Gafa : comment Bruxelles veut s'attaquer à leurs privilèges

Par latribune.fr  |   |  709  mots
"Les entreprises doivent payer leurs impôts là où elles font des profits", a déclaré Pierre Moscovici, le commissaire européen aux Affaires économiques et financières, à la fiscalité et aux douanes.
La Commission européenne compte réformer en profondeur les règles fiscales internationales. Une façon de ne plus permettre aux géants du web (Google, Apple, Facebook, Amazon ou encore Microsoft) de bénéficier d'une fiscalité avantageuse par rapport aux entreprises traditionnelles.

"C'est une question de justice", juge le commissaire européen aux Affaires économiques et financières, à la fiscalité et aux douanes, Pierre Moscovici. Dans un document qui doit être adopté ce jeudi, l'exécutif européen entend mettre fin aux privilèges dont bénéficient les grands groupes Internet, types Gafam (Google, Appel, Facebook, Amazon et Microsoft).  Ces mastodonte paient en effet moins de la moitié du montant des impôts acquittés par les entreprises traditionnelles, selon l'Union européenne. Bruxelles souhaite taxer les "Gafam" sur la base de leur chiffre d'affaires réalisé dans chaque pays, et non plus les bénéfices logés dans des filiales installées dans des Etats à faible fiscalité.

"Les entreprises doivent payer leurs impôts là où elles font des profits. Les entreprises du numérique qui n'ont ni siège, ni boutique et qui réalisent pourtant des profits énormes en Europe  ne doivent pas pouvoir échapper à cette règle ! ", estime dans un communiqué transmis par la Commission européenne, Pierre Moscovici.

Et d'ajouter :

 "C'est une question de justice: les entreprises numériques utilisent des réseaux, des infrastructures européennes, souvent des contenus et des données créés par des Européens. Elles bénéficient du cadre institutionnel  européen pour se développer. Comme tous les contribuables, elles doivent payer leur juste part d'impôts. C'est aussi une perte importante de recettes fiscales pour les budgets des Etats membres."

[Crédits : Statista.]

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"Nous voulons créer des conditions de concurrence équitables"

L'initiative que prend la Commission européenne à ce sujet fait écho à une proposition déjà énoncé l'an dernier, explique le commissaire européen :

 "La Commission a proposé en 2016 d'établir une assiette européenne pour l'impôt sur les sociétés. Son objectif est d'assurer que les profits soient taxés où ils sont générés. C'est la solution que la Commission privilégie: il suffirait d'y définir la présence numérique pour régler durablement la question de la fiscalité du numérique."

L'assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS) représente pour l'UE une "bonne base pour fournir un cadre durable, solide et équitable pour l'imposition de l'ensemble des grandes entreprises à l'avenir". En réalité, cette proposition a déjà été présentée en 2011 et reste, pour l'heure, en cours d'examen. En effet, les Etats membres n'étaient pas parvenus à trouver un accord sur le sujet. Le dispositif ambitionnait de "renforcer le marché unique pour les entreprises".

Ainsi, dans son communiqué, l'exécutif européen ouvre la voie à une proposition législative qui définirait les règles de taxation des bénéfices de l'économie numérique au niveau de l'Union. Ce qu'a confirmé Jean-Claude Juncker, le président de l'UE lors de son discours-programme annuel sur l'Etat de l'Union il y a quelques jours.

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"Nous voulons à présent créer des conditions de concurrence équitables pour que toutes les entreprises opérant dans l'Union puissent se livrer une concurrence loyale, que leurs activités passent par le cloud ou qu'elles soient exercées depuis des locaux physiques", a insisté Pierre Moscovici.

Plusieurs taxes comme remèdes à court terme

La Commission cite également des "remèdes à court terme" tels qu'une taxe ciblée sur le chiffre d'affaire ; une taxe sur les messages publicitaires au niveau de l'Union ; un prélèvement libératoire appliqué aux revenus tirés des activités numériques ; une taxe sur le chiffre d'affaires publicitaire ou les autres services fournis par les géants de l'Internet.

Ces règles pourraient être précisées lors des travaux se déroulant pendant le G20, au printemps prochain. Lors du sommet, un rapport de l'OCDE est également attendu pour apporter des solutions "appropriées et judicieuses en matière d'imposition de l'économie numérique au niveau international", note Bruxelles. Enfin, la Commission entend profiter du sommet numérique de Tallin (le 29 septembre prochain) pour discuter, avec les Etats membres, d'une position commune.

(A. F. avec Reuters)