Espagne : Rajoy renversé, la revanche de Sanchez "le beau mec"

Par latribune.fr  |   |  887  mots
Pedro Sanchez (PSOE, socialiste) vient de faire chuter le gouvernement de Rajoy (PP, droite) ce vendredi 1er juin 2018, et remercie les 180 députés qui l'ont aidé. (Crédits : Reuters)
Une semaine après la condamnation du PP dans le méga-procès pour corruption du Parti populaire (PP), le Parlement espagnol adopte une motion de censure contre Mariano Rajoy (PP, droite) qui est destitué. Pedro Sanchez (PSOE, socialiste) prend sa place, mais il ne lui sera pas facile de former un gouvernement avec la majorité hétéroclite qui l'a porté au pouvoir.

[ Article publié le vendredi 1er mai à 11:48, mis à jour à 15:10 avec El Pais]

Le socialiste Pedro Sanchez est devenu vendredi le nouveau président du gouvernement espagnol après l'adoption par le Parlement d'une motion de censure contre Mariano Rajoy (Parti populaire, droite), qui était le chef du gouvernement espagnol depuis décembre 2011.

Les députés du Congrès des députés, la chambre basse du Parlement, se sont prononcés par 180 voix pour, 169 voix contre et une abstention.

Le méga-procès de corruption "Gürtel" a coulé le PP de Rajoy

Mariano Rajoy, qui gouvernait depuis six ans jusqu'à la condamnation la semaine dernière de son parti (PP) dans un méga-procès de corruption baptisé Gürtel, a reconnu, avant même le vote, qu'une majorité des députés allait approuver la motion de censure déposée par le Parti socialiste (PSOE) de Pedro Sanchez et porter ce dernier à la tête du gouvernement :

"Nous pouvons présumer que la motion de censure sera adoptée. En conséquence, Pedro Sanchez va être le nouveau président du gouvernement", a-t-il déclaré.

[Cliquez sur l'image pour l'agrandir. Mariano Rajoy, renversé par la motion de censure, quitte le parlement espagnol sous les applaudissements de ses partisans, le 1er juin 2018. Crédit : Sergio Perez / Reuters]

Une page de l'histoire politique espagnole se tourne. Au pouvoir depuis décembre 2011, M. Rajoy, 63 ans, avait survécu à plusieurs crises majeures : de la récession, face à laquelle il a imposé une sévère cure d'austérité, jusqu'aux mois de blocage politique en 2016, en passant par la tentative de sécession de la Catalogne l'an dernier.

Lire aussi : Catalogne : la condamnation d'Artur Mas ou les limites de la stratégie de Madrid

Pedro Sanchez, qui a réussi à convaincre une majorité hétéroclite de renverser Mariano Rajoy, déclarait quant à lui :

"Aujourd'hui (vendredi), nous écrivons une nouvelle page de l'histoire de la démocratie dans notre pays."

La revanche du "beau mec"

A 46 ans, M. Sanchez, ancien professeur d'économie surnommé le "beau mec" en Espagne, semble tenir sa revanche, lui dont l'investiture à la tête du gouvernement avait été rejetée par les députés en mars 2016 avant qu'il ne réalise en juin de la même année le pire score de l'histoire du PSOE aux élections législatives.

Débarqué de sa formation à la suite de cette déroute électorale, il en a repris les rênes l'an dernier grâce au soutien de la base contre les barons du PSOE.

Monté au front contre Rajoy dès l'annonce, jeudi dernier, de la condamnation du PP dans le méga-procès pour corruption "Gürtel", il a tenté cette fois avec succès un coup de poker politique.

Sanchez au risque d'une majorité hétéroclite

Mais il a dû former autour des 84 députés socialistes une majorité hétéroclite allant de Podemos aux indépendantistes catalans et aux nationalistes basques, pesant au total 180 voix sur 350 députés.

"M. Sanchez veut être chef du gouvernement à n'importe quel prix" mais va "rentrer à la Moncloa (siège de la présidence du gouvernement) par la porte de derrière", a raillé Rafael Hernando, patron des députés du Parti Populaire (PP) de M. Rajoy.

[plus d'informations dans quelques minutes]

(Avec Reuters et AFP)

[Cliquez sur l'image pour l'agrandir. Pedro Sanchez le 1er juin 2018 applaudit les 180 députés qui ont permis la réussite de sa motion de censure contre le gouvernement Rajoy. Crédit : Sergio Perez / Reuters]

Catalogne : pas de droit à l'autodétermination, dixit Sanchez

Le site web du quotidien espagnol El Pais publie cet après-midi un article titré "Sánchez, el superviviente inesperado" ("Sanchez, le survivant inattendu") dans lequel il explique le parcours éclair et totalement surprenant d'un homme qui, en un an, reconquiert le parti socialiste espagnol et dans la foulée se retrouve à La Moncloa (L'Elysée espagnol).

Le quotidien précise que, Sanchez, qui sera le premier président de la démocratie à n'être pas en même temps député, a renversé Rajoy grâce au soutien de Podemos et des groupes nationalistes et indépendantistes. La même alliance qui a fait exploser le PSOE, lorsque, après les élections de juin, une partie des dirigeants du parti s'inquiétait de devoir former un gouvernement avec les sécessionnistes.

Volonté de fer

Si bien sûr, analyse El Pais, on peut croire que, désormais, c'est l'arithmétique des influences qui va décider, Sanchez prétend n'avoir rien négocié avec ces groupes politiques, affirmant que leur gouvernement se conformera et fera respecter la Constitution, et qu'il n'admet pas le droit à l'autodétermination pour la Catalogne. Malgré cela, les dirigeants historiques du parti sont préoccupés par les conditions dans lesquelles ils accèdent à la présidence.

Pour le quotidien espagnol, personne ne peut douter de la volonté de fer de Pedro Sánchez. La résistance et la persévérance sont deux des caractéristiques les plus pertinentes de son profil psychologique, qu'il a montrées face à des situations dans lesquelles il avait tout contre lui, explique notamment El Pais.

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