Confiner les non-vaccinés ? Autriche et Allemagne ont dit oui, pourquoi Macron dit non

Par latribune.fr  |   |  1100  mots
Emmanuel Macron a tranché en déclarant que, pour la France, un confinement ne sera pas imposé aux personnes non-vaccinées. (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)
C'est une mesure extrême. Face à la nouvelle flambée de l'épidémie en Europe, l'arsenal de mesures de restrictions remis en vigueur par les pays membres s'est étoffé de dispositifs de coercition jamais vus jusqu'ici en Occident comme ce confinement sélectif, discriminant les seules personnes non-vaccinées afin de lutter contre l'épidémie mais aussi de les pousser à se faire vacciner. Le point sur la situation de l'Allemagne, de la France et de l'Autriche qui est passée du confinement sélectif lundi au confinement total ce vendredi.

Lundi dernier, alors que l'Europe est à nouveau l'épicentre de l'épidémie de Covid-19 (voir graphiques en pied d'article), l'Autriche est devenue le premier pays de l'UE à confiner les personnes non-vaccinées contre le Covid-19.

Le chancelier conservateur Alexander Schallenberg avait alors reconnu qu'il s'agissait bien là d'une privation (« partielle ») de liberté infligée à la population, et que « ce n'est pas de gaieté de coeur que nous (l'avons fait) ». Mais il ne regrettait rien car, se félicitait-il, cette mesure « porte déjà ses fruits ». La preuve ? « L'augmentation massive des inscriptions dans les centres de vaccination », affirme-t-il.

Car si l'Autriche emploie les grand moyens, c'est effectivement pour faire redémarrer le taux de vaccination "honteusement bas" de la population autrichienne (65% à ce jour). Selon le gouvernement, augmenter ce taux de vaccination est le seul moyen de stopper "le cercle vicieux" de la propagation du virus. Selon les statistiques officielles, près de 500.000 personnes ont reçu une dose au cours de la seule semaine dernière, dont 128.813 pour la première fois. Pour faire bonne mesure, l'Autriche avait également débuté, ce lundi-là, la vaccination des enfants à partir de 5 ans.

Confinement sélectif et forte amende à la clé

Dans le détail, cette mesure extrême, en tout cas jamais vue en Europe jusqu'ici, qui consiste à obliger les personnes non pas malades mais seulement non-vaccinées à rester confinées chez elles, concernait depuis lundi 15 novembre, les personnes de plus de 12 ans non immunisées après avoir attrapé le Covid ou non-vaccinées.

Ce confinement sélectif représentait quelque 2 millions de citoyens autrichiens qui n'avaient plus le droit de quitter leur domicile sauf pour faire leurs courses, du sport ou pour des soins médicaux. Sous peine d'encourir 500 euros d'amende en cas de contrôle.

L'Autriche décrète finalement le confinement total et la vaccination obligatoire

Pourtant cela n'a pas suffi et, ce vendredi, l'Autriche annonce qu'elle passe au cran supérieur en termes de coercition, décidant de confiner dès lundi prochain et jusqu'au 13 décembre l'ensemble de sa population, soit 8,9 millions d'habitants.

En outre, elle décide de rendre la vaccination obligatoire à partir du 1er février, devenant ainsi à nouveau le premier pays de l'UE à prendre de telles mesures face à la résurgence des cas de Covid.

Si un nombre croissant de pays impose un certificat de  vaccination pour certaines catégories, comme le personnel de santé, très peu dans le monde imposent la vaccination à toute leur population adulte.

C'est le cas dans deux États autoritaires d'Asie centrale, le Tadjikistan et le Turkménistan, ainsi qu'au Vatican. Territoire français du Pacifique sud disposant d'une large autonomie, la Nouvelle-Calédonie a également décidé d'imposer la vaccination à compter de fin décembre.

En France, le pass sanitaire rend le confinement sélectif inutile, dixit Macron

Dans cette Europe redevenue l'épicentre de la pandémie, avec la réintroduction des restrictions à l'approche de Noël, le débat sur la question de savoir si les vaccins seuls suffisent à combattre le Covid-19 a donc ressurgi.

Face à ce qui s'apparente à un noeud gordien, le président de la République française, Emmanuel Macron a tranché hier jeudi, déclarant dans un entretien au journal La Voix du Nord, que, pour ce qui concerne la France, il ne sera pas imposé de confinement aux personnes non-vaccinées:

"Les pays qui confinent les non-vaccinés sont ceux qui n'ont pas mis en place le pass (sanitaire). Cette mesure n'est donc pas nécessaire en France", a déclaré le président de la République.

Coercition: pas de troisième dose, pas de pass sanitaire

Quant à la troisième dose, Emmanuel Macron a rappelé qu'il attendait toujours les conseils des autorités sanitaires pour savoir si cette troisième injection devait être étendue à toutes les personnes éligibles pour le vaccin sans différenciation, ou rester réservée, comme c'est le cas actuellement, aux plus de 65 ans et aux personnes fragiles, aux soignants et aux proches des personnes immuno-déprimées.

Cette troisième dose est est bien la partie coercitive du dispositif français, car elle n'est pas seulement "proposée" à cette classe d'âge, mais imposée, puisqu'elle conditionne le renouvellement du pass sanitaire, qui sinon sera désactivé à partir du 15 décembre.

"S'il s'avère qu'une troisième dose est efficace et nécessaire pour les autres publics, évidemment, on l'intégrera dans la logique du pass ", a dit le président de la République à La Voix du Nord.

En Allemagne, les non-vaccinés soumis à la règle des "2G"

L'Allemagne a pris également de nouvelles mesures de restriction visant les seuls non-vaccinés. Hier, jeudi, au vu de la situation sanitaire allemande et à la suite de la décision de l'Autriche de lundi, la chancelière sortante Angela Merkel et les chefs de régions ont décidé, à l'issue d'une réunion de crise, d'interdire aux non-vaccinés l'accès à des lieux publics sur l'ensemble du territoire.

La règle dite du "2G", qui autorise seulement les vaccinés ("geimpfte") et les guéris ("genesene") à accéder à des lieux publics comme des restaurants ou salles de concert sera appliquée dès que le seuil d'hospitalisation dépasse 3 malades du Covid pour 100.000 habitants, ce qui est déjà le cas dans 12 des 16 Länder du pays.

Les responsables allemands ont également ouvert la voie à une obligation vaccinale pour les personnels soignants afin d'endiguer l'emballement de la pandémie de Covid-19 dans le pays. Ils ont aussi décidé un retour massif au télétravail partout où cela est possible et une obligation de pass sanitaire dans les transports et sur le lieu de travail.

Mais, ce vendredi, alors que les nouvelles infections ont de nouveau dépassé les 50.000 en 24 heures en Allemagne, il faut s'attendre à un nouveau renforcement des mesures de restrictions, selon Lothar Wieler, le président de l'institut de veille sanitaire Robert Koch, qui s'exprimait lors d'une conférence de presse:

"Dans la situation actuelle, cela ne suffit plus" (..) "Nous devons tirer le frein d'urgence maintenant", a-t-il martelé, plaidant pour une interdiction des grands événements, la fermeture de potentiels foyers d'infection comme des bars ou restaurants mal aérés et la réduction des contacts privés.

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ANNEXES INFOGRAPHIES

5e VAGUE COVID-19 : ÉVOLUTION DES CONTAMINATIONS (Comparaison Autriche / Allemagne / France / Union européenne. Nombre de cas par million. Source: CovidTracker)

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5e VAGUE COVID-19 : ÉVOLUTION DES DÉCÈS (Comparaison Autriche / Allemagne / France / Union européenne. Nombre de décès par millions. Source: CovidTracker)

(avec AFP et Reuters)