Les créances douteuses poursuivent leur ascension en Espagne

Par Gaëlle Lucas, à Madrid  |   |  516  mots
Chantier de construction à Madrid. Copyright Reuters
Les perspectives pour 2012 en Espagne sont plombées par le chômage et la récession économique ce qui risque d'accroître le volume de créances douteuses déjà à 144 milliards d'euros, un record depuis 1994.

L'avancée des créances douteuses semble imparable en Espagne. En février, elles représentaient 144 milliards d'euros, 8,15% du total de crédits, un record depuis 1994.

 

« Le niveau élevé des créances douteuses s'explique notamment par l'endettement privé en Espagne qui équivaut à environ 200% du PIB. Leur hausse vient de ce que la crise économique se poursuit et les difficultés pour rembourser des emprunts s'approfondissent en conséquence. De plus, il est de plus en plus difficile de négocier un refinancement de la dette, notamment pour les entreprises immobilières », explique Soledad Pellón, analyste chez IG Markets.

 

Le niveau le plus élevé depuis 18 ans

Jamais ce niveau n'avait été aussi élevé en dix-huit ans, depuis la crise économique de 1992-1994. Depuis, d'après BBVA Research, les créances douteuses ont suivi une courbe descendante jusqu'en 2007 et l'éclatement de la bulle immobilière. De 0,72% en 2006, leur taux est passé à 2,63% en septembre 2008, au moment du choc de Lehman Brothers. En juin 2009, alors que se créait le Fonds de Restructuration destiné à financer les fusions entre Caisses d'épargne, très exposées à l'immobilier, leur taux était de 4,6%. Fin 2011, il atteignait 7,62%.

 

De sombres prévisions

Les perspectives ne sont guère rassurantes. Selon la Fondation d'Etudes d'Economie Appliquée (Fedea), 75% des impayés proviennent des entreprises. Or « cette situation pourrait être aggravée par les prévisions de récession en Espagne et dans la zone Euro », explique l'organisme. Par ailleurs, chez les ménages, les débiteurs défaillants pourraient augmenter, après une année de baisse, à cause du taux de chômage qui devrait progresser jusqu'à 24,3% en 2012. Dans ce contexte, la contraction du crédit se poursuit. « Les établissements réduisent la liste de défaillants en restreignant l'accès au crédit », estime Soledad Pellón.

 

Nul ne sait si le taux maximum de créances douteuses jamais atteint, de 8,9% en 1993, sera égalé. Certaines conditions macroéconomiques sont toutefois similaires. A l'époque, le taux de chômage était de 22%, la croissance du PIB négative (-1,2%) et le déficit public de 6,7% du PIB, d'après BBVA Research.

 

Quoiqu'il en soit, le niveau de créances douteuses actuel est préjudiciable aux banques. « C'est un élément de plus qui inspire la méfiance des marchés. Or les raisons de s'inquiéter sur la solvabilité du système s'accumulent : les problèmes de la dette publique, le taux de chômage, la récession économique... », énumère Pellón.

 

Des plans d'assainissment validés par la Banque d'Espagne

Dans ce contexte, la Banque d'Espagne a approuvé Mardi les plans d'assainissement des entités financières destinés à augmenter les provisions des actifs immobiliers conformément à la nouvelle régulation financière. Au total, le système financier espagnol s'assainira à hauteur de 44 milliards d'euros, une opération destinée à rassurer une fois pour toutes les investisseurs quant à la solidité du secteur. Certains groupes ont déjà fourni une partie de cet effort, à l'instar de Banesto, dont le bénéfice net trimestriel a baissé de 88% après avoir provisionné 475 millions d'euros.