Alstom : le gendarme boursier met l'Etat en garde

Par latribune.fr  |   |  520  mots
L'Autorité des marchés financiers a jugé que l'accord conclu entre le gouvernement et Bouygues constituait une action de concert.
Pour l'Autorité des marchés financiers, l'Etat prend le risque de se placer, à son insu, dans l'obligation de déclencher une offre publique d'achat sur le groupe industriel à travers sa stratégie de montée au capital d'Alstom.

L'Etat devra-t-il lancer une OPA sur Alstom? L'Autorité des marchés financiers a jugé jeudi que l'accord conclu entre le gouvernement et Bouygues dans le cadre du projet de rapprochement entre Alstom et General Electric constituait 'une action de concert', ce qui pourrait renchérir le coût de l'entrée de l'Etat dans le capital du spécialiste des équipements pour le transport ferroviaire et l'énergie.

Une action de concert qui implique une OPA

Dans un avis rendu public en fin de journée, l'AMF a estimé que "l'Etat et Bouygues (ndlr, actionnaire à 29,4% d'Alstom) agissent de concert" dans ce dossier. Il souligne "l'engagement de Bouygues à ce que l'Etat soit représenté au conseil d'administration, le prêt de titres et l'engagement de Bouygues de s'opposer à toute remise en cause des droits de vote double en assemblée générale. Ce qui matérialise le fait qu'ils ont un projet commun pour le groupe".

Par cet état de fait, les pouvoirs publics et Bouygues s'exposent donc au risque de dépasser à eux deux le seuil des 30% du capital, qui obligerait à lancer une opération publique d'achat (OPA) sur Alstom.

"Politique commune"

Plus précisément, pour décider que les deux entités agissent "de concert", ce qui signifie que les deux parties ont une stratégie commune sur Alstom, le gendarme de la Bourse s'appuie notamment sur le prêt de titres accordé par Bouygues à l'Etat, qui permet à ce dernier d'avoir des relais au conseil d'administration et de peser sur la stratégie. 

Aux yeux de l'AMF," L'accord permet de mettre en oeuvre une politique commune vis-à-vis de la société Alstom, laquelle consiste notamment en un projet devenu commun, la réalisation de l'alliance avec General Electric, qu'aucune des parties ne pouvait conduire sans l'accord de l'autre".

Risque en cas d'achat sur le marché

Or, cet accord conclu le 22 juin prévoit que l'Etat se donne les moyens d'acquérir 20% du capital d'Alstom, une fois l'alliance bouclée avec l'américain General Electric, soit en rachetant des actions auprès de Bouygues, soit directement sur le marché.

C'est le dernier aspect de ce compromis qui pourrait poser problème, puisque si l'Etat rachetait directement sur le marché sans passer par Bouygues, le seuil des 30% pourrait être assez vite atteint.

Un "seuil fatidique qui ne sera pas dépassé"

Le patron de l'Agence des participations de l'Etat (APE), David Azéma, a cependant relativisé l'impact de cette déclaration du gendarme boursier, qui ne remet pas pour autant en question la validité de l'accord. 

"La notion de concert est une notion complexe, nous ne pouvions pas savoir quelle serait la position prise par l'AMF, nous avions prévu les deux cas de figure", a réagi le patron de l'APE.

David Azéma, a rappelé toutefois que l'Etat et Bouygues s'étaient engagés dans le cadre de leur accord à ne pas franchir ce seuil fatidique de déclenchement de l'offre. "La seule conséquence est que les deux parties veilleront à ne pas franchir ensemble le seuil de déclenchement d'une offre publique", a-t-il assuré à l'AFP.