Budget 2023  : les députés votent une taxe sur les « super-dividendes »

La majorité présidentielle a essuyé mercredi une série de revers dès le début de l'examen des mesures du budget 2023 à l'Assemblée. Le déclenchement de l'article 49.3 de la Constitution, qui permet d'adopter une loi sans vote, paraît inéluctable.
Pour voter le Budget, la question n'est plus de savoir si le gouvernement va déclencher le 49.3 mais quand.
Pour voter le Budget, la question n'est plus de savoir si le gouvernement va déclencher le 49.3 mais quand. (Crédits : Reuters)

Les oppositions, lors de l'examen des mesures du budget 2023 à l'Assemblée, ont d'emblée montré le ton. Elles ont réussi à rejeter en première lecture, par 192 voix contre 175, l'article « liminaire » du projet de loi de finances (PLF), dans lequel figurait l'objectif-clé de contenir le déficit public à 5% du PIB en 2023. « Vous êtes réunis Nupes, Rassemblement national, LR, pour priver la France de tout cap », a dénoncé alors le ministre des Comptes publics Gabriel Attal, qui n'a pu ensuite que constater les dégâts.

Contre l'avis du gouvernement, les députés ont ensuite largement adopté un amendement (227 voix pour, 88 contre) visant à dissuader les grandes entreprises de distribuer des résultats exceptionnels sous forme de «super-dividendes» , par le biais d'une majoration de la taxation de ces revenus, portée temporairement de 30 à 35% (ci-dessous).

Les députés ont adopté,  contre l'avis du gouvernement, un amendement porté par le Modem, créant un statut d'investisseur immobilier. Ce dernier permettrait d'opter pour le Prélèvement forfaitaire unique (PFU) pour des revenus fonciers, en contrepartie d'engagements des propriétaires. Toujours contre l'avis du gouvernement, les oppositions ont réussi à adopter (174 voix pour, 156 contre) un amendement sur les titres-restaurant, relevant le montant maximal de la contribution que les employeurs peuvent apporter pour leur acquisition par leurs salariés. Des amendements de la gauche visant à rendre l'impôt sur le revenu « plus progressif » ont en revanche été repoussés. Tout comme ceux du RN proposant « d'exonérer d'impôt sur le revenu tout jeune Français de moins de 30 ans percevant moins de 2.000 euros nets ».

« Il faudra bien qu'il y ait un budget pour la France » (Bruno Le Maire)

Peu avant l'ouverture de la séance au Palais Bourbon, le Conseil des ministres a autorisé le gouvernement à actionner l'article 49.3, une arme constitutionnelle permettant d'adopter un texte sans vote, sauf motion de censure. « Est-ce que vous respecterez la représentation nationale ? », a demandé l'Insoumis Alexis Corbière, exhortant le gouvernement à dire clairement si le texte qu'il ferait adopter par le 49.3 contiendrait ou non les amendements adoptés contre son avis. Le gouvernement a toute latitude sur ce point.

« On peut revenir au texte initial, retirer des amendements adoptés, inclure des amendements pas encore discutés », rappelle une source parlementaire Renaissance. « Nous voyons déjà l'épée de Damoclès poindre », a lancé à l'Assemblée le député Boris Vallaud, chef de file des socialistes. « Combien de temps laissez-vous au débat parlementaire ? », a-t-il demandé au gouvernement. « Nous prendrons tout le temps nécessaire » à un « débat approfondi », a assuré le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, même si « viendra un moment où il faudra bien qu'il y ait un budget pour la France ». Sur RTL, ce matin, il a assuré que le 49.3 ne serait pas déclenché cette semaine, « nous allons prendre le temps qu'il faut, le vote du budget est un acte fondateur pour le pays qui mérite un débat approfondi ».

Si l'utilisation du 49.3 semble inéluctable, faute de majorité absolue, le camp présidentiel est tiraillé entre la volonté de ne pas apparaître comme fermé au débat et celle d' « abréger les souffrances » face à des oppositions qui « voteront contre tout ». Trop dispendieux pour la droite, « austéritaire » pour la gauche, « soumis » à Bruxelles selon le RN : les oppositions ont exclu de soutenir ce budget, dont l'une des mesures phares est le « bouclier tarifaire » de 45 milliards d'euros pour limiter à 15% les hausses des prix réglementés du gaz et de l'électricité.

Zoom - les députés votent une hausse des taxes pour les « super-dividendes », la majorité se fissure

Les députés ont adopté en première lecture, contre l'avis du gouvernement, un amendement au budget pour 2023 visant à dissuader les grandes entreprises de distribuer des résultats exceptionnels en « super-dividendes », par le biais d'une majoration temporaire d'une taxe.

L'amendement au projet de loi de finances pour 2023, avait été déposé par le Modem, qui fait partie du camp présidentiel.  Il a pu être adopté (227 voix pour, 88 contre) grâce notamment au soutien des groupes politiques de gauche membres de la Nupes et à celui du RN. Il a aussi reçu le soutien de 19 députés du groupe des macronistes de Renaissance.

Les députés du groupe Horizons se sont pour la plupart abstenus. « On a une illustration parfaite du fait que vous êtes dans votre couloir et que vous ne voulez pas en sortir », a lancé au gouvernement le député LFI Manuel Bompard, soulignant le fait que l'exécutif, se disant ouvert aux propositions des députés, n'avait pas soutenu une idée venant pourtant du Modem. « C'est un amendement très raisonnable, très constructif », a estimé le député RN Jean-Philippe Tanguy.

Le texte adopté vise les grandes entreprises, au-dessus d'un certain seuil de chiffre d'affaires. Il prévoit « une majoration temporaire de 5 points du prélèvement forfaitaire unique », le portant à 35%, sur les dividendes distribués ou les rachats d'actions, quand ces revenus sont « supérieurs de 20% à la moyenne des revenus distribués entre 2017 et 2021 ». Le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a ainsi mis en garde contre l'« effet signal » négatif d'un tel dispositif pour l'attractivité du pays. Il a aussi rappelé que le gouvernement souhaitait déjà transposer dans le budget un accord entre pays européens pour mettre à contribution les « superprofits », ces bénéfices exceptionnels réalisés par certaines entreprises.

Commentaires 4
à écrit le 13/10/2022 à 11:06
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On peut rappeler que les 2,6 milliards donnée aux actionnaires de TotalEnergie ont été donné par ...anticipation par la direction pour éviter cette taxe, pas bête.

à écrit le 13/10/2022 à 10:08
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"Bruxelles" veut uniformiser son Empire, rien de mieux que de la faire sombrer dans le chaos !

à écrit le 13/10/2022 à 9:37
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Le gauchisme tient le haut du pavé à l'Assemblée Nationale. C'est logique puisque les LR ont donné les clés du chaos à la NUPES en refusant de former une coalition avec LREM. Et puisque, plus généralement, les droites ont refusé de s'allier pour...

à écrit le 13/10/2022 à 9:08
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"la majorité se fissure" A noter ,que le suppléant d'Élisabeth Borne a voté pour un amendement sur les super-dividendes, contre l'avis du gouvernement et donc d'Élisabeth Borne !!

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