La dette grecque peut rapporter gros, très gros, la preuve...

Par latribune.fr  |   |  850  mots
le DELOS Domestic Bond Fund, d'une valeur de 83 millions d'euros et dirigé par Panos Simos, a offert un rendement de 108% au cours des 12 derniers mois grâce aux emprunts de l'Etat grec. Il s'agit de la meilleure performance de l'année... de loin (Photo : Reuters)
Les fonds de gestion d'actifs détenteurs des plus gros rendements de l'année sont... grecs, grâce au regain d'intérêt pour le papier hellénique.

"Tout ce qui descend finit par remonter". Ce pourrait être une nouvelle extension des lois de Murphy, suite à l'histoire de trois gestionnaires d'actifs grecs qui ont réalisé des rendements supérieurs à 100% cette année grâce... aux titres de dette grecque.

En effet, l'intérêt des investisseurs pour le papier grec avait atteint son nadir en 2012, avant que le dix ans, par exemple, ne cesse ensuite de s'apprécier à un rythme presque aussi élevé que lorsqu'il chutait.

Au bon endroit au bon moment

Le pari de Panos Simos de NBG Asset Management, de Aris Papageorgakopoulos et de John Gikas, de Eurobank Asset Management, était osé. Mais il s'est révélé très lucratif : certains bons du Trésor grec ont presque quadruplé depuis leur plus bas de 2012, lorsque le monde craignait une sortie de la Grèce de la zone euro et un défaut qui en aurait été la conséquence logique.

Pas d'arrogance, toutefois, du côté des trois gestionnaires d'actifs au nez creux, qui ont plus la sensation de s'être trouvés au bon endroit au bon moment, à en croire les propos recueillis par le Wall Street Journal.

"A un certain point, les bons grecs étaient les actifs plus détestés  au monde et nous nous sommes dit qu'il n'y avait pas grand chose à perdre alors qu'ils étaient au plus bas", explique Aris Papageorgakopoulos au quotidien américain.

108% de rendement, meilleure performance au monde

Conséquence de cette audace : le DELOS Domestic Bond Fund, d'une valeur de 83 millions d'euros et dirigé par Panos Simos, a offert un rendement de 108% au cours des 12 derniers mois, soir le record du monde de l'année . Suivi de près par l'Eurobank LF Government Bond Fund avec un rendement de 107% et l'Interamerican Fixed Income Domestic Bond Fund avec une rendement de 105% (source : Morning Star). Pour comparer, la meilleure performance de l'année pour les fonds spécialisés dans les bons libellés en dollars est de 34%.

Loin des stars de Wall Street

Pourtant, la vie des trois "super-performers" de l'année n'a pas grand chose à voir avec celle des super stars de l'investissement, raconte le Wall Street Journal. Leur journée typique commencerait à 9 heures du matin pour se terminer à 18h. Et leurs déplacements en avion se feraient en classe économique.

Aris Papageorgakopoulos, par exemple, roule dans une vieille  Audi achetée il y a dix ans et vit toujours dans la maison dans laquelle il a grandi dans la banlieue d'Athènes. Panos Simos, quant à lui, aurait vu toutes ses demandes de prêt pour financer un achat immobilier échouer à cause du resserrement du crédit par les banques grecques. Si bien qu'être gérant du fonds d'actif le plus rentable du monde ne l'empêche pas d'être locataire de son logement.

Derrière cette réussite soudaine, pas d'algorithme sophistiqué, pas de calcul compliqué, juste un mode de fonctionnement qui diffère des fonds classiques.

"Nous n'avons pas la mentalité des hedge-funds ou de la banque d'investissement en Grèce, nous ne perdons jamais de vue la réalité", explique Aris Papageorgakopoulos au Wall Street Journal.

De la chance, mais aussi un peu de jujotte

Pour lui, c'est surtout une opportunité qui a provoqué leur performance de cette année. Ces trois fonds ont en effet en commun d'obéir à une règle qui les oblige à détenir au moins 50% de leurs actifs en dette grecque. Allant au delà de leur obligation, ils ont toutefois pris la décision de détenir 100% de papier grec.

Mais cette modestie apparente ne doit pas masquer une méthode basée sur la patience et quelques prises de risques. En effet, les trois ont vendu leur titres de dette grecque, dans la limite des 50% qu'ils doivent obligatoirement détenir, un mois avant les élections de mai 2012, qui ont vu le pays sombrer dans l'impasse politique. A la place, ils ont acheté des obligations des banques grecques à leur plus bas, estimant à juste titre que celles-ci seraient remboursées une fois arrivées à maturité.

Et c'est ensuite, après le second tour des élections en juin,  qui a rendu au pays sa stabilité politique, qu'ils se sont jetés sur le papier grec, investissant la totalité de ce qu'ils avaient dans ce produit hautement spéculatif. Le langage pro-investisseurs du gouvernement Samaras, le nouveau Premier ministre conservateurs toujours au pouvoir aujourd'hui, a ensuite fait le reste, selon Aris Papageorgakopoulos.

La Grèce n'est toujours pas sortie de ses difficultés

Cette embellie dans le ciel des fonds de gestion d'actifs grecs forcés de détenir des titres de dette grecque dans leurs portefeuilles ne leur fait toutefois pas oublier les années de vache maigre qu'ils ont connues entre 2009 et 2012, alors que les investisseurs fuyaient en masse le pays, et qu'ils se retrouvaient alors avec sur les bras une flopée de titres sans valeur. Et attention à ne pas crier victoire trop vite. Car, alors que le pays devrait avoir besoin d'un troisième plan d'aide, la crise grecque est loin d'être terminée...