Les bons chiffres en trompe l'oeil de l'assurance-vie

Par Ivan Best  |   |  436  mots
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Alors que le assureurs attendent la publication ce mardi du rapport Berger-Lefebvre, les chiffres publiés témoignent a priori d'un rétablissement de la collecte pour l'assurance-vie, en janvier et février (+7%). Or ils sont dus avant tout à un transfert d'épargne exceptionnel, lié à la taxation alourdie des actions. Seuls les "bancassureurs" en ont profité

 Après une année 2012 inquiétante, marquée par une décollecte, l'assurance vie, va mieux. C'est la conclusion à laquelle amènent les chiffres publiés concernant les deux premiers mois de l'année (collecte brute en hausse de 7%). Ils laissent la voie libre à des efforts supplémentaires des assureurs, à une évolution du cadre législatif et réglementaire que devrait préconiser le rapport Berger-Lefebvre, publié ce mardi.

Une signification limitée

Or ces chiffres n'ont qu'une signification limitée. Ils sont liés à un événement exceptionnel, à savoir le changement de la fiscalité des actions : à compter du premier janvier 2013, les prélèvement forfaitaire libératoire disparaît, plus-values et dividendes sont soumis au barème de l'impôt sur le revenu. En outre, les dividendes perdent leur abattement à la base de 3.050 euros pour un couple. Ce changement majeur dans le régime de taxation des actions a suscité des arbitrages de la part des épargnants, conseillés par leur banquier. Pour échapper à la majoration d'impôt, beaucoup d'entre eux ont vidé leur compte titre, optant pour un des derniers placements défiscalisés, l'assurance-vie : ils ont simplement transféré leur épargne en actions (des sicav, souvent) sur l'assurance vie.

Le jackpot pour les "bancassureurs"
A preuve : les banquiers, qui ont conseillé ce transfert, sont les seuls à l'origine de la hausse de la collecte début 2013. Alors que ces «bancassureurs » avaient dû faire face, sur l'ensemble de 2012, à une baisse de la collecte brute de 7%, celle-ci a augmenté de 24% en janvier (par rapport au même mois de l'année précédente), une fois adoptée la loi de finances, puis de encore de 8 % en février. Soit une hausse de 17% sur les deux mois, à comparer aux +7% de l'ensemble du marché.

Les assureurs font grise mine
A l'inverse, les assureurs ont continué d'accuser une baisse de leur collecte (-15% sur les deux mois). Ils n'ont pas bénéficié de ce flux d'épargne à caractère exceptionnel.
De ces chiffres, les professionnels tirent le constat que l'assurance-vie n'est évidemment pas tirée d'affaire. Les rendements servis par les contrats en euros risquent d'être orientés durablement à la baisse, compte tenu de la faiblesse des taux d'intérêt, persistante. «Dans ces conditions, on ne peut pas demander à l'assurance vie de tout faire, comme investir plus dans l'immobilier, les PME, tout en continuant de financer l'Etat » souligne un acteurs majeurs de l'assurance-vie. Un avertissement au gouvernement... Du reste, le rapport Berger Lefebvre se garde bien de bouleverser l'ensemble de l'écosystème de ce véhicule d'épargne majeur pour les Français.