L'industrie aéronautique veut des "démonstrateurs" d'avions militaires (Gifas)

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  665  mots
Le nEUROn, le drone de combat furtif de Dassault Aviation
Dans le cadre de la prochaine loi de programmation militaire 2019-2025, le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) réclame une politique de "démonstrateurs". Ces modèles grandeur nature permettraient de valider les concepts et lever les risques avant le lancement de grands programmes d'avions ou de drones militaires.

En cours d'élaboration, la prochaine loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2019-2025 exprimera le renforcement du budget de la Défense souhaité par Emmanuel Macron, lequel a décidé de porter l'effort de défense à 2% du PIB à l'horizon 2025. Une décision saluée par Eric Trappier, le président du Gifas (Groupement des industries françaises de l'aéronautique et de l'espace) et PDG de Dassault Aviation, lors de la présentation des vœux du Gifas à la presse.

De gros enjeux pour préparer l'avion de combat de demain

Si cette "LPM" aura pour objectif a priori de régénérer le potentiel des armées et préparer le renouvellement de la dissuasion nucléaire, elle devra également, aux yeux d'Eric Trappier, "préparer le futur, en particulier dans l'aviation de combat et en coopération".

Pour bien préparer l'avenir, le Gifas plaide sur la nécessité de développer des « démonstrateurs », des appareils à grandeur nature qui servent de cobaye pour valider des technologies et des concepts avant le lancement de nouveaux programmes.

« Nous espérons que l'amélioration des budgets permettra de mener une politique de démonstrateurs », a déclaré Eric Trappier: « Dans l'aéronautique, pour montrer que les concepts fonctionnent, il faut absolument avoir une boucle permanente entre les études en amont et la vérification en vol par des démonstrateurs (...). Le démonstrateur doit pouvoir montrer les bases de ce que peut faire l'industrie et de ce que pourra faire la technologie dans 15 ans », a-t-il insisté.

Montants modestes

Pour Eric Trappier, se priver des démonstrateurs et passer directement des études papier au lancement d'un programme est en effet extrêmement risqué pour les industriels. Surtout s'il leur est demandé de s'engager à 100% sur la performance de l'appareil. En cas de difficultés sur le programme, ils se retrouveront en effet dans une position délicate, et les pouvoirs publics aussi. Les déboires rencontrés par l'avion de transport A400M et les montants pharaoniques pour remettre le programme en selle (10 milliards de surcoûts) constituent un bon exemple.

Permettant de lever les risques en amont des programmes, les démonstrateurs ont l'avantage, pour Eric Trappier, de mobiliser des « montants modestes » par rapport aux milliards d'euros que nécessitent les programmes d'avions. Pour illustrer son propos, le président du Gifas a pris l'exemple du nEUROn, le démonstrateur de drone européen de combat dont Dassault est le maître d'œuvre.

« Le coût du nEUROn s'élève à 400 millions d'euros sur 7-8 ans. C'est certes beaucoup d'argent en valeur absolue, mais quand cette somme englobe les études, le développement et les essais en vol, ce n'est pas très cher ».

Avion de combat européen

Si le Gifas milite pour des démonstrateurs dans le secteur spatial ou les drones, les enjeux sont particulièrement importants dans celui de l'aviation de combat. Aujourd'hui, il y existe, non pas un projet, mais une  réflexion sur un avion de combat européen. Des discussions ont notamment lieu avec l'Allemagne pour élaborer une feuille de route en 2018.

"Nous verrons si nous arriverons un jour à faire un avion de combat européen. Ce qui est sûr, c'est que de l'alternative à ne pas faire de suite à un Grippen, un Typhoon et à un Rafale, c'est de choisir un appareil américain, et je souhaite bien du plaisir à ceux qui ont acheté ou qui vont acheter du F-35 (Lockheed Martin) d'être capables de ne pas être intégrés dans l'armée américaine. Car le F-35 est une machine à tuer l'industrie européenne, mais aussi une machine à vous intégrer dans les armées américaines", a déclaré Eric Trappier.

Pour autant, pour qu'un avion de combat européen aboutisse, encore faudra-t-il que les pays européens jouent la préférence européenne. Or, aujourd'hui, une grande partie des pays européens achètent des avions américains.