Interdiction d'Airbnb à Berlin  : la justice ouvre une brèche

Par Mathias Thépot  |   |  521  mots
Berlin applique l'une des législations les plus coercitives au monde contre Airbnb, afin de préserver l'offre de logements pour les Berlinois. (Crédits : Reuters)
Berlin a pris début mai des mesures drastiques contre Airbnb. Mais la justice allemande vient d'ouvrir une brèche en admettant une exception pour les propriétaires qui possèdent un pied à terre dans la capitale allemande.

La justice allemande a ouvert une brèche mardi dans l'interdiction des locations temporaires à Berlin via des plateformes comme Airbnb, admettant une exception pour les propriétaires de pied-à-terre dans la capitale allemande. Très attendue, cette décision du tribunal administratif de Berlin intervient alors que la jurisprudence reste à établir sur ce règlement local entré en vigueur le 1er mai, qui expose chaque contrevenant à une amende de 100.000 euros.

Concrètement, le règlement berlinois interdit en principe toute location de son appartement via des portails spécialisés de type Airbnb à moins de se limiter à la location d'une seule pièce. La capitale allemande prévoit ainsi d'appliquer l'une des législations les plus coercitives au monde contre le géant américain de la location saisonnière, afin de préserver l'offre de logements abordables pour ses habitants.

Pas de détournement d'usage

Mais les magistrats berlinois, qui avaient validé début juin la constitutionnalité du texte, ont cette fois été saisis par trois requérants qui résident principalement à Rostock (nord), au Danemark et en Italie, et possèdent un pied-à-terre à Berlin. Le tribunal leur a accordé une dérogation pour louer à des touristes en leur absence. Dans ce cas précis, "les intérêts privés l'emportent sur l'intérêt public" à conserver cet espace vacant, a expliqué le tribunal, estimant qu'il ne s'agit pas d'un "détournement d'usage" combattu par la loi.

C'est donc une première brèche ouverte dans la politique de la capitale allemande, qui cible en priorité les pratiques qui ont pour conséquence de réduire l'offre de logements pour les berlinois. En effet les prix de l'immobilier ont fortement grimpé ces dernières années à Berlin, et le développement d'Airbnb et d'autres plateformes a conduit à sortir du marché locatif des logements qui sont proposés à la place aux touristes, dopant la hausse des loyers.

Appel au sens civique des habitants

Environ 10.000 appartements auraient ainsi été retirés du marché locatif berlinois à cause de la seule plateforme Airbnb, ce qui aurait quasiment anéanti les efforts de construction en nouveaux logements de la ville en 2015 (12.000). Preuve de la réelle préoccupation des pouvoirs publics allemands face au dérives d'Airbnb, le texte de loi qui s'applique depuis le 1er mai fait même appel au "sens civique" des habitants, invités à se connecter à une page internet de la ville pour dénoncer anonymement tout appartement suspect. Mais des courriers émanant des autorités berlinoises et reçus par certains propriétaires, que l'AFP a pu consulter, montrent qu'elles attendent une décision fixant la jurisprudence pour commencer à sévir.

Au total, à Berlin, environ 24.000 offres seraient mises à la disposition des touristes par des particuliers, dont pas moins de 16.000 offres sur le seul site d'Airbnb. Le succès du site de locations de courte durée tient notamment au fait que ces pratiques sont bien plus rentables pour un loueur que de la location de longue durée, car les touristes sont prêts à mettre le prix pour passer un week-end dans une ville attractive.

(Avec AFP)