A San Francisco, Airbnb face à ses contradictions

La plateforme de locations de courte durée subit de lourdes attaques de la part de la Ville de San Francisco, pourtant connue pour être la terre d'accueil mondiale pour les start-up de l'économie collaborative. La municipalité californienne ne peut plus tolérer les dérives liées au développement exponentiel de ce modèle économique
Mathias Thépot
Airbnb estime que ses services ont permis à 1.200 habitants de San Francisco d'éviter l'exclusion de leur logement.

C'est une mesure hautement symbolique qui a été prise cette semaine par la Ville de San Francisco concernant l'une de ses « start-up » phare : Airbnb. La plateforme internet de locations de courte durée risque désormais, comme ses concurrentes, une amende de 1.000 euros par jour et par logement à San Francisco si elle ne s'assure pas que ses hôtes ne sont pas enregistrés auprès des autorités locales, comme l'exige une législation en vigueur datant de fin 2014. Cette loi détaille aussi un cadre légal aux locations sur ce type de plateforme : les hôtes ne peuvent pas louer plus de 90 jours par an, doivent souscrire une assurance couvrant des dommages, et s'acquitter d'une taxe hôtelière d'occupation de 14 % collectée par Airbnb.

Or depuis l'instauration de ces mesures, seuls 1.400 habitants de San Francisco ont obtenu une autorisation de la Ville pour louer sur Airbnb, alors que près de 10.000 maisons ou appartements seraient loués sur le site. C'est pourquoi le conseil municipal a voté à l'unanimité mardi 7 juin un durcissement de la réglementation par le biais d'amendes pour la plateforme, et qui pourront s'appliquer dans 30 jours.

L'une des législations les plus coercitives

A San Francisco, la ville de naissance de la start-up, il s'applique ainsi à Airbnb et ses concurrents l'une des législations les plus coercitives au monde. Surprenant de la part d'une ville qui s'érige en capitale mondiale de l'innovation. Mais cette lutte acharnée de la municipalité californienne visant à encadrer les pratiques du site est en fait très révélatrice des dérives qui peuvent découler de l'activité d'Airbnb. En participant à la raréfaction de l'offre de logements, loués toute l'année à des touristes dans l'illégalité la plus complète, certaines pratiques sur le site Airbnb entrent en contradiction avec les intérêts de la municipalité. Celle-ci fait en effet face à une forte augmentation des prix de l'immobilier depuis le début du rebond économique, tirés notamment par le boom de la nouvelle économie.

En effet, à San Francisco, l'embourgeoisement bat son plein et les inégalités se creusent. Pour limiter la flambée des prix, la mairie de San Francisco compte donc s'assurer qu'un maximum de logements soit disponible pour ses habitants, et éviter « l'hôtellisation » de son parc immobilier. Il n'y a donc rien de scandaleux à voir une municipalité penser sa politique du logement de manière globale, et encadrer un phénomène exponentiel, celui des locations de courte durée par le biais de plateformes internet, qui participe à la crise du logement.

Airbnb met en avant son utilité sociale...

Vent debout contre les agissements de la Ville de San Francisco, Airbnb a, sans surprise, répliqué. La firme dénonce d'une part les dysfonctionnements du système d'enregistrement de la Ville, mais surtout elle met en avant son utilité sociale.... Airbnb estime en effet que 1.200 habitants de San Francisco ont pu éviter l'exclusion de leur logement grâce aux revenus complémentaires dont ils ont pu bénéficier en louant leur chambre ou leur logement sur le site. La plateforme aurait donc, selon elle, un rôle social fondamental... Un raisonnement spécieux habituel de la part de la firme, qui se considère en façade comme une entreprise collaborative, positive et génératrice de lien social. Or, Airbnb fait partie de cette économie de services à la demande à travers des plateformes d'intermédiation numérique qui cache un idéal principalement mercantile, bien éloigné des notions d'intérêt général induites par le terme « collaboratif ».

Certes il n'est pas contestable que les compléments de revenus générés grâce à Airbnb sont (souvent) salutaires pour des hôtes aux fins de mois difficile à cause du coût trop élevé de leur logement. Mais dans l'absolu, si Airbnb n'est pas le premier responsable de l'inflation immobilière de ces dernières années, en participant à la raréfaction de l'offre de logements, la plateforme ne fait en revanche qu'alimenter le phénomène de hausse des prix. D'un point de vue social, ses services ne sont qu'un pansement à court terme, aux conséquences désastreuses à long terme.

Mathias Thépot
Commentaires 4
à écrit le 10/06/2016 à 22:14
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Encore un article à charge sans la moindre mesure et contre-argumentation. Moi je dis merci à Airbnb pour m'avoir permis de joindre les deux bouts quand je suis tombé au chômage. Sans les locations touristiques, je ne serais plus parisien à l'heure a...

le 11/06/2016 à 3:21
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Vous n'avez pas lu l'article. Airbnb a fait flamber le prix de l'immobilier et réduit le parc locatif, et c'est une réalité. Habitant San Francisco, je trouve que la municipalité a totalement raison.

le 11/06/2016 à 3:21
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Vous n'avez pas lu l'article. Airbnb a fait flamber le prix de l'immobilier et réduit le parc locatif, et c'est une réalité. Habitant San Francisco, je trouve que la municipalité a totalement raison.

le 11/06/2016 à 9:24
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Joindre les deux bouts pour quelqu'un qui possède un appartement à Paris ? Il suffisait de le vendre... Non cet article est pertinent et la tendance est lourde : cette économie n'a rien de collaborative et est destructrice. Ceux qui travaillent pou...

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