Nucléaire : le G7 exige que la Russie "rende immédiatement" à l'Ukraine la centrale de Zaporijia

Par latribune.fr  |   |  975  mots
La centrale nucléaire de Zaporijia est occupée depuis le 4 mars par les forces russes. (Crédits : ALEXANDER ERMOCHENKO)
Le G7 accuse la Russie de "mettre en danger la région" et exige qu'elle « rende immédiatement à son propriétaire souverain légitime, l'Ukraine, le contrôle total de la centrale nucléaire de Zaporijia ». Une réaction qui vient après les avertissements de l'opérateur ukrainien Energoatom qui, ce mardi, a alerté sur le risque que fait planer le raccordement à la Crimée de la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijjia par les forces russes ; et celui, lundi, du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, qui a brandi le spectre d'une nouvelle catastrophe de Tchernobyl après les deux bombardements que la plus grande centrale d'Europe a subi la semaine dernière.

[Article publié le 10.08 à 13:00 mis à jour à 13:10 avec réaction du G7]

Le groupe des pays les plus industrialisés du G7 a accusé mercredi Moscou de « mettre en danger » la région ukrainienne autour de la centrale nucléaire de Zaporijia occupée par les troupes russes, et demandé la restitution « immédiate » de la centrale à l'Ukraine.

"Nous exigeons que la Russie rende immédiatement à son propriétaire souverain légitime, l'Ukraine, le contrôle total de la centrale nucléaire de Zaporijjia", écrit le G7 dans un communiqué publié par l'Allemagne, qui en assure la présidence. "C'est le contrôle continu de la centrale par la Russie qui met la région en danger", assure le groupe.

"Le personnel ukrainien qui exploite la centrale nucléaire de Zaporijjia doit pouvoir s'acquitter de ses fonctions sans subir de menaces ou de pressions", juge encore le G7.

Le groupe des sept se dit également "profondément préoccupé par la grave menace" que fait peser l'armée russe sur "la sécurité" des installations nucléaires ukrainiennes.

Leur occupation par les troupes de Moscou "augmente considérablement le risque d'un accident ou d'un incident nucléaire" et "met en danger la population de l'Ukraine, les États voisins et la communauté internationale", selon la même source.

La plus grande centrale nucléaire d'Europe dans une situation « extrêmement dangereuse »

C'est « extrêmement dangereux ». Hier mardi, c'est en ces termes que l'opérateur ukrainien Energoatom a alerté sur le raccordement à la Crimée de la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijia par les forces russes. Ces dernières occupent l'installation depuis le 4 mars et vont procéder à une réorientation de la production électrique qui pourrait avoir de graves conséquences, affirme-t-il. Regroupant 6 des 15 réacteurs ukrainiens, la centrale nucléaire de Zaporijia est la plus grande d'Europe. Située près de la ville d'Energodar sur le fleuve Dniepr, non loin de la péninsule ukrainienne de la Crimée (sud), elle est capable d'alimenter quatre millions de foyers,.

« Les militaires russes présents dans la centrale nucléaire de Zaporijia mettent en œuvre le programme de (l'opérateur russe) Rosatom visant à raccorder la centrale aux réseaux électriques de Crimée », a, ainsi, expliqué le président d'Energoatom, Petro Kotin, à la télévision ukrainienne. « Pour ce faire, il faut d'abord endommager les lignes électriques de la centrale reliées au système énergétique ukrainien. Du 7 au 9 août, les Russes ont déjà endommagé trois lignes électriques. En ce moment, la centrale fonctionne avec une seule ligne de production, ce qui est un mode de travail extrêmement dangereux », a-t-il ajouté. « Lorsque la dernière ligne de production sera débranchée, la centrale sera alimentée par des groupes électrogènes fonctionnant au diesel. Tout dépendra alors de leur fiabilité et des stocks de carburant », a aussi prévenu Petro Kotin.

Bombardements: attaquer des centrales est "suicidaire" fustige l'ONU

Le site de la centrale, qui est la plus grande d'Europe, a été bombardé à deux reprises à la fin de la semaine dernière, y compris à proximité d'un réacteur. Kiev et Moscou se sont mutuellement accusés de ces frappes, sans qu'aucune source indépendante ne puisse le confirmer. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a brandi le spectre de la catastrophe de Tchernobyl. « Le monde ne doit pas oublier Tchernobyl et le fait que Zaporijia est la plus grande centrale d'Europe. La catastrophe de Tchernobyl (en 1986), c'est l'explosion d'un réacteur et la centrale de Zaporijia est dotée de six réacteurs », a-t-il déclaré lundi soir dans son adresse vidéo quotidienne, appelant à de « nouvelles sanctions contre l'Etat terroriste et contre toute l'industrie nucléaire russe qui crée la menace de la catastrophe nucléaire ».

« Toute attaque contre des centrales nucléaires est une chose suicidaire », a abondé lundi matin le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres. « J'espère que ces attaques prendront fin. En même temps, j'espère que l'AIEA pourra accéder à la centrale ». L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) avait jugé samedi « de plus en plus alarmantes » les informations en provenance de Zaporijia. Alors que trois des six réacteurs étaient encore opérationnels début août, l'un d'eux a été arrêté à la suite de bombardements qui ont endommagé une ligne de haute tension le 5 août. L'AIEA a déclaré à plusieurs reprises qu'elle souhaitait organiser une inspection de la centrale de Zaporijia. Si les autorités ukrainiennes s'y sont initialement opposées, jugeant qu'une telle visite légitimerait l'occupation russe, elles se sont montrées moins catégoriques ces derniers jours.

Le patron d'Energoatom accuse les Russes d'avoir tué un employé

Malgré son occupation par les forces russes, le fonctionnement de la centrale est assuré par des employés ukrainiens. « Des Ukrainiens contrôlent les installations des réacteurs à la centrale nucléaire de Zaporijia », a, en effet, déclaré lundi à la télévision ukrainien Petro Kotine, le président d'Energoatom. Ce dernier, qui appelle à déloger les occupants russes et à créer une « zone démilitarisée » sur le site de la centrale, estime qu'elle est occupée par « environ 500 soldats et 50 véhicules lourds, des tanks et des camions ». Il affirme que « les Russes ont enlevé une centaine d'employés de la centrale nucléaire » et qu'« un employé est mort après avoir été torturé ». Il a, en outre, indiqué n'avoir « aucune information » sur un éventuel minage des installations, mais, selon lui, « les Russes ont miné la côte près de la centrale nucléaire » et « il y a probablement des voitures chargées d'explosifs près du premier et du second réacteur ».

(avec AFP)