Les biocarburants patinent en France

Par Sara Sampaio  |   |  451  mots
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L'Observatoire des biocarburants, qui a réuni la filière mercredi pour identifier les freins à son essor, a déçu les producteurs de bioéthanol.

Les biocarburants ont, en France, du retard à l'allumage. Destinée à faire le point sur la feuille de route nationale, la réunion de l'Observatoire des biocarburants a pourtant déçu, mercredi, certains de ses participants, notamment les producteurs de bioéthanol. "Ce rendez-vous n'a débouché sur aucune mesure concrète, aucun engagement n'a été pris par les motoristes ou les pétroliers. Ce n'est pas ainsi que nous pourrons devenir les fournisseurs privilégiés de l'Europe", a déclaré Alain Jeanroy, directeur général de la CGB (Confédération générale des planteurs de betteraves).

Certes, le gouvernement est volontariste en la matière. Bruxelles a imposé en 2008 l'introduction de 10% d'énergies renouvelables minimum dans les transports à l'horizon 2020. Paris, sous l'impulsion du Grenelle de l'environnement, a fait le pari d'atteindre le seuil de 7% dès 2010. Cet objectif n'a pourtant pas été atteint, a reconnu récemment le ministère de l'Écologie. Les essences SP95-E10 (qui contient 10% d'éthanol) et E85 (85% d'éthanol, utilisable uniquement dans les véhicules flex-fuel équipés de moteurs adaptés), n'ont pas connu le développement escompté. "Selon les estimations, on serait plutôt à 6,25% d'incorporation de bioéthanol et de biodiesel", rapporte Sylvain Demoures, secrétaire général du SNPAA (producteurs industriels d'alcool agricole).

L'E85 reste un marché de niche

Pour Alain Jeanroy, "il y a un nombre insuffisant de pompes et les moteurs flex-fuel ne sont pas assez promus par les constructeurs." De fait, 307 stations-service distribuent l'E85 sur les 12.000 du territoire. Le SP95-E10 fait mieux avec 3.085 stations. L'industrie automobile a, quant à elle, commercialisé 21.947 voitures flex-fuel en France entre 2006 et 2011, selon le SNPAA. À comparer aux 2,2 millions d'immatriculations réalisées sur le marché français en 2011... "Le flex-fuel a été oublié par le dispositif du bonus, estime Sylvain Demoures. Près de 100.000 GPL ont été vendus avec un bonus de 2.000 euros. Les constructeurs ont dû faire des choix."

Malgré tout, "l'utilisation des biocarburants progresse", estime le SNPAA. Le SP95-E10 a atteint 20% de part de marché. Les volumes commercialisés d'E85 ont augmenté de 44% entre janvier et novembre 2011 par rapport à l'année précédente. Mais "l'E85 reste un marché de niche", reconnaît Sylvain Demoures. Son principal attrait pour les consommateurs est son prix. Le litre était, début janvier, 62 centimes d'euros moins cher que le SP95. Producteurs et distributeurs se sont ainsi associés au sein d'une campagne d'information pour "faire connaître les véhicules compatibles et les stations disponibles". De leur côté, les producteurs de betterave estiment que l'enjeu est la conquête de parts de marché à l'export. "Pour l'instant, la frilosité des pouvoirs publics n'incite pas aux investissements", regrette Alain Jeanroy.