Pétrole : face à la menace de surabondance, la baisse de l'Arabie saoudite fait remonter les cours

Par latribune.fr  |   |  751  mots
L'Opep fait face à l'augmentation continue de la production pétrolière des Etats-Unis, en passe de devenir numéro un mondial, devant l'Arabie saoudite, avec son record à 11,6 millions de barils par jour, qui pourraient atteindre 12 millions de bpj l'an prochain. (Photo : dans le Dakota du Nord, près de la ville de Williston, le gisement de Bakken a été le site d'une véritable ruée vers l'or à partir de 2008 avec l'invention de la technique de la fracturation hydraulique ou "fracking".) (Crédits : Reuters)
Alors que les grands producteurs ont posé le même diagnostic d'une surproduction en 2019 avec notamment le ralentissement de l'activité en Chine, ils ont échoué à trouver une position commune. L'Arabie saoudite a fait cavalier seul en annonçant la réduction de sa production de 500.000 barils par jour, ce qui redonné quelques couleurs au pétrole qui, après avoir caracolé ces derniers mois jusqu'à un plus-haut de quatre ans, avait vu en un mois ses cours s'effondrer de 20%.

Les cours du pétrole étaient orientés à la hausse, lundi en Asie, après l'annonce saoudienne d'une baisse de production de 500.000 barils par jour en raison des craintes de surabondance de l'offre et de l'effondrement des cours depuis un mois.

Vers 05h20 GMT, le baril de "light sweet crude"(WTI), référence américaine du brut, pour livraison en décembre, gagnait 70 cents à 60,89 dollars dans les échanges électroniques en Asie. Le baril de Brent, référence européenne, pour livraison en janvier, prenait 1,13 dollar à 71,31 dollars.

Après un plus-haut de quatre ans, le pétrole s'effondre de 20% en un mois

Les cours du pétrole ont perdu un cinquième (20%) de leur valeur en un mois après avoir progressé début octobre à un plus-haut de quatre ans. La chute est le produit d'une conjonction de facteurs, entre les craintes d'une demande en berne et une hausse de la production mondiale.

Cette année, sous la pression des Etats-Unis et d'autres pays consommateurs, qui souhaitaient un rééquilibrage du marché pour compenser la baisse de l'offre iranienne liée aux sanctions américaines, le premier producteur mondial de brut avait augmenté sa production jusqu'à environ 1 million de bpj en plus.

Mais après l'annonce par Washington d'exemptions à ces sanctions au profit de plusieurs pays clients de l'Iran, les investisseurs craignent désormais une offre excédentaire, notamment avec une demande chinoise qui ralentit, ce qui a favorisé la rechute des cours du pétrole.

Lire aussi : Les Etats-Unis autorisent la Chine, l'Inde et le Japon à acheter du pétrole iranien

Pour mémoire, le prix du Brent est tombé vendredi sous le seuil de 70 dollars le baril pour la première fois depuis avril alors qu'il avait dépassé 86 dollars le 3 octobre. Quant au WTI, il a porté sa baisse depuis son pic du mois dernier à plus de 20%, ce qui définit un "marché baissier" ("bear market"), un signal technique préoccupant.

L'Arabie saoudite, première (et seule) à réagir

Les grands producteurs de pétrole ont affirmé dimanche que l'offre mondiale de brut l'année prochaine surpasserait la demande, appelant à l'adoption de "nouvelles stratégies" basées sur des ajustements de la production.

Cette déclaration conjointe a été diffusée à l'issue d'une réunion à Abou Dhabi de pays membres de l'Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole) et non membres du cartel, au moment où la dégringolade des prix de l'or noir fait craindre un effondrement des cours, comme en 2014.

Le ministre saoudien de l'Energie Khaled al-Faleh a annoncé que son pays, le premier exportateur mondial de pétrole (en passe d'être détrôné par les Etats-Unis cette année), allait réduire ses exportations de 500.000 barils par jour (bpj) en décembre. Cette décision équivaut à une baisse d'environ 0,5% de l'offre pétrolière mondiale.

L'Opep désunie face aux risques de surabondance

Dimanche, à Abou Dhabi, lors d'une réunion du comité de surveillance du marché pétrolier réunissant des pays membres de l'Opep ou extérieurs au cartel, Khalid al Falih a expliqué :

"Nous avons augmenté la production en réaction à la demande"

Il ajoutait:

"Je vais vous donner une information qui est que les prévisions de décembre sont inférieures de 500.000 barils à celles de novembre. Nous assistons à une modération qui est liée en partie à la fin de l'année, en partie à des opérations de maintenance, (...) donc nous livrerons moins en décembre que nous ne le faisons en novembre."

L'agence Reuters avait auparavant appris dimanche de deux sources que l'Arabie saoudite discutait d'une proposition susceptible de se traduire par une diminution de 1 million de barils par jour de l'offre de l'Opep et de ses alliés.

Les sources ont précisé qu'un tel accord dépendrait entre autres du niveau des exportations iraniennes après l'entrée en vigueur des sanctions américaines et des exemptions accordées à plusieurs pays, dont la Chine et l'Inde. La Russie s'est elle engagée à s'aligner sur tout nouvel accord permettant de limiter la production.

Les Etats-Unis deviennent premier producteur mondial

"L'Arabie saoudite a été proactive en annonçant une baisse de production de 0,5 million de baril par jour en décembre", a déclaré Stephen Innes, analyste chez Oanda. Pour cet analyste, l'Opep doit aussi s'adapter à l'augmentation continue de la production pétrolière des Etats-Unis, qui a inscrit un record à 11,6 millions de bpj et pourrait dépasser les 12 millions l'an prochain.

(Avec Reuters et AFP)