Banques en ligne : la concurrence s’intensifie en France

Par Christine Lejoux  |   |  809  mots
En France, le marché de la banque en ligne représente 5% environ des stocks de clients des banques, selon Boursorama.
Boursorama Banque vise 750.000 clients en France d'ici à la fin de cette année. Laquelle devrait voir ING Direct franchir la barre du million de clients dans l'Hexagone. Mais d'autres acteurs sortent de l'ombre, bien décidés à tirer parti d'un marché de la banque en ligne où s'ouvre désormais un compte bancaire sur trois.

Objectif (légèrement) dépassé pour Boursorama Banque. La filiale de banque en ligne de la Société générale, qui a présenté ses résultats annuels mardi 10 février, comptait très exactement 609.126 clients en France à la fin 2014, au lieu d'un objectif de 600.000. Un nombre qui représente un bond de 28% par rapport à l'année précédente, et qui conforte Boursorama Banque dans son ambition d'afficher 1,5 million de clients en France en 2020 (après 750.000 cette année). Le million de clients dans l'Hexagone, ING Direct, filiale de la banque néerlandaise ING, prévoit de le dépasser dès le début de l'année 2015, elle qui est le pionnier et le numéro un du marché français de la banque en ligne, avec quelque 920.000 clients.

Mais ces deux poids lourds font désormais face à la montée en puissance de rivaux jusqu'à présent demeurés dans leur ombre. Le 27 janvier, Fortuneo, qui appartient au Crédit Mutuel Arkéa, a annoncé revendiquer 310.000 clients en France et en Belgique [la société ne donne pas de répartition géographique ; Ndlr], un objectif atteint avec un an d'avance. De son côté, BforBank (groupe Crédit Agricole) aurait pour ambition d'afficher quelque 130.000 comptes courants en 2019, d'après le quotidien Les Echos. Quant à Hello Bank !, lancée en 2013, la banque 100% mobile de BNP Paribas a vu le nombre de ses clients en France multiplié par plus de sept en 2014, à 101.000, et entend bien porter ce chiffre à 500.000 en 2017.

Une logique de "banque complète"

Autant de projets qui reposent sur l'élargissement des offres de produits et de services des banques en ligne, "le sujet majeur pour (ces dernières), aujourd'hui, (étant) de devenir la banque principale de leurs clients", avait souligné Antoine Oliveau, associé chez Deloitte, lors d'une conférence de presse, le 18 novembre. "40% de nos clients disent nous utiliser comme banque principale et cela se voit dans le fait qu'ils réalisent en moyenne 17 opérations par mois avec leur carte bancaire, preuve que nous sommes une banque qu'ils utilisent beaucoup", témoigne Marie Cheval, PDG de Boursorama.

Il faut dire qu'il y a beau temps que la filiale de la Société générale se développe de façon à être une banque complète - présente de l'assurance-vie à la prévoyance en passant par les comptes courants et le crédit - et non plus seulement un spécialiste de l'épargne, "terre d'origine" de la plupart des banques en ligne. Ainsi, dès 2011, Boursorama Banque a développé une offre de crédit immobilier, un domaine qu'elle est la seule banque en ligne française à avoir osé investir. Mais plus pour longtemps : Fortuneo et ING Direct ont l'intention de s'aventurer à leur tour dans les prêts immobiliers, tout comme BforBank, qui projetterait de commercialiser une offre dans ce domaine à partir de 2016, selon Les Echos.

Un marché qui représente 5% des stocks de clients des banques

De quoi compliquer la tâche de Boursorama Banque, dont les encours de crédit immobilier ont progressé de 18% en 2014, à 2,7 milliards d'euros, prouvant au passage que même la souscription d'un produit bancaire aussi sophistiqué ne nécessite pas forcément de se déplacer en agence?

"Effectivement, il y a de la concurrence. Pour autant, certains acteurs annoncent depuis des années qu'ils vont se lancer dans le crédit immobilier mais nous ne voyons rien venir. Nous restons donc clairement leader sur ce segment, d'autant plus que faire du crédit immobilier ne s'improvise pas, il y a derrière cela tout un ensemble de processus complexes à maîtriser",

explique Marie Cheval, pour qui l'intensification de la concurrence a par ailleurs pour conséquence de "crédibiliser le marché de la banque en ligne." Un marché qui ne représente encore que 5% environ des stocks de clients des banques en France. Mais, en termes de flux, c'est déjà une autre histoire, un compte sur trois s'ouvrant désormais dans une banque en ligne, d'après Boursorama.

Malgré ce potentiel, "il ne restera qu'un très petit nombre d'acteurs, d'ici quelques années", prévient un banquier français. D'abord parce qu'imposer une marque de banque en ligne nécessite de très lourds investissements en communication. Ensuite parce que les banques en ligne, elles aussi, font face au poids croissant de la réglementation bancaire et des coûts qui s'ensuivent. Et enfin parce que les banques en ligne, revers de la médaille de leurs tarifs imbattables, vivent très peu des commissions bancaires, et essentiellement de la marge d'intérêt. C'est-à-dire de l'écart entre le taux auquel elles prêtent et celui auquel elles se refinancent, un écart écrasé par l'environnement actuel de taux très bas, bien parti pour perdurer plusieurs années.