La paye astronomique du patron de Barclays contrarie même les actionnaires

Par latribune.fr  |   |  669  mots
Bob Diamond - Copyright Reuters
La rémunération du patron de Barclays Bob Diamond, considéré comme un symbole des dérives de la finance au Royaume-Uni, fait désormais des vagues du côté des actionnaires, dont certains se mobilisent à l'approche de leur assemblée générale.

Quand même ses actionnaires s'émeuvent de la rémunération du patron d'une grande entreprise, c'est que le montant est vraiment indécent. A l'approche de l'assemblée générale des actionnaire de Barclays, le salaire exhorbitant de son patron, Bob Diamond, estimé à 17,7 millions de livres en 2011, fait des remous. Il est considéré comme un symbole des dérives de la finance au Royaume-Uni.

L'Association des assureurs britanniques (ABI), particulièrement influente puisque ses membres représentent entre 15% et 20% de la capitalisation de la Bourse de Londres, a même émis une "alerte orange" à l'intention des actionnaires de Barclays, dont le cours de Bourse a chuté d'un quart sur les douze derniers mois. Cette alerte, a précisé mercredi une source proche de l'ABI, vise à "attirer leur attention" sur les bonus "et d'autres avantages d'ordre fiscal" figurant dans le rapport de rémunération soumis au vote de l'AG le 27 avril.

Une "compensation fiscale" de 7 millions d'euros

Un mois après la publication du rapport annuel du groupe détaillant les gratifications accordées aux dirigeants, la polémique a rebondi sur un point passé d'abord inaperçu: une "compensation fiscale" de 5,75 millions de livres (environ 7 millions d'euros) accordée à Bob Diamond après sa nomination à la tête de la banque en 2010. De nationalité américaine, Bob Diamond avait alors dû déménager de New York pour venir s'installer à Londres, et une compensation spéciale lui avait été accordée pour prendre en considération un taux d'imposition plus élevé en Grande-Bretagne qu'aux Etats-Unis.

Surnommé par la presse britannique "le banquier aux 100 millions de livres" pour avoir été un grand bénéficiaire de bonus avant la crise financière, Bob Diamond, 60 ans, était déjà alors considéré comme l'un des banquiers les plus riches du monde. Son impopularité est encore montée d'un cran lorsqu'il a affirmé l'an dernier devant des députés britanniques que "le temps des remords pour les banquiers est révolu".

Près de 21 millions de livres en 2011, un record au Royaume-Uni

Tous comptes faits, sa rémunération 2011 se monte, selon la presse, à 17,7 millions de livres (près de 21 millions d'euros), un record au Royaume-Uni et sans doute aussi en Europe. En plus de son salaire et d'un paquet d'actions qu'il ne pourra toutefois pas vendre à court terme, le richissime patron a touché un bonus de 2,7 millions de livres. Une somme presque deux fois inférieure à celle de l'année précédente, a souligné la banque, pour prendre en compte un bénéfice net en baisse de 16%, affecté par les mauvaises performances de sa branche d'investissement.

Avant l'ABI, une association de conseil aux fonds de pensions, PIRC, avait directement suggéré aux actionnaires de voter contre le rapport de rémunération soumis à l'AG pour sanctionner des résultats décevants. L'un des dix premiers actionnaires de Barclays, Standard Life Investments (SLI), a aussi fait connaître son mécontentement. Un de ses dirigeants, Guy Jubb, s'est notamment élevé dans le Sunday Times contre l'aide fiscale accordée à Bob Diamond "dont personne n'avait idée qu'elle allait surgir dans les comptes".

Plus de 10% des actionnaires sont prêts à voter contre le rapport de rémunération

Le journal, qui cite d'autres actionnaires prêts à se rebeller comme l'assureur Aviva ou le fonds d'investissement Fidelity, estime que plus de 10% d'entre eux sont prêts à voter contre le rapport de rémunération, ce qui constituerait un désaveu conséquent. Les bonus sont devenus encore plus impopulaires cette année au Royaume-Uni en raison de la poursuite de la politique d'austérité, imposée précisément aux Britanniques pour solder les comptes de la crise financière de 2009.

Stephen Hester, le directeur général de la Royal Bank of Scotland (RBS), sauvée par l'Etat à coup de dizaines de milliards de livres, a ainsi dû céder à la pression politique en renonçant en janvier à un bonus de plus d'un million d'euros.