Les banques occidentales font machine arrière en Europe de l'Est

Par Christine Lejoux  |   |  495  mots
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Contraintes de se recapitaliser, les grandes banques européennes réduisent la voilure dans ces pays émergents.

C'est ce qui s'appelle virer de bord : les grandes banques d'Europe Occidentale qui, il y a un an encore, ne juraient que par l'Europe Centrale et Orientale, réduisent aujourd'hui la voilure dans cette zone géographique. UniCredit va se recentrer sur les seules Pologne, Russie et République Tchèque, alors que la banque italienne est présente dans une vingtaine de pays d'Europe Centrale et Orientale. De la même façon, l'allemande Commerzbank se concentrera désormais sur la Pologne, au détriment de la Slovaquie et de la République Tchèque. Enfin, la banque portugaise Millennium BCP et la belge KBC cherchent chacune à quitter la Pologne.

Si les banques d'Europe de l'Ouest ont tourné casaque aussi rapidement, c'est parce que, compte tenu de l'aggravation de la crise de la dette dans la zone euro, les marchés et les régulateurs les pressent de renforcer au plus vite leurs fonds propres. L'Autorité bancaire européenne les contraint à trouver près de 115 milliards d'euros d'ici au 30 juin, afin d'afficher un ratio de fonds propres durs de 9% au moins à cette date. Au total, sur les 16 banques occidentales les plus présentes en Europe Centrale et Orientale, 12 doivent être recapitalisées ou font déjà l'objet d'une aide publique, précisent les analystes de Morgan Stanley. Pour remédier à cette situation, les banques européennes n'ont d'autre choix que de céder des actifs. À l'étranger, forcément, pour ne pas affaiblir le financement de leurs économies domestiques. En novembre, les régulateurs autrichiens ont même instauré de nouvelles règles, destinées à empêcher les grands établissements du pays, Erste Group Bank et Raiffeisen Bank International - très présents en Europe Centrale et Orientale -, de renflouer leurs filiales à l'étranger.

Revirement douloureux

Ce revirement stratégique imposé est douloureux pour les banques d'Europe de l'Ouest, qui voyaient en l'Est un relais de croissance. Mais il l'est plus encore pour l'Europe Centrale et Orientale, où les trois quarts des actifs bancaires (hors Russie) appartiennent aujourd'hui à des banques d'Europe occidentales, d'après Fitch. Une dépendance qui inquiète l'agence de notation. Comment ces pays émergents - où l'industrie bancaire était assez peu développée avant l'arrivée des banques occidentales - financeront-ils leurs économies si les grandes banques européennes continuent à plier bagage ou, tout au moins, à réduire les financements accordés à leurs filiales d'Europe de l'Est ? La région risque d'être confrontée à une pénurie de crédit, a averti en novembre Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international. Comme cela avait été le cas lors de la crise financière de 2008. Aussi Fitch n'hésite-t-elle pas à évoquer une nouvelle «initiative de Vienne», du nom du plan de sauvetage élaboré par la Banque européenne de reconstruction et de développement en 2009, et qui avait vu les banques occidentales mettre la main à la poche pour sauver leurs filiales de l'Est.