Renforcer l’éducation financière des Français pour lutter contre le surendettement

Par Christine Lejoux  |   |  668  mots
Le baromètre sur la vulnérabilité financière des Français, publié en février par les Banques Populaires (groupe BCPE) et l’école de commerce Audencia, attribue aux personnes interrogées une note de 5,04 seulement sur 10, en matière de connaissances financières basiques. REUTERS.
Chaque année, la Banque de France juge recevables quelque 200.000 dossiers de surendettement. La Société générale et l’association Crésus ont élaboré un programme pilote d’éducation financière à destination des jeunes de 16 à 25 ans.

Les Français et la finance, ça fait deux, a-t-on coutume d'entendre. De fait, le baromètre sur la vulnérabilité financière des Français, publié en février par les Banques Populaires (groupe BCPE) et l'école de commerce Audencia, attribue aux personnes interrogées une note de 5,04 seulement sur 10, en matière de connaissances financières basiques. Par exemple, 42% des sondés ont été incapables de dire de quelle somme ils disposeraient après avoir placé 100 euros pendant un an sur un compte épargne rémunéré au taux de 2%.

 Un manque d'intérêt pour la matière financière qui pourrait prêter à sourire, s'il ne débouchait pas -parfois - sur des conséquences aussi graves que le surendettement. Certes, la crise économique est pour beaucoup dans les quelque 200.000 dossiers de surendettement jugés chaque année recevables par la Banque de France, depuis cinq ans. Mais le manque de maîtrise des notions financières de base joue également dans le maintien du surendettement à un niveau élevé, selon l'association Crésus, qui accompagne les personnes confrontées à des difficultés financières.

 85 sessions de formations pour 1.500 jeunes de 16 à 25 ans

 C'est pour tenter de combler ces lacunes que Crésus et la Société générale ont testé un programme-pilote d'éducation financière auprès de 1.500 jeunes de 16 à 25 ans, d'octobre à décembre 2013, au sein de Centres de formation d'apprentis, dans la région bordelaise, en Ile-de-France, dans le Nord, ou bien encore du côté de Montpellier. "Nous avons choisi de nous adresser aux apprentis car ils se trouvent à un âge charnière, celui où l'on commence à gagner sa vie et à devoir gérer un budget", explique Laurence Tastets, responsable de ce programme d'éducation financière à la Société générale.

 Ces 85 sessions de formation, d'une durée de deux heures, étaient à chaque fois co-animées par un responsable de Crésus et par un collaborateur de la Société générale, sur la base du volontariat. Un binôme qui dispensait un apprentissage d'abord théorique sur les différents moyens de paiement, la gestion du budget d'un ménage, l'emprunt et les vertus de l'épargne. Suivait la pratique, avec une mise en situation via le jeu "Dilemme", sorte de Monopoly conduisant par exemple à la case huissiers les jeunes qui, dans la gestion de leur vrai-faux budget, avaient laissé une place trop importante aux dépenses "plaisir", au détriment de l'épargne, se retrouvant ainsi dans l'impossibilité d'honorer leurs dettes.

 20% des jeunes sont allés voir leur banquier trois mois après la formation

 L'expérience semble avoir porté ses fruits, 20% des jeunes étant allés voir leur banquier dans les trois mois qui ont suivi la session de formation, afin d'étudier avec lui la façon d'optimiser la gestion de leurs finances personnelles. Pour autant, "ce programme d'éducation financière ne s'inscrit pas dans une démarche commerciale, il ne s'agit pas pour nous de vendre des produits", assure Laurence Tastets. "Nous ne sommes pas là pour faire du volume, mais pour être utiles et répondre à une demande", renchérit Cécile Jouenne-Lanne, responsable "Citoyenneté" à la Société générale, pour qui ce programme d'éducation financière s'inscrit dans le cadre de la démarche de mécénat de compétences de la banque.

 Une démarche qui pourrait être reconduite. "Il serait regrettable que nous n'amplifions pas ce programme. L'Education nationale, entre autres, sera à convaincre", estime Jean-Louis Kiehl, président de l'association Crésus. "Nous réfléchissons actuellement à la manière de pérenniser ce programme, et, éventuellement d'exporter le concept à l'étranger", confirme Laurence Tastets. Une initiative qui aurait du sens : "L'Europe fait face à une crise d'analphabétisme financier, avec des millions de citoyens en difficulté pour gérer des concepts basiques comme l'épargne ou la notion d'investissement", dénonce l'Efama (European fund and asset management association), dans un rapport publié en mars.