Tiens, revoilà la crise de la dette...

Par Sophie Rolland  |   |  605  mots
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Après la Grèce, les marchés regardent désormais du côté de l'Espagne. Le pays pourrait avoir du mal à ramener son déficit de 8,5 à 5,3 points de PIB cette année et a eu du mal à placer sa dette mercredi. La montée des tensions n'a toutefois pas empêché la France d'émettre plus de 8 milliards d'euros de dette aujourd'hui.

Les difficultés rencontrées par l'Espagne pour émettre de la dette cette semaine marquent-elles le retour d'une nouvelle phase de turbulence sur les marchés ? Mercredi, Madrid a adjugé pour 2,6 milliards d'euros d'obligations, moins que ce qui était espéré, avec des coûts d'emprunt en hausse par rapport à la dernière opération de ce type. Le verdict des observateurs est sans appel : pour eux, le flot de liquidités déversé par la Banque centrale européenne depuis décembre à l'occasion des spectaculaires opérations de refinancement à long terme (les fameuses LTRO) est en train de s'assécher. Autrement dit, il faut s'attendre à un regain de tension sur les dettes dites "périphériques".

L'inquiétude monte
Déjà, le coût de l'assurance contre le défaut des pays de la zone euro considérés comme les plus risqués est reparti à la hausse. De même que le supplément de rendement demandé par les investisseurs pour détenir la dette de ces pays. Jeudi à la mi journée, les taux à 10 ans de l' Espagne s'inscrivaient à 5,8 % contre 5,674% mercredi alors que parallèlement ceux du Bund, l'obligation allemande de même échéance, reculaient à 1,75 % contre 1,787% la veille. L'écart de rendement entre les obligations d'Etat espagnoles et allemandes à dix ans (spread) a ainsi atteint son plus haut niveau depuis fin novembre, dépassant les 400 points de base (soit 4 points de pourcentage) jeudi. A l'automne 2011, au plus fort de la crise de la dette, ce "spread" (écart de taux) tournait autour des 460-480 points de base (1 point de base =0,01%).

La France place sa dette dans de bonnes conditions
A l'inverse, la France a émis 8,4 milliards d'euros de dette à long terme sans difficulté jeudi. « L'intérêt était plus important sur les emprunts à 5 et 10 ans que sur ceux à 15 et 30 ans », remarque toutefois un opérateur de marché. Rien d'inhabituel pour lui : « depuis six mois, l'appétit pour la dette à très long terme a nettement faibli et depuis les LTRO de la BCE, les intérêts acheteurs se concentrent sur la dette dont l'échéance est comprise entre 2 et 5 ans », explique-t-il. Le taux moyen pondéré sur l'emprunt à 10 ans est ressorti à 2,98 %, contre 2,91 % lors de la dernière adjudication comparable le 1er mars

De quoi relativiser
Ainsi, la fébrilité des investisseurs n'apparaît pas suffisante pour déstabiliser les marchés de dette les plus « liquides », c'est-à-dire les plus facilement négociables, de la zone. En outre, l'Espagne a déjà réalisé 47% de son programme de financement pour l'année. De quoi limiter les dégâts même si les temps deviennent plus durs. Enfin, dernier élément permettant de relativiser les turbulences de marché de ces derniers jours : le calendrier. De nombreux opérateurs sont absents cette semaine (les marchés seront fermés de vendredi à lundi pour le week end pascal) et la faiblesse des volumes favorise les mouvements brusques sur les marchés.

La BCE plus réticente à racheter des emprunts d'Etat
L'Espagne devrait néanmoins rester dans le radar. Nombreux sont ceux qui doutent de la capacité du pays à ramener son déficit de 8,5 à 5,3 points de PIB cette année, compte tenu des perspectives de repli de l'activité. Quant au soutien de la Banque centrale européenne (BCE), il devrait progressivement devenir moins systématique. Jeudi, la BCE a déclaré n'avoir procédé à aucun rachat d'obligations d'Etat de la zone euro cette semaine, comme au cours de six des sept semaines précédentes, et ce, en dépit des inquiétudes persistantes liées aux difficultés budgétaires de l'Espagne.