L'Autriche et le Luxembourg tournent la page du secret bancaire

Par latribune.fr  |   |  597  mots
"Enfin, tous les pays de l'UE seront confrontés aux mêmes règles avec l'échange automatique d'informations et l'impossibilité d'échapper à l'impôt", s'est réjoui le président français François Hollande. (Photo : Reuters)
Vienne et Luxembourg permettent une grande avancée à l'UE en acceptant d'abandonner leur secret bancaire.

C'est un pas décisif dans la lutte contre l'évasion fiscale de l'Union européenne, devenue une priorité internationale. Après six ans de blocage, l'Autriche et le Luxembourg ont enfin accepté d'abandonner leur secret bancaire.

"Le secret bancaire est voué à disparaître", a lancé jeudi le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, à l'issue de la première journée du sommet européen.

Cette étape "indispensable" va "permettre aux États membres de sévir contre la fraude et l'évasion fiscales", a-t-il estimé, en soulignant que "des dispositifs fiscaux efficaces sont essentiels pour le bon fonctionnement des économies de marché et pour la justice sociale".

Les mêmes règles pour tous

"Enfin, tous les pays de l'UE seront confrontés aux mêmes règles avec l'échange automatique d'informations et l'impossibilité d'échapper à l'impôt", s'est réjoui le président français François Hollande.

Cette décision, attendue de longue date, a été saluée par des ONG comme Oxfam, pour qui les États vont pouvoir redistribuer aux plus pauvres les sommes faramineuses liées à la fraude et à l'évasion fiscale. Un fléau qui, rappelons-le, représente un manque à gagner de quelque 1.000 milliards d'euros par an pour l'Europe, selon Herman Van Rompuy.

Trusts et sociétés écrans

Pour rappel, les décisions en matière de fiscalité requièrent l'unanimité des 28. Or Vienne et Luxembourg avaient jusqu'à présent refusé de signer le texte, considérant l'égalité de traitement avec cinq pays non-membres de l'UE (Suisse, Liechtenstein, Monaco, Andorre et Saint-Marin) comme un préalable à leur propre accord.

Ils ont finalement obtenu que la Commission européenne mène des négociations avec les cinq pays tiers. "Si elle échoue à la fin de l'année, elle proposera des mesures qui encourageront vivement les cinq pays à aller dans ce sens", a affirmé Xavier Bettel, le Premier ministre luxembourgeois, tout en excluant de revenir sur la décision prise jeudi.

2013: "Offshoreleaks" et affaire Cahuzac

La Commission tablait initialement sur un accord fin 2013, après une année marquée par les révélations sur les paradis fiscaux ("Offshoreleaks") et des scandales comme l'affaire Cahuzac en France. En décembre, les chefs d'État et de gouvernement avaient demandé que ce sujet soit finalement réglé en mars 2014.

Entre temps, les pays membres du G20, qui représentent quelque 85% de l'économie mondiale, ont approuvé la norme d'échange automatique de données fiscales conçue par l'OCDE, et que plus de 42 pays se sont engagés à appliquer, dont le Luxembourg.

La norme de l'OCDE signée par 42 pays

Cette norme obligera les administrations fiscales des pays qui l'adoptent à livrer toutes les informations à leur disposition sur les actifs financiers détenus chez eux par des personnes ou des entités non-résidentes. Elle doit être mise en œuvre fin 2015.

Elle couvre les dépôts bancaires mais aussi les intérêts et les plus-values et, comme la directive européenne, s'appuie sur le principe du "bénéficiaire ultime et réel", de manière à empêcher en théorie la fraude fiscale via des trusts et autres sociétés-écran.

Pour prolonger leurs efforts, les Européens doivent désormais trouver un "accord politique unanime" sur un autre texte, la directive sur la coopération administrative. Ce texte, qui doit entrer en vigueur en 2015, prévoit l'échange automatique d'informations sur les revenus professionnels, pensions, jetons de présence, revenus de biens immobiliers et certains produits d'assurance-vie. Il devrait être adopté au second semestre.