DS : la nouvelle DS9 est-elle trop ambitieuse ?

Par Nabil Bourassi  |   |  714  mots
(Crédits : DS)
La marque premium française vient de lever le voile sur une très grande berline dont les dimensions côtoient ses rivales allemandes, elles qui règnent sans partage sur ce segment. Une prise de risque immense alors que les volumes de DS peinent à atteindre des seuils critiques...

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Le mystère autour du nouveau modèle de la marque premium française a pris fin ce lundi 24 février. DS a montré les images de sa DS9, une grande berline qui vient compléter sa gamme composée des désormais deux seuls DS3 Crossback et DS7 Crossback (deux SUV). La filiale du groupe PSA poursuit ainsi le déploiement de sa stratégie produit qui consiste à lancer un produit par an. Pour rappel, la DS3 est sortie du catalogue en juin dernier, tandis que les DS4 et DS5, deux berlines de segment C et D étaient arrêtés un an auparavant.

Proche d'une Audi A7

Avec la DS9, la marque française s'attaque directement au très haut du panier. Cette berline tricorps de 4,93 mètres côtoie les gabarits les plus haut-de-gammes. Par comparaison, l'Audi A7 mesure 4,93 mètres. Rien de tels chez les marques sœurs du groupe PSA puisque la Peugeot 508 fait 16 cm de moins. Pour une marque Premium, ce segment est beaucoup moins porteur que celui des SUV, mais il est incontournable. Il l'est d'autant plus pour DS qui est encore dans une démarche d'identification de marque, et qui doit pouvoir proposer un modèle dit "statutaire", dans le jargon automobile, autrement dit, la voiture dite de prestige que se disputeront présidents et ministres. Ce rôle permet de positionner la marque et de la légitimer comme une marque haut-de-gamme et se payer comme tel. Ainsi, la mission de la DS9 n'est pas nécessairement de réaliser des volumes conséquents. Même chez Audi, une marque installée sur le segment premium avec plus de 2 millions de véhicules, l'A7 se vendait à un rythme qui ne dépassait pas les 50.000 unités par an au niveau mondial.

Dans ces conditions, il vaut mieux avoir une plateforme bien amortie pour une équation économique compétitive. DS est parvenu à tirer l'empattement de la plateforme maison au-delà de ce qu'elle avait produit jusqu'ici. C'est la deuxième fois que PSA démontre la souplesse de l'EMP2, initialement prévue pour les segments C et B. En lançant la Peugeot 508 L en Chine, il avait ainsi ajouté une dizaine de centimètres afin de répondre à la demande du premier marché du monde. D'ailleurs, la DS9 sera fabriquée en Chine, les ventes européennes seront tout simplement importées. Pas de gros volumes en perspectives...

Encore des petits volumes pour la DS3 Crossback

Pour DS, cette commercialisation est une énorme prise de risque. La marque s'offre le luxe d'un lancement qui tient plus du symbole dans un contexte de volumes faméliques. En 2019, les ventes mondiales de DS7 Crossback ont atteint les 32.000 unités. Le déploiement de la DS3 Crossback s'est étalé sur l'ensemble de l'exercice, ce qui explique le volume encore modeste de 24.000 immatriculations, pour un modèle destiné à faire d'importants volumes de vente. Ce petit SUV a pourtant sauvé en partie la performance commerciale de l'année 2019 puisque les ventes de DS ont progressé de 17% sur cette période. En réalité, elles partaient de très bas pour atteindre le chiffre très insuffisant de 62.500 ventes, dont 56.400 en Europe...

Du point de vue de DS, la priorité n'est pas les volumes. Comme pour les SUV, la marque veut d'abord lancer un produit très haut de gamme afin de se positionner puis de lancer, dans un second temps, un produit plus volumétrique par nature. Mais, imprégné de la valeur de la DS7 Crossback, la DS3 Crossback vise des ventes avec des taux de finition très supérieur. Un cercle vertueux pour la marque qui défend ainsi ses prix (pricing power) et donc sa valeur résiduelle. Ce serait ainsi le rôle de la DS9 pour le segment des berlines.

La filiale de PSA a toujours indiqué que sa stratégie prioritaire était d'installer une marque premium sans forcer les volumes. Pour de nombreux analystes, une marque automobile a néanmoins besoin d'un minimum de volumes pour exister. La fusion avec Fiat Chrysler pourrait pousser la nouvelle structure à faire le ménage dans son portefeuille de quatorze marques. Ce sera une façon de tester la promesse de Carlos Tavares de n'en fermer aucune...