Taxation des superprofits des banques italiennes : la Bourse fait reculer le gouvernement

Par latribune.fr  |   |  762  mots
Giorgia Meloni a dû baisser le plafond de contribution des banques pour apaiser les marchés (Crédits : YARA NARDI)
Après avoir annoncé, lundi soir, la mise en place prochaine d’une taxe sur les bénéfices des banques dont les revenus ont augmenté en 2022 et 2023 suite à la hausse des taux, les investisseurs ont laché le secteur bancaire italien en bourse. Certaines valeurs ont dévissé de plus de 10% en une journée, ce qui a poussé le gouvernement a descendre le plafond maximal de contribution de 25% du total de leurs actifs net à… 0,1%

[Article publié le mercredi 9 août à 12H03 et mis à jour à 18H51] L'Italie est sous les projecteurs des financiers depuis quelques jours. Et pour cause, le vice-Premier ministre Matteo Salvini a déclaré, lors du Conseil des ministres lundi soir, vouloir prélever une taxe de 40% sur les « surprofits de milliards » d'euros des banques pour compenser le coût pour les ménages et entreprises de l'envolée des taux d'intérêt... Avant de revenir en arrière le lendemain.

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Dans son plan dévoilé lundi, le gouvernement souhaitait mettre en place un prélèvement extraordinaire qui s'appliquerait sur la marge d'intérêt nette des banques des groupes bancaires italiens dont le revenu net enregistré en 2022 dépasse d'au moins 3% celui de 2021 et une taxe équivalente si celui de 2023 dépasse de 6% celui de 2022 et qui devait initialement rapporter entre 2 et 3 milliards d'euros au pays.

Les recettes provenant de la taxation des « marges injustes des banques » serviront à « financer des mesures de soutien aux ménages et aux entreprises » qui traversent « une période difficile en raison du coût élevé de l'argent », avait ainsi fait valoir la Première ministre, Giorgia Meloni. « Nous avons décidé d'introduire une taxe de 40% sur la différence injuste du revenu net d'intérêts », à savoir la différence entre ce que « les banques vous facturent pour vous prêter de l'argent et ce qu'elles concèdent lorsque vous déposez de l'argent », avait-elle expliqué dans une vidéo postée sur Facebook. « Nous disons depuis des mois que la Banque centrale européenne a tort de relever les taux d'intérêt », et cette taxation en « est la conséquence inévitable », avait renchéri le vice-Premier ministre, Antonio Tajani.

Mais l'annonce de cette décision a mis le feu aux valeurs bancaires de la Bourse de Milan. Mardi, Intesa Sanpaolo et Unicredit perdaient respectivement 8,6% et 5,9% à la clôture. Monte dei Paschi di Siena a dévissé de 10,8%, Bper Banca de 10,9% et Banco Bpm de 9%. Les banques italiennes ont ainsi vu partir en fumée 9,5 milliards d'euros de capitalisation en une seule séance, selon les calculs de l'agence d'informations financières Radiocor.

Le gouvernement veut éviter la panique financière

Face à ce tollé financier qui a tiré l'indice de la bourse de Milan à la baisse de 2% mardi, le gouvernement a d'abord fait un premier geste mardi après-midi en assurant que la taxe s'appliquerait finalement aux groupes bancaires italiens dont le revenu net enregistré a augmenté de 5% entre 2021 et 2022 et de 10% entre 2022 et 2023.

Une annonce qui n'a pas calmé les investisseurs et qui a poussé le gouvernement à un nouveau pas en arrière, beaucoup plus conséquent. Mardi soir, après avoir constaté l'étendue des dégâts après la clôture de la bourse, les équipes de la Première ministre ont annoncé qu'« afin de préserver la stabilité des institutions bancaires », le décret prévoit « un plafond pour la contribution, qui ne peut excéder 0,1% du total des actifs » d'une banque... contre 25% annoncé la veille. Ce qui « réduit considérablement l'impact de la taxe », ont commenté ce mercredi les analystes de Jefferies qui estiment désormais le coût total pour les banques à 2,5 milliards d'euros contre 4,9 milliards auparavant.

Ajuster l'écart entre les taux d'emprunt et la rémunération des comptes courants

En outre, les banques qui ont « déjà ajusté leurs taux » en réduisant l'écart entre les taux d'emprunt et la rémunération des comptes courants, « ne seront pas affectées de manière significative » par la taxe, a également promis le ministère de l'Economie mardi soir. En effet, les banques italiennes ont vu leurs revenus engendrés par les intérêts s'envoler dans la foulée de la hausse des taux, sans pour autant augmenter la rémunération des comptes courants de leurs clients dans les mêmes proportions. Selon l'organisation patronale Unimpresa, les banques italiennes rémunèrent les 669 milliards d'euros de dépôts bancaires à hauteur de 0,32% en moyenne, alors que les taux sur les 1.312 milliards d'euros d'emprunts aux familles et entreprises atteignent 4,25%.

Cette taxe sur les « surprofits » des banques, qui devra être réglée d'ici juin 2024, concernera les exercices comptables de 2022 ou 2023.

Après ce mea culpa de la coalition d'extrême droite au pouvoir, les financiers ont finalement été rassurés. À 12h ce mercredi, Intesa Sanpaolo prenait 3,1%, Unicredit 4,2%, Monte dei Paschi 3,7%, Banco BPM 3,6% et BPR Banca 3,4%

(Avec AFP)