Brexit : l'ultime discours de Theresa May pour conjurer le rejet de l'accord

Par latribune.fr  |   |  820  mots
(Crédits : Reuters)
À la veille du vote décisif du Parlement britannique sur l'accord de Brexit, la Première ministre Theresa May a prévenu que le Royaume-Uni pourrait devoir renoncer à sortir de l'Union européenne (UE) si le texte, ardemment négocié avec Bruxelles, n'est pas adopté.

[article publié le 14.01.19 à 15h49, mis à jour à 18h15 avec le discours de Theresa May devant le Parlement britannique]

Le Brexit est en péril. Dans un ultime discours, la Première ministre britannique Theresa May a exhorté ce lundi les députés de la Chambre des communes à donner une seconde chance à son accord de Brexit, avertissant que le fait de voter contre, mardi, pourrait entraîner à terme une dislocation pure et simple du Royaume-Uni. Un peu plus tôt, elle avait prévenu que le Royaume-Uni pourrait devoir renoncer à sortir de l'Union européenne (UE) si l'accord qu'elle a négocié avec Bruxelles n'était pas adopté par le Parlement de Westminster.

« Je le dis aux élus de tous bords de cette chambre : quoi que vous ayez décidé, je vous prie, au cours des 24 heures qui viennent, de donner une seconde chance à l'accord », a-t-elle dit. « Non, il n'est pas parfait (...) Et oui, il s'agit d'un compromis », a-t-elle continué en invitant les députés à se demander comment le vote qu'ils exprimeront mardi sera jugé dans les manuels d'histoire. « Je dis que nous devons tenir nos engagements envers le peuple britannique et entreprendre de bâtir un avenir meilleur pour notre pays en soutenant l'accord demain. »

Alors que la Première ministre britannique se dit toujours déterminée à voir son pays sortir de l'UE le 29 mars à minuit (23h00 GMT), l'ensemble du processus est en effet suspendu au vote qui se tiendra mardi soir au Parlement, où elle ne semble pas disposer d'une majorité.

À l'unanimité, 40 économistes interrogés par Reuters estiment que les députés vont rejeter l'accord de Brexit - Londres finissant par conclure un accord de libre-échange avec l'UE.

Londres publie une lettre de l'UE contenant des garanties sur l'accord de Brexit

Dans ce contexte électrique, Theresa May a échangé dans la matinée avec le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, et le président du Conseil européen, Donald Tusk, des lettres réaffirmant leurs engagements, dont celui de ne pas avoir à activer la clause de sauvegarde ("backstop") sur la frontière irlandaise, qui cristallise l'opposition de nombre d'élus.

Cette clause vise à éviter le rétablissement d'une frontière physique entre la province britannique d'Irlande du Nord et la République d'Irlande si Londres et Bruxelles ne parviennent pas à s'entendre sur leurs futures relations commerciales avant la fin de la période de transition post-Brexit en décembre 2020.

Les deux rappellent qu'elle ne contraint pas l'Irlande du Nord à s'aligner sur les lois européennes « au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour éviter une frontière physique ». Et pour éviter d'avoir à l'activer, ils se disent prêts à signer l'accord de retrait du Royaume-Uni de l'UE dès que celui-ci aura été entériné par le Parlement britannique et à entamer immédiatement les négociations pour parvenir à un accord commercial avant fin 2020.

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[Crédits : Reuters]

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Dans cette lettre, les dirigeants de l'UE affirment aussi que l'accord de sortie signé avec Londres ne peut pas être modifié. « Comme vous le savez, nous ne sommes pas en position d'accepter quoi que ce soit qui modifie ou est contradictoire avec l'accord de sortie ».

Rejeter ce texte risque de compromettre le Brexit et de saper la démocratie

Un peu plus tôt ce lundi, à l'occasion d'une visite dans une usine chinoise à Stoke-on-Trent, ville résolument pro-Brexit du centre de l'Angleterre, Theresa May s'est félicitée de ces "garanties" apportées par l'UE, tout en reconnaissant qu'elles ne vont "pas assez loin" pour les parlementaires les plus récalcitrants.

En cas de rejet de l'accord par les députés, l'issue la plus probable serait « une paralysie du Parlement qui conduirait à un abandon du Brexit », a mis en garde la Première ministre.

« Certains à Westminster voudraient repousser voire même arrêter le Brexit et ils utiliseront tous les moyens pour y parvenir », a-t-elle déclaré dans son discours. Évoquant l'autre hypothèse, celle d'une sortie de l'UE sans accord ("no deal"), elle a prévenu que cela entraînerait « d'importantes perturbations à court terme » et jugé que le meilleur moyen d'éviter un tel risque était de « voter en faveur de mon accord ».

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A la veille de ce vote crucial, les conservateurs les plus hostiles à l'Union européenne déplorent toujours le maintien de la proximité entre le royaume et le bloc, les travaillistes  ne semblent pas disposés à lui faire le moindre cadeau et les partisans du maintien plaident de plus en plus vivement en faveur d'un arrêt pur et simple de la procédure de retrait.

Cette dernière option a systématiquement été rejetée par la dirigeante britannique qui considère qu'elle mettrait en péril la confiance dans la démocratie. « Nous avons le devoir de mettre en oeuvre le résultat du référendum », a-t-elle répété lundi.

(avec Reuters)