Nucléaire : Greenpeace dénonce des problèmes sur des cuves de réacteurs français

Par Marie-Caroline Lopez (avec AFP)  |   |  808  mots
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Greenpeace affirme que 12 réacteurs français, au moins, présentent des « micro-fissures » au niveau de la cuve. L'Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) réfute toute comparaison avec le problème du réacteur belge de Doel 3, à l'arrêt après la détection de "potentielles fissures".

Citant différents rapports publics de l'Autorité de sureté nucléaire française (ASN), Greenpeace affirme que certains réacteurs français connaissent des "microfissures", que ce soit sur les tubulures ou dans le corps même de la cuve, comme en Belgique. Denis Baupin, vice président Europe Ecologie les Verts de l'Assemble Nationale, a déjà soulevé la même question le week-end dernier et interpellé par écrit à ce sujet la ministre de l'énergie.
Ces fissures sont des "défauts sous revêtements" ou DSR, c'est à dire des fissures dans le métal de base de la cuve, "apparues lors de la fabrication au moment du recouvrement par la couche d'acier inoxydable". La plus grande de ces "micro-fissures" fait "une dizaine de mm" de long, indique Greenpeace.

Des microfissures sur 12 cuves de réacteurs en France

Ainsi, des DSR ont été identifiés sur 23 tubulures de 12 cuves (notamment Dampierre 4, Saint Laurent, Gravelines 3...), et, "plus grave" selon Sophia Majnoni d'Intignano, chargée de campagne à Greenpeace France, sur le corps de la cuve de 10 réacteurs, pour l'essentiel sur le réacteur 1 de Tricastin. "Si l'origine n'est pas la même qu'à Doel, la conséquence est la même", souligne-t-elle.
L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), selon ses propres écrits, contrôle ces défauts sur les cuves lors de la visite décennale, "pour s'assurer qu'ils n'évoluent pas". Par ailleurs, en 2001, des "petites fissures" ont été détectées au niveau de la soudure d'une pénétration de fond de cuve à Gravelines 1, zone particulièrement sensible, souligne Greenpeace. Selon l'association, l'ASN aurait demandé à EDF de vérifier l'ensemble des pénétrations de fond de cuve des réacteurs de 900 et 1300 MW.

L'ASN dément tout point commun avec le problème de Doel 3

De son côté, l'Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) est catégorique. "Les défauts sur les viroles des réacteurs français ne sont pas comparables à ceux détectés à Doel 3", affirme une porte-parole de l'ASN. "En effet, ils sont dus à un phénomène connu et bien identifié qui n'est pas comparable à celui vraisemblablement en jeu à Doel 3. Par ailleurs, les DSR sont des défauts isolés : il y en a une trentaine sur l'ensemble du parc nucléaire français alors que près de 10 000 défauts ont été observés sur la seule cuve de Doel 3", ajoute-t-elle.

"Les DSR sont aujourd'hui bien identifiés. Ils sont contrôlés tous les 10 ans et n'évoluent pas lors du fonctionnement des cuves. Ils font par ailleurs l'objet d'une justification particulière par EDF examinée périodiquement par l'ASN et leur absence de nocivité est avérée. Le dernier examen de cette justification apportée par EDF a fait l'objet d'une prise de position de l'ASN en septembre 2010, publiée sur le site Internet de l'ASN", précise la porte-parole.
 Quant au défaut détecté en septembre dernier sur "une pénétration de fond de cuve (PFC)" de Gravelines 1, "il n'est pas non plus comparable aux défauts détectés à Doel 3", selon l'ASN. "Il s'agit d'un défaut qui affecte une zone particulière : la soudure de la pénétration et non pas le métal même de la cuve. Il s'agit d'un défaut unique et non pas d'une nombre important de défaut sur une cuve".
"Les conditions de maintien en service et de réparation de ce type de défaut sont donc significativement différentes de celles concernant de nombreux défauts affectant le corps même de la cuve. EDF a mis hors service l'équipement concerné et a mis en place des mesures de surveillance spécifiques. Les conditions de réparation à moyen terme de cette PFC feront l'objet d'une instruction approfondie par l'ASN qui s'assurera en particulier de son innocuité pour la cuve", conclut la porte-parole de l'agence française.

Réunion technique en cours sur le sujet à Bruxelles

Une "réunion technique" se déroule ce jeudi après-midi à Bruxelles entre experts chargés de la sûreté nucléaire en Europe, après la découverte de défauts sur la cuve d'un réacteur de Doel, dans le nord de la Belgique, la semaine dernière. Suite à la découverte de cette fissure, le réacteur a été arrêté et les autorités belges se sont dites "sceptiques" quant à la possibilité d'une relance.
En insinuant que les problèmes sont de nature comparable en Belgique et en France, Greenpeace "ne comprend pas une telle différence d'approche entre les régulateurs français et belge". Greenpeace demande en outre, suite à l'affaire de Doel, qu'une liste complète des réacteurs équipés du même type de cuve "soit publiée au plus vite".