Et si le prix du gaz changeait chaque mois...

Par Marie-Caroline Lopez  |   |  701  mots
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Tandis que les fournisseurs de gaz se préparent à attaquer la décision du gouvernement d'augmenter de «seulement» 2% le prix du gaz au 1er octobre, un passage à une fixation mensuelle du prix du gaz est évoqué. Une façon pour le gouvernement de se débarrasser de ce casse-tête.

Et si le prix du gaz changeait tous les mois? Serait-t-il plus facile pour le gouvernement d'annoncer des hausses de 1,5% ou 2,5% chaque mois, plutôt que 5% ou 7% tous les trois mois? Pas forcément! Thierry Breton, alors ministre de l'Economie, s'en souvient. Il avait testé la mensualisation du prix du gaz avant de se lasser d'annoncer des augmentations tous les mois. «Ce serait plus facile si c'était réellement automatisé, si la formule de calcul des prix était strictement appliquée, sans annonce ni intervention du gouvernement. Après tout, les prix à la pompe changent bien tous les jours», commente un spécialiste du secteur.

"S'ils préférent annoncer des hausses de 2% tous les mois, tant mieux !"
Ce serait en effet le rêve du gouvernement qui, comme tous ses prédécesseurs, souhaiterait se débarrasser du pensum politique qui consiste à annoncer aux 7 millions de Français qui se chauffent au gaz que les prix vont augmenter. La tâche est d'autant plus délicate que, depuis l'hiver dernier, les fournisseurs n'hésitent plus à attaquer cette décision devant le conseil d'Etat. Et celui-ci en a déjà annulée une. Et autorisé les fournisseurs à facturer rétroactivement au titre du dernier trimestre 2011.

GDF Suez attaquera sur le fond

Une mensualisation du changement de tarif pour mieux répercuter les prix de marché du gaz ? Un petit concurrent de GDF Suez n'ose y croire. «S'ils préfèrent augmenter de 2% par mois, tant mieux. En attendant, nous continuerons à veiller à ce que nos coûts d'achat soient bien répercutés». Pour l'instant, l'Anode, l'association qui regroupe les fournisseurs alternatifs de gaz, attend la publication de tous les textes la semaine prochaine pour décider d'un éventuel recours. Elle est la seule à pouvoir saisir en référé le Conseil d'Etat. GDF Suez ne peut arguer d'une situation d'urgence, à la différence de ses petits concurrents à la situation financière beaucoup plus fragile. «Si l'Anode n'attaque pas en référé, nous le ferons sur le fond, comme cet été», indique-t-on en interne dans le groupe dirigé par Gérard Mestrallet. Mais les délais de recours sont alors beaucoup plus longs.

Difficile sans compteur intelligent
«A moyen terme, la seule solution, c'est la fixation mensuelle du prix du gaz qui permettrait de lisser les à-coups et d'éviter les embardées que peuvent réserver les ajustements trimestriels», affirme un professionnel, en résumant une opinion qui commence à se répandre dans le secteur. Mais, pour lui, «la mensualisation ne peut se concevoir sans compteur intelligent de gaz. Le système actuel de relève annuelle, ou biannuelle, n'est pas adapté à une variation fréquente du prix, puisque les consommations sont estimées la plupart du temps», estime-t-il. GRDF doit expérimenter en 2013 à grande échelle un tel compteur.

Vers une nouvelle formule de calcul
A plus court terme, le gouvernement semble favorable à une nouvelle formule de calcul des prix. Elle serait proposée dans le cadre du projet de loi du député François Brottes sur les tarifs progressifs d'électricité et de gaz qui doit être présenté la semaine prochaine à l'Assemblée nationale. «Une autre formule? on en a eu deux en 12 mois!», s'exclame un fournisseur. En janvier dernier, la fameuse formule a néanmoins pas mal bougé en intégrant une plus grande part de prix spot (plus bas en ce moment que les contrats long terme que nouent en grande partie les fournisseurs). La part est passée de 10% à 26%.

Une hausse de 0,9% aurait suffi au 1er octobre
En attendant, l'imbroglio continue. Et s'autoalimente. GDF Suez a demandé une hausse de 7% au 1er octobre (et a obtenu 2%) pour compenser la différence entre les 8% demandés au 1er juillet les 2% obtenus. En d'autres termes, à en croire des sources internes dans le groupe, une hausse de 0,9% aurait été suffisante en octobre s'il n'y avait pas un rattrapage à effectuer! L'enjeu est majeur puisque 70% des ventes de gaz s'effectuent d'octobre à mars. «A noter, les prix spots, réclamés par les associations de consommateurs, subissent des hausses en hiver. Tandis que les contrats long terme sont, eux, à l'abri des variations saisonnières», glisse au passage un fournisseur.