50 milliards de dollars : l'amende que la Russie refuse de verser aux actionnaires de Ioukos

Par latribune.fr  |   |  614  mots
L'ancien patron de Ioukos, accusé de fraude au moment de la prise de contrôle de Ioukos, a passé dix ans derrières les barreaux. Il n'a plus de lien avec la société. (Photo : Reuters)
La Cour permanente d'arbitrage de La Haye s'est prononcée lundi en faveur des actionnaires de la défunte compagnie pétrolière russe Ioukos, ordonnant à Moscou de leur verser une cinquantaine de milliards de dollars de dédommagements. La Russie a fait appel.

L'information avait fuité dans la presse russe. Elle a été confirmée lundi matin par les avocats en charge de l'affaire. La Cour permanente d'arbitrage de La Haye s'est prononcée lundi en faveur des actionnaires de la défunte compagnie pétrolière russe Ioukos. Selon l'arbitrage, Moscou doit leur verser quelque 50 milliards de dollars (37 milliards d'euros) de dédommagement pour les avoir expropriés en 2003, contre les 100 milliards réclamés dans les trois plaintes.

Moscou demande l'annulation

Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a annoncé lors d'une conférence de presse, tenue peu de temps avant que ne soit annoncée officiellement la condamnation de Moscou par la cour permanente d'arbitrage de La Haye, que la Russie utiliserait toutes les options juridiques à sa disposition pour défendre sa position. 

"Ce sera une procédure d'annulation, une contestation (de la décision de la cour) avec pour but d'obtenir une annulation", a expliqué le ministre russe des Finances, Sergueï Stortchak, cité par l'agence Itar-Tass.

"Le tribunal arbitral n'était pas compétent pour étudier la question qui lui a été soumise", ajoute le ministère, expliquant que la Russie n'a pas ratifié le traité sur la Charte de l'énergie (TCE), qui protège les investissements dans les projets énergétiques et sur laquelle se sont appuyés les plaignants pour l'emporter.

Guerre des oligarques

A l'époque de son expropriation, Ioukos, alors première compagnie pétrolière russe, était contrôlée par l'oligarque Mikhaïl Khodorkovski, naguère l'homme le plus riche de Russie avant d'être incarcéré.

Arrêté en octobre 2003 et condamné à dix ans de prison pour détournement de fonds et fraude, Mikhaïl Khodorkovski, qui avait nié les faits qui lui étaient reprochés, avait bénéficié en décembre dernier d'une libération anticipée, sortant de prison huit mois avant d'avoir purgé la totalité de sa peine.

Rosneft se dit intouchable

Ioukos, qui pesait alors 40 milliards de dollars, avait été démantelé et la majeure partie de ses avoirs avaient été transmis à Rosneft, compagnie pétrolière dirigée par Igor Setchine, un ancien collaborateur du président russe Vladimir Poutine.

Rosneft a réagi à la décision de La Haye en déclarant que toutes les opérations d'acquisition des actifs de Ioukos étaient légales et qu'aucune plainte ne pourrait être portée contre lui sur la base de ce jugement.

Khodorkovski plus dans la course

Ce sont des filiales du groupe Menatep qui ont porté plainte auprès du tribunal de La Haye. Menatep, la holding par l'intermédiaire de laquelle Khodorkovski contrôlait Ioukos, est devenue GML et l'homme d'affaires russe n'est plus actionnaire de GML ni de Ioukos.

Il semble que le principal bénéficiaire de ce dédommagement soit Léonid Nevzline, un associé qui a fui en Israël pour couper court aux poursuites et qui a une participation de l'ordre de 70%. Après avoir été emprisonné, Khodorkovski avait vendu le contrôle de Menatep, qui détenait 60% à 70% de Ioukos, à Nevzline.

D'autres procédures en cours

D'autres actionnaires ont lancé d'autres procédures judiciaires. Une porte-parole de Ioukos a par ailleurs déclaré lundi que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) devrait annoncer jeudi sa décision concernant une plainte déposée par l'ensemble des actionnaires du groupe pétrolier et distincte de celle de GML.

Un jugement provisoire de la cour de 2011 s'était prononcé en partie pour la fédération russe mais avait invité Ioukos à poursuivre la procédure en vue de réclamer une "satisfaction équitable".

Article publié à 11h03, mis à jour à 17h16.