Les dividendes versés par les entreprises du CAC40 s’envolent

Par latribune.fr  |   |  769  mots
L'Etat français est, avec 1,32 milliard d'euros, le troisième bénéficiaire des versements de dividende au titre des profits de 2021. (Crédits : DR)
En plein débat sur la taxation des super-dividendes, l'ONG « Observatoire des Multinationales » a calculé que les dividendes versés par les entreprises du CAC 40 avaient atteint l'an dernier un montant record de 57,5 milliards d'euros. L'année 2022 s'annonce encore plus prolifique.

L'année 2021 n'aura jamais été aussi bonne pour les actionnaires des entreprises cotées au CAC 40. Selon le calcul de l'ONG « Observatoire des Multinationales », les dividendes versés ont atteint un montant record de 57,5 milliards d'euros en 2021, rapportant notamment 2,4 milliards d'euros à la famille Arnault et 2 milliards au fonds américain Blackrock. Aux dividendes en hausse de 32% par rapport à 2020, il faut ajouter les rachats d'actions visant à soutenir les cours en Bourse, soit, pour les actionnaires, une gratification de 23 milliards d'euros toujours en 2021.

16 familles se partagent un dixième de tous les dividendes

Après le groupe Arnault et Blackrock, l'Etat français est, avec 1,32 milliard d'euros, le troisième bénéficiaire des versements de dividendes au titre des profits de 2021 - devant les familles Bettencourt (890 millions) et Pinault (620 millions). « Environ un dixième de tous les dividendes » du CAC 40 revient à 16 familles liées historiquement à certains des plus grands groupes français comme LVMH, Hermès, L'Oréal ou Kering, selon l'ONG.

Par ailleurs, toujours selon Observatoires des Multinationales, « la contribution fiscale des groupes du CAC 40 semble croître bien moins rapidement que leurs profits et leurs dividendes ». Quelque 14% « de l'ensemble des filiales du CAC 40 sont localisées dans des paradis fiscaux », note le rapport, reconnaissant toutefois que « le degré de présence des grands groupes français dans ces juridictions (...) ne suffit pas à « prouver » à lui seul qu'il y ait évasion fiscale illicite ».

La rémunération moyenne d'un patron du CAC a, elle, progressé de 52% en 2021 pour atteindre 6,6 millions d'euros, après, là aussi, une année de crise sanitaire plus faible. « La hausse entre 2019 et 2021 est de 26,4% », ajoute l'ONG, et « les dirigeants d'entreprises dont l'État est actionnaire figurent en bas de classement ». Le groupe Dassault est en tête, avec 44 millions d'euros de rémunération pour son directeur général. Rapporté à la rémunération des dirigeants, « un salarié moyen du CAC 40 doit travailler 139 jours pour gagner ce que son patron gagne en une seule journée ». En moyenne, une entreprise du CAC 40 a dépensé 65.300 euros par salarié en 2021, ce qui inclut notamment les cotisations patronales.

Déjà des records battus en 2022

« Noyé dans les profits » qui ont explosé par rapport à l'année 2020 plombée par le Covid-19, les groupes du principal indice boursier français ont « une nouvelle fois priorisé (leurs) actionnaires », accuse l'ONG. Elle n'a sans doute pas fini de s'indigner. Generali, par exemple, vient de confirmer les objectifs de son plan stratégique, dont une hausse du bénéfice par action de 6 à 8% par an et des dividendes cumulés de 5,2 et 5,6 milliards d'euros sur la période 2022-2024. Fin octobre, TotalEnergies a décidé la distribution d'un troisième acompte sur dividende au titre de l'exercice 2022 d'un montant de 0,69 €/action, identique au premier et deuxième acomptes 2022 et en hausse de 5% par rapport aux acomptes et au solde versés au titre de l'exercice 2021. Au global, selon le gérant d'actifs Janus Henderson, un nouveau record de dividendes, pour un deuxième trimestre, a été battu en 2022 avec 44,3 milliards d'euros versés.

Débat sur la hausse de la taxation des dividendes

Cette étude intervient en plein débat sur le renforcement de la fiscalité sur les dividendes. Le patron des députés MoDem Jean-Paul Mattei a assuré la semaine dernière qu'il ne « lâcherait » pas son idée d'une augmentation de la taxation des « super-dividendes » des grandes entreprises, votée par l'Assemblée contre l'avis du gouvernement, puis écartée à la faveur d'un 49.3. L'élu des Pyrénées-Atlantiques, membre de la majorité présidentielle à l'Assemblée, avait réussi à faire voter lors de l'examen du budget de l'Etat un amendement augmentant la taxation des « super-dividendes » des grandes entreprises, qui serait passée de 30% à 35%. « Je ne cherche pas à mettre en difficulté le gouvernement. J'ai bien l'intention de légiférer et d'être porteur d'idées », a-t-il fait valoir lors d'un entretien avec l'association des journalistes parlementaires (AJP). Il argue que « la crise des gilets jaunes, la crise sanitaire et la guerre en Ukraine » ont abouti à un « contexte qui a changé » et qui « nécessite qu'on se pose les bonnes questions » sur « l'équilibre entre fiscalité du travail et fiscalité du capital ». Il est donc « en train de travailler pour redéposer cet amendement » en tenant compte de « certaines critiques ». Le parti présidentiel Renaissance avait indiqué fin octobre qu'il allait « réfléchir à un travail » sur les « super-dividendes ». L'exécutif a engagé une concertation sur le « partage de la valeur », en suggérant un mécanisme de « dividende salarié » qui reste encore à définir.

(Avec AFP)