Armement  : l'exportation, vitale pour la souveraineté de la France

Par Patrick Cappelli  |   |  634  mots
Les "exportations sont vitales pour notre souveraineté car le marché européen est trop étroit, et nos alliés ne font pas assez d'efforts pour leur défense, certains acceptant une forme de dépendance (aux États-Unis, ndlr)", a expliqué le directeur du développement international de la direction générale de l'armement (DGA), Thierry Carlier (photo, le Rafale). (Crédits : Dassault Aviation)
Malgré les récentes plaintes des ONG concernant les exportations d'armes dans certains pays alliés, le ministère des Armées et les industriels ont réaffirmé à l'occasion de la sixième édition du Paris Air Forum organisé par La Tribune l'importance de ces ventes pour la France.

Les discours des ONG sur les effets destructeurs des armes françaises employées sur certains terrains de conflit en général, et au Yémen en particulier, n'ont pas convaincu la ministre des Armées Florence Parly, ni les industriels de l'armement. Au Paris Air Forum, organisé le 14 juin par La Tribune, le directeur du développement international de la direction générale de l'armement (DGA), Thierry Carlier, l'a clairement expliqué : "les ONG sont dans leur rôle. Mais ces exportations sont vitales pour notre souveraineté car le marché européen est trop étroit, et nos alliés ne font pas assez d'efforts pour leur défense, certains acceptant une forme de dépendance (aux États-Unis, ndlr). Il nous faut donc exporter au-delà de l'Europe". Le patron des exportations à la DGA a aussi rappelé in fine que la France "respecte les engagements internationaux sur la commercialisation des armes et les éventuels embargos".

Pour sa part, le directeur de Safran en charge de l'international et des relations institutionnelles, Stéphane Abrial, a salué "l'action des ONG, surtout celles qui pansent les plaies des populations". Pour la directrice générale du développement de Thales, Pascale Sourisse, les exportations sont indispensables à l'industrie de défense si l'on veut atteindre les objectifs de souveraineté et d'autonomie stratégique. Elle a cité l'exemple du programme SCAF (système de combat aérien du futur), qui sera développé grâce à la Base industrielle et technologique de défense (BITD) en France. Cette filière industrielle réunit dix grands groupes et 4.000 entreprises, "pilier d'un ensemble plus vaste de défense aéronautique et de l'espace qui représente 400.000 emplois et constitue un des rares secteur industriel où la France possède une position de leadership mondial", a rappelé Pascale Sourisse.

L'armée française, un label de confiance

Fondamentalement, la France a mis en place des mécanismes de contrôle robustes pour autoriser ou non les exportations d'armes. Le général Stéphane Abrial a précisé que les "débats d'une grande intensité" avec les membres des services de l'État dans le cadre de la commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG) s'appuient sur "des arguments solides qui rassurent les industriels, qui eux n'ont pas les moyens de contrôler le respect des Traités". Ceux-ci étant susceptibles d'évoluer, Stéphane Abrial a assuré que Safran "s'adaptera". Le directeur de Safran en charge de l'international et des relations institutionnelles reconnaît que son groupe a déjà essuyé des refus d'exporter, tout comme d'ailleurs Pascale Sourisse. Sans préciser lesquels et dans quels pays...

En matière d'exportation d'armement, les atouts de la France sont d'abord l'usage de ces armes par l'armée française, un gage de réassurance pour les clients : "le label combat proven by French Forces est très apprécié, sans oublier notre réseau diplomatique de haute volée", a précisé le général Abrial. Seule la compétition franco-française des industriels du secteur pourrait représenter une éventuelle faiblesse pour les exportations d'armes, mais Thierry Carlier a rappelé que les industriels "ne font que répondre aux appels d'offres des pays clients".

Comment l'Etat et les industriels vont-ils gérer l'exportation de l'intelligence artificielle, gage de la souveraineté de la France, lorsque qu'elle sera omniprésente dans les armements ? "Il nous appartiendra d'obtenir les licences d'exportation en suivant les règles en vigueur demain", a expliqué Pascale Sourisse. Et Thierry Carlier de conclure que "l'IA ne se distingue pas des autres types de transferts de technologie réalisés en accord avec les  régimes internationaux dont fait partie la France".

Regarder la vidéo du débat du Paris Air Forum 2019 :