Le sort du Multaq de Sanofi scellé en France

Par Audrey Tonnelier  |   |  506  mots
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Le Ministre de la Santé Xavier Bertrand a indiqué qu'il ne s'opposerait pas au déremboursement du médicament de Sanofi contre les troubles du coeur, décidé par les autorités de santé. Reste à savoir ce que décidera l'Agence européenne du médicament, qui a la responsabilité de maintenir ou non le Multaq sur le marché européen.

Cette fois, le sort du Multaq semble scellé. En France, en tout cas. Lundi matin, le Ministre de la Santé Xavier Bertrand a indiqué qu'il "ne [s']opposerai[t] pas" au déremboursement de ce médicament de Sanofi contre les troubles du coeur.

Samedi 16 juillet, la Commission de la Transparence avait officiellement publié l'avis rendu lors de sa réunion du 22 juin dernier, dans lequelle elle rendait un "avis défavorable au maintien de l'inscription sur la liste des médicaments remboursables" pour le Multaq. "Le service médical rendu [par le médicament] est insuffisant pour justifier le maintien de sa prise en charge par la solidarité nationale" juge l'instance, chargée en France d'évaluer l'intérêt thérapeutique des médicaments proposés au remboursement.

Dans un contexte rendu dififcile pour les laboratoires pharmaceutiques depuis l'affaire du Mediator, la décision était attendue (lire "La Tribune" du 20 mai). 

C'était même devenu  un secret de Polichinelle : "je suivrai l'avis de la Commission, sans hésiter et sans trembler" avait indiqué  le Ministre lui-même, le 23 juin dernier, en marge de la conférence de presse qui dévoilait sa réforme du système du médicament.

Commercialisé en France depuis octobre 2010, le Multaq était jusqu'à présent remboursé au taux maximal de la Sécurité sociale, à 65 %. En six mois, d'octobre à mars, il a rapporté 4,5 millions d'euros à son fabricant dans l'Hexagone, selon des chiffres que s'est procurés "La Tribune". Il a coûté 3,7 millions à la Sécurité sociale.

Mais Sanofi y a toujours vu un "blockbuster" (médicament rapportant plus d'un milliard d'euros de ventes) potentiel, dans un contexte de perte massive des brevets de ses produits historiques. Vendu aux États-Unis et dans plusieurs pays d'Europe, le Multaq a rapporté 172 millions d'euros au labo en 2010.

Reste à savoir si le produit, déremboursé, sera maintenu ou pas sur le marché. C'est en principe la responsabilité de l'Agence européenne du médicament, qui étudie actuellement le profil bénéfice/risque du Multaq. Cette revue a été décidée après deux cas d'insuffisance hépatique aiguë révélés début 2011 chez des femmes prenant du Multaq.  Ses conclusions devraient être connues d'ici la fin du mois.

Pour l'heure, le Multaq peut toujours être acheté en pharmacie, sur prescription. Le 11 juillet, l'Afssaps avait émis un avis pour recommander aux médecins "de considérer le risque cardio-vasculaire mais aussi hépatique avant toute prescription de dronédarone [molécule du Multaq, Ndlr]". Cette décision faisait suite à l'arrêt par Sanofi d'un essai clinique visant à étendre l'indication thérapeutique du produit. Mais l'Afssaps enjoignait toutefois les pharmaciens à « poursuivre la délivrance du médicament ».

Si Bruxelles décidait du retrait, c'est un marché de pas moins de 500 millions d'euros potentiels que perdrait Sanofi, selon les estimations des analystes de Natixis.

En attendant, le Ministre a précisé ce lundi que  "des décisions seront à nouveau envisagées à la rentrée sur le maintien ou non du Multaq".