Une facture post-Fukushima de 10 milliards d'euros pour EDF

Par Marie-Caroline Lopez  |   |  548  mots
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Au terme de son rapport post-Fukushima, l'Autorité de sûreté nucléaire exige de nouveaux équipements sur le parc français. Elle réclame en outre à EDF la création d'une "force d'action rapide" dès 2012.

C'est l'histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein. Les conclusions rendues mardi par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) au terme de son examen du parc nucléaire français à la lumière des premiers enseignements de la catastrophe nucléaire de Fukushima sont doubles. D'abord un satisfecit général puisque que le gendarme du nucléaire affirme que le "niveau de sûreté des installations est suffisant pour ne pas exiger l'arrêt immédiat d'aucune d'entre elles". Ce qui était attendu. Mais l'ASN ajoute que "la poursuite de leur exploitation nécessite d'augmenter dans les meilleurs délais, au-delà des marges de sûreté dont elles disposent déjà, leur robustesse face à des situations extrêmes".

Pour améliorer la résistance du parc français aux risques mis en lumière à Fukushima (séisme, inondations, perte d'alimentation électrique et d'apport en eau), l'ASN exige d'EDF de nouvelles dispositions pour les 59 réacteurs français (y compris l'EPR en construction), qui nécessitera d'investir des "milliards d'euros", selon le président de l'ASN, André-Claude Lacoste. Principalement, il s'agit de mettre en place un centre de gestion de crise "bunkerisé", à la fois centre de commande et de communication pour chacune des 20 centrales nucléaires ; un diesel « d'ultime secours » par réacteur qui puisse fonctionner quelques soient les conditions extérieures, y compris en cas d'accident grave ; et, selon le même principe, une alimentation en eau.

EDF, qui a jusqu'au 30 juin 2012 pour définir ces éléments, chiffrer leurs coûts et proposer un calendrier de déploiement, a fait savoir dès mardi que le "surcoût" serait de 10 milliards d'euros maximum par rapport aux investissements déjà programmés. "Pour pouvoir exploiter notre parc de 58 réacteurs jusqu'à 60 ans, nous avions quantifié les dépenses nécessaires à environ 40 milliards d'euros" sur une trentaine d'années et "nos premières estimations montrent qu'on devrait rester dans une fourchette de 40 à 50 milliards d'euros", a déclaré à l'AFP le directeur de l'ingeniérie du parc nucléaire d'EDF, Jean-Marc Miraucourt.

Le ministre de l'Énergie, Éric Besson, a prévu de réunir lundi 9 janvier les exploitants nucléaires (EDF, CEA, Areva) afin de définir le calendrier de ce programme. L'ASN a prévenu qu'elle comptait sur "des délais raisonnables et normaux" et à défaut, imposerait des "mesures intermédiaires et provisoires". Par exemple, si le déploiement d'un diesel par réacteur prend trop de temps, il s'agirait d'en installer un par site ou un équipement sans protection externe, a précisé André-Claude Lacoste. "Quels risques prend-on tant que ces travaux n'ont pas été faits ?", s'interroge Bernard Laponche, de l'association de scientifiques et d'experts Global Chance.

"dispositions renforcées"

L'ASN exige en outre qu'EDF déploie à partir de 2012 la "force d'action rapide nucléaire" proposée par l'électricien qui permettra des interventions en moins de 24 heures dans les centrales. Le gendarme du nucléaire demande également la mise en place de "dispositions renforcées" afin de réduire les risques de "dénoyage" (mise à sec) des piscines d'entreposage des combustibles dans les centrales et à La Hague. Enfin, l'ASN impose la réalisation d'études de faisabilité pour des dispositifs permettant de protéger les eaux souterraines en cas d'accident grave.