Gazprom : Poutine veut traire davantage sa vache à lait

Par Emmanuel Grynszpan, à Moscou  |   |  461  mots
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Le gouvernement russe vient d'autoriser le groupe gazier, à augmenter ses tarifs domestiques de 15%. En échange, il envisage de le taxer à ...80%.

Le Kremlin reprend d'une main ce qu'il donne de l'autre. A peine le pouvoir russe autorisait-il jeudi le quasi monopole gazier à augmenter annuellement ses tarifs de 15%  qu'on apprenait que l'augmentation serait aussitôt récupérée par le fisc. Pour l'instant, le taux d'imposition de 80%, révélé par le quotidien Vedomosti, n'est pas confirmé officiellement. Un représentant du gouvernement affirme que les tractations se poursuivent. « Aspirer l'augmentation des prélèvements sur le prix du gaz va transformer Gazprom en agent du fisc », ironise une note de la banque d'investissement Troika Dialog. « En principe, l'augmentation devrait forcer Gazprom à réduire ses investissements ». Les perspectives de bénéfices accrus à l'exportation sont minimes, c'est pourquoi le groupe comptait beaucoup sur les clients domestiques.

Chaque 1er juillet à partir de cette année et jusqu'en 2014, Gazprom pourra procéder à  une augmentation. Le groupe, dont l'Etat conserve 50% du capital, demandait depuis longtemps le droit de relever ses tarifs. « Les hausses de tarif régulées seront de plus en plus difficiles à justifier » remarquent les analystes de Troika Dialog, « car les producteurs [de gaz] indépendants augmentent sans arrêt leur production, et sont prêts à la vendre avec un rabais par rapport aux prix régulés [par l'Etat] ». Gazprom ne conserve en effet que deux monopoles : celui du transport de gaz et celui de l'exportation. « Ce qui n'est tout à fait clair pour l'instant, c'est l'application ou non de ce taux de prélèvement à tous les producteurs de gaz indépendants ou uniquement à Gazprom », souligne Troika Dialog. Jusqu'ici, la taxe sur l'extraction de gaz était de 501 roubles (13 euros) les mille m3 pour Gazprom et moitié moins pour les autres. La taxe à l'exportation est de 14% sur les ventes.

Compétion accrue à domicile

Gazprom fait face à une compétition accrue sur son marché domestique de la part de groupes comme Novatek, dans lequel Total a d'ailleurs augmenté hier sa participation de 2% à 15%. La valorisation boursière de Novatek (45 milliards de dollars) représente presque un tiers de celle de son grand concurrent au demeurant numéro un mondial et les analystes moscovites lui voient un potentiel de croissance, à la différence du titre Gazprom.

Sous pression sur le marché européen à cause de ses tarifs élevés, Gazprom voit ses sources de bénéfices de réduire, alors que ses coûts de production ne cessent d'augmenter. A domicile, la pression ne peut pas se relâcher car Vladimir Poutine a besoin de financements pour les énormes dépenses publiques qu'il a promis pendant sa campagne électorale. Depuis le début des années 2000, Gazprom occupe la fonction de vache à lait du budget. Le premier groupe gazier mondial fournit à lui seul un quart des recettes budgétaires de la fédération russe.