoire de la République à 34 ans, doit maintenant commencer à recevoir les partenaires sociaux, ainsi que les organisations d'élus, lors d'une série d'entretiens sur plusieurs jours. Vendredi, il déjeunera avec les chefs des groupes parlementaires du camp présidentiel à l'Assemblée nationale et au Sénat.

Avant une probable déclaration de politique générale au Parlement la semaine prochaine pour dévoiler sa feuille de route.

(AFP)

Pas de ministre du Logement

L'absence de nomination d'un ministre du Logement de plein exercice sous le gouvernement de Gabriel Attal a suscité de nombreuses réactions d'amertume, jeudi soir, alors que ce secteur connaît une grave crise en France.

Comme ses prédécesseurs depuis le premier quinquennat d'Emmanuel Macron, l'actuel ministre du Logement Patrice Vergriete, ancien maire DVG de Dunkerque, est un ministre « délégué », placé sous la tutelle du ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires Christophe Béchu.

Sa reconduction n'a pas été annoncée jeudi soir par le secrétaire général de la présidence, Alexis Kohler.

Interrogé par l'AFP, le ministère du Logement a expliqué qu'il s'agissait d'une première vague de ministres « rattachés au Premier ministre » et qu'une seconde série de ministres délégués serait désignée ultérieurement.

Mais cette absence n'est pas passée inaperçue parmi les acteurs du logement.

« Je déplore l'absence d'un ministre du Logement de plein exercice, doté des moyens nécessaires pour lutter contre la crise dure qui pèse sur nos concitoyens et menace l'emploi », a ainsi tweeté Emmanuelle Cosse, présidente de l'Union sociale pour l'habitat (USH), qui fédère les acteurs du logement social.

« C'est inadmissible alors même que la crise est d'une violence inédite », a-t-elle également réagi auprès de l'AFP.

Même réaction indignée du côté de l'association Ville & Banlieue. « Qu'ils n'annoncent pas de nomination du ministre du Logement alors qu'il y a une crise du logement, ça dépasse l'entendement », a déclaré son président Gilles Leproust (PCF).

Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre, relève de son côté qu'on est « dans la continuité de ce qui se passe depuis 2017 ».

« C'est ce qui s'est passé en juillet et aussi la fois d'avant. Ça confirme que le logement n'est pas un grand sujet pour ce gouvernement, et qu'il ne mérite pas un ministère », a-t-il indiqué à l'AFP.

Côté politique, le député de Seine-Saint-Denis Stéphane Peu (PCF) a tweeté: « Incroyable d'inconséquence !" évoquant "une déconnexion totale avec la réalité ».

« A nouveau, le ministère du Logement passe à la trappe. Ce devrait être la priorité des priorités, et ce remaniement l'oublie », a également tweeté le député.

(AFP)

té écologiste Julien Bayou.