Le Multaq, médicament vedette de Sanofi, sur la sellette

Par Audrey Tonnelier  |   |  559  mots
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Le Multaq, contre les troubles cardiaques, est mis en cause dans deux cas d'insuffisance hépatique sévère. Le laboratoire tricolore va envoyer une lettre aux professionnels de santé américains pour les mettre en garde. Les questions sur l'efficacité du traitement avaient failli remettre en cause la mise sur le marché du Multaq l'an dernier.

Le Multaq de Sanofi revient sur le devant de la scène. Le laboratoire tricolore a confirmé ce vendredi que deux patients traités avec ce médicament contre les troubles du rythme cardiaque ont été victimes d'insuffisances hépatiques aigues ayant nécessité une transplantation du foie. Sanofi n'a précisé ni où, ni quand ont eu lieu ces deux accidents.

Mais dans une lettre qu'ils sont sur le point d'envoyer à tous les professionnels de santé américains (médecins, cardiologues, pharmaciens d'officine et hospitaliers), publiée par le site Internet spécialisé cardiobrief.org, les dirigeants de la filiale américaine de Sanofi révèlent  avoir proposé dès décembre 2010 aux autorités de santé américaines (FDA) de modifier la notice du médicament pour y inclure de nouvelles recommandations :  demander aux patients "de signaler immédiatement tous symptômes suggérant un problème hépatique" mais aussi "conduire des tests des enzymes du foie périodiquement, notamment dans les six premiers mois de traitement".

De son côté, la FDA a publié un avis concernant des cas rares mais graves de défaillances hépatiques liées au médicament, et continue d'étudier des rapports faisant état de possibles effets négatifs ou d'incompatibilités médicamenteuses.

"Aucun lien de causalité n'a à ce jour été établi entre ces accidents et le Multaq", a précisé un porte-parole de Sanofi, qui précise que le laboratoire est en lien avec les autorités américaines et européennes sur le sujet. "Il est trop tôt pour dire si une modification de notice sera aussi envisagée en Europe" a ajouté le porte-parole. Le médicament, commercialisé aux Etats-Unis depuis juillet 2009 et en France depuis octobre dernier, est utilisé par quelque 200. 000 patients dans le monde, indique le groupe. 

" Ces procédures sont normales, précise à "La Tribune" un bon connaisseur du secteur." La majorité des autorisations de marché européennes sont aujourd'hui assorties d'un plan de gestion des risques, qui peut aboutir à un renforcement des précautions d'emploi sur la notice si un lien de causalité est établi entre des événements de ce type et le médicament" ajoute l'expert.

Multaq est présenté par Sanofi comme un potentiel "blockbuster" (médicament à plus de 1 milliard de dollars de ventes) et l'un des principaux relais de croissance du laboratoire, confronté à la perte de ses grands brevets. Les analystes de Thomson Reuters en attendent 1,4 milliard de dollars de revenus en 2014. 

Le Multaq a connu  déjà connu des mésaventures en France, où il est aujourd'hui remboursé à 65% par la Sécurité sociale. En mars 2010, la Commission de la transparence, chargée d'évaluer l'intérêt médical des nouveaux produits,  avait estimé qu'il n'apportait pas de progrès thérapeutique. Après audition du laboratoire, les experts avaient accordé en juin un avis "favorable" au remboursement à 65%.

Le Multaq a été inscrit sur la liste des médicaments remboursables en octobre dernier. Sanofi a cependant dû accepter un prix parmi les plus faibles d'Europe pour sa molécule, à 2,20 euros par jour (prix grossiste hors taxe).

Le médicament est destiné à remplacer l'amiodarone, un autre produit de Sanofi, plus ancien et présentant d'importants effets secondaires (problèmes de thyrroïde, pulmonaires...).

A la Bourse de Paris, l'action Sanofi perdait 1,7 % ce vendredi après-midi.