La finance se rêve en 35ème filière d’avenir française

Par Christine Lejoux  |   |  670  mots
Le 2 Opéra, le "concept store" de BNP Paribas, joue un rôle de laboratoire de sa relation-client, pour la banque. BNP PARIBAS.
Certains acteurs de la finance verraient bien leur secteur rejoindre les 34 plans d’actions en faveur des filières industrielles dévoilés par l’Etat en septembre. Au motif que l’industrie financière, elle aussi, est innovante.

C'était le 12 septembre dernier. Le président de la République, François Hollande, et le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, présentaient 34 plans d'actions en faveur des filières industrielles jugées les plus porteuses pour les dix prochaines années. Mais Edouard-François de Lencquesaing, conseiller technique chez Paris Europlace, l'organisation chargée de promouvoir la place financière de Paris, aurait bien vu la finance figurer aux côtés des nano-technologies, des objets connectés et autre TGV du futur.

"J'ai récemment proposé à Fleur Pellerin [la ministre en charge des PME, de l'innovation et de l'économie numérique ; Ndlr] d'ériger la finance en 35ème filière d'avenir",

a glissé Edouard-François de Lencquesaing, jeudi 21 novembre, lors d'une conférence de presse organisée par le pôle de compétitivité Finance Innovation.

 La finance, un secteur moins ouvert à l'innovation que l'industrie

 "Certes, les banques n'ont pas des laboratoires de recherche comme ceux que l'on trouve dans les secteurs industriels", admet Edouard-François de Lencquesaing. Et "il s'agit d'un monde moins ouvert à l'innovation que l'industrie", reconnaît Jean-Luc Strauss, qui a créé en 2009 le club Innovation Banque Finance Assurance au sein de la société de conseil en hautes technologies Altran.

L'objectif de ce club, qui réunit les directeurs de l'innovation de BNP Paribas, de la Société générale, d'Axa et Groupama : "devenir un centre d'échanges sur les méthodes d'innovation dans les services financiers, domaine très en retard par rapport à la recherche et au développement des secteurs industriels."

 L'exacerbation de la concurrence contraint les banques à innover

 Un retard que le secteur financier, et plus particulièrement bancaire, s'efforce à présent de combler. Bien obligé, en raison de la baisse continue de la fréquentation des agences, conséquence du succès des services bancaires en ligne. A quoi s'ajoute la concurrence de Google, d'Amazon ou de PayPal sur le créneau très prometteur du paiement mobile. Sans oublier, bientôt, celle du "crowdfunding", le projet de règlementation du gouvernement en la matière égratignant le sacro-saint monopole bancaire en permettant le prêt entre particuliers.

 L'enjeu est clair pour les banques, il leur faut reconquérir les consommateurs.

"Le problème, c'est que, dans les agences bancaires, la rémunération des conseillers est encore largement basée sur le nombre de produits vendus aux clients, peu importent les besoins de ces derniers",

souligne Jean-Luc Strauss. Qui invite donc les banques à se convertir au "design thinking." Elaboré par l'université de Stanford et utilisé par les start-up pour faire émerger la créativité, ce concept repose sur l'anticipation des besoins des utilisateurs. En d'autres termes, il remet le client, l'humain, au centre de la stratégie de l'entreprise.

 Le changement de culture de La Poste, un bon exemple pour le secteur bancaire

 Un virage que La Poste a très bien négocié en 2005, selon Anne-Marie Boutin, présidente de l'Agence pour la promotion de la création industrielle, lorsqu'une concurrence croissante a contraint l'opérateur postal à repenser sa relation avec ses clients et, en premier lieu, ses bureaux d'accueil.

"Avant, avec des agents réfugiés derrière leurs guichets, on n'avait nullement l'impression que la Poste était au service du public. Aujourd'hui, les agents viennent au devant des clients, c'est un véritable changement de culture",

précise Anne-Marie Boutin.

 Un changement de culture qui s'amorce dans le secteur bancaire, à en juger, par exemple, par le récent "concept store" développé par BNP Paribas, le 2 Opéra, situé sur l'avenue du même nom, à Paris.

Les clients y sont accueillis dans un "lounge" de près de 1.000 mètres carrés imaginé par l'architecte Fabrice Ausset, avec mur végétal, canapés confortables et tablettes tactiles à disposition, où la banque se fait fort de tester les innovations susceptibles d'avoir un impact positif sur la relation entre le client et son conseiller. C'est à cela que ressemblent les laboratoires du secteur financier.